mercredi, décembre 31, 2014

Missive annuelle

2014, quelle année tu as été! Une année de montagnes russes qui ont défilées à toute vitesse. Et je te regarde, aujourd'hui, dans le blanc des yeux en me demandant ce que je peux bien penser de toi, maintenant.

Tu m'auras amenée sur les plages d'un tout inclus mexicain, dont je garde des souvenirs impérissables et chaleureux. Pas tant à cause de la température que pour les souvenirs que je m'y suis fabriqué de toutes pièces. Un petit séjour pour me sortir de l'hiver québécois qui ne finissait plus de nous border de neige et de températures frisant l'indécence. Je me suis donné, ainsi, une semaine de plus d'été, ce qui m'a fait le plus grand bien, même si je suis bien obligée d'admettre que j'ai servi de buffet ambulant aux moustiques, voraces, de cette partie du monde.

Tu m'auras aussi permis de revoir Corey Hart en spectacle, une dernière fois. Une soirée mémorable, longue et généreuse. Une soirée de rires et de chants partagés avec la seule personne de ma connaissance qui aime cet artiste autant que moi. J'ai eu le sentiment de porter sur moi comme un parfum de mon adolescence dont les effluves traînent encore autour de moi. Par les musiques du chanteur, bien entendu, puisque je l'écoute toujours de temps à autres, mais autre chose aussi de cette moi que j'ai déjà été et que cet événement aura participé à faire ré-émerger, un peu plus tard en cours d'année.

2014, tu m'auras aussi vu traverser un été difficile puisque je me suis mal comportée avec mes amies les plus proches, le soir de mon anniversaire. Mauvais lorsqu'on aimerait conserver les contacts. Et je me suis sentie toute croche tout en refusant de faire les premiers pas, en sachant pertinemment que j'étais dans le tort. J'ai explosé. C'est le terme le plus juste pour décrire mon attitude. Et je dirais que si ce genre de choses m'arrive de moins en moins régulièrement, ça fait néanmoins partie de mes grands travers, et j'ose espérer, un jour, réussir à les mater complètement. Comme je suis une femme chanceuse, qui sait bien s'entourer, nous avons fini par retisser les liens que j'ai déchirés, un soir de printemps.

Et puis, tu as apporté l'automne que je voyais arriver avec réticence. Beaucoup de sujets m'étaient à vifs autant dans ma vie professionnelle que personnelle. Je n'y avait pas encore mis les pieds (dans l'automne, je veux dire) que déjà j'avais peur. Pour rien. Vraiment. Parce qu'au lieu de s'éteindre avec les feuilles qui tourbillonnent en dénudant les arbres, l'automne, pour moi, s'est allumé. Au rythme d'un spectacle qui m'aura assez émue pour remettre en mouvement mes doigts sur le clavier. Pour que je recommence à être satisfaite de mes opinions et des mots que je sais mettre ensemble pour m'expliquer la vie, et peut-être l'expliquer à d'autres, accessoirement. Pas tant accessoirement, en fait, parce que mes mots ont été autant de ponts vers tout plein d'autres que j'avais négligés au cours des années de silence. Pour moi, l'automne de ton année est rempli de perles aussi lumineuses, de toutes ces gens qui m'auront autorisée à revenir à leurs rivages.

Alors vraiment, 2014, je me dis que tu ne fus pas une année de tout repos, mais qu'au bout du compte, je n'en changerais pas une minute. Ne serait-ce que parce que je m'y suis retrouvée.

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jeudi, décembre 25, 2014

Noël dans la Terre du Milieu

Ma mère est la troisième enfant d'une famille en comptant sept. C'est une femme qui aime Noël, pour ce que cela représente comme partage et chaleur humaine. À tous les ans, elle reçoit sa marmaille, autour de plats longs à manger qui stimulent les discussions et les échanges. Au cours des années, nous avons accueilli, parmi nous, plusieurs esseulés du Réveillon qui ont pimenté nos soirées de leur présence, souvent lumineuse.

Il y a quelques années, c'est un des frères de ma mère, celui qui la suit dans leur fratrie, qui nous à rejoint pour la soirée du Réveillon. Il s'était séparé, et la fête à laquelle il avait l'habitude d'assister avait lieu dans la famille qui n'était plus la sienne. Il y a des traditions comme ça, bien ancrées, qui finissent pas vous laisser seul le soir de Noël. Mais il avait saisi la main tendue de sa sœur, et nous avions tous trouvé que ça avait été la meilleure idée de l'année que de l'inviter partager cette soirée avec nous.

Cette année-là, ses enfants se sont sentis un peu moches, je crois, de l'avoir laisser seul dans la nuit du 24 décembre. Et peut-être aussi étaient-ils un peu tristounets d'avoir manqué un souper avec notre cellule à nous, puisque nous nous entendons tous particulièrement bien. L'année suivante, ils se sont joints à notre souper. Quelque part dans le temps, Noël a perdu ses repères, mais avant de laisser le sol s'évanouir sous nos pied nous avons, il semblerait, réinventé une tradition à notre sauce.

C'est une compagnie bien bruyante qui s'amène dans notre Terre du Milieu, la nuit de Noël. Une compagnie majoritairement masculine aux voix fortes et aux positions campées. Une compagnie qui fait et défait le monde à l'aune de l'actualité et des petits et grands travers de ses divers commettants. Les rires fusent de tous les côtés de la grande tablée où nous restons assis, le plus longtemps possible. Pour savourer les plats que nous préparons en collégialité et pour le plaisir, si simple et si gratifiant, d'être ensemble. Nous parlons fort, passant de diagonales en zigzags dans les fils que tissent les sujets qui nous amènent dans toutes les directions. Il est bien rare de nous en voir faire le tour, d'ailleurs. Ils finissent, pour la plupart, oubliés entre deux chaises.

On se dit souvent qu'on devrait se voir comme ça, plus qu'une fois l'an. Mais la vie a ses propres impondérables et, bien entendu, nous n'en faisons rien. Mais je crois que nous attendons tous le courriel de ma mère, un jour d'automne, qui nous confirmera que nous sommes, encore une fois invités, à partager avec elle la veille de Noël.

Je crois qu'aucun d'entre nous ne manquerait ce souper pour tout l'or du monde.

Et ça, à mon avis, c'est le plus précieux cadeau que nous puissions espérer des années qui s'achèvent.

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dimanche, décembre 21, 2014

Le jour le plus court

Il y a quelques temps, j'ai fait le portrait de ce garçon là. Je ne savais pas, à ce moment-là, que j'avais eu l'idée, un peu folle, de redevenir amie avec un espèce de canidé qui vit en meute et qui n'a de cesse de retrouver les enfants perdus qui ont, un jour, fait partie de sa meute à lui. L'air de rien, me voilà donc une enfant perdue qu'il ramène dans son bercail

Il m'a invitée à un souper de pré-Noël sans prétention. Au milieu de sa meute éclectique. Ils sont des loups, des coyotes, des ours ou des chiens de berger. Différents, mais semblables en même temps. Vous me direz que l'ours n'est pas dans la bonne liste, ou le chien, c'est selon. Cette meute est ainsi faite, je n'ai pu que l'observer. C'est une meute d'hommes avec beaucoup de femmes et de filles qu'ils y ont intégrées avec les années. Et si je ne les connais pas, elles, elles me semblaient aussi inhérentes l'ensemble, que les mecs dont je vais tracer ici le portrait.

Le loup est un charmeur, impénitent. Il l'a toujours été. Je le connais depuis presque aussi longtemps que là où me mène ma mémoire, qui est longue. J'ai de lui des souvenirs de petite enfance. Des souvenirs d'une espièglerie sans faille, de rires vrais et sans retenue. J'ai des réminiscences, plus rares, de discussions sérieuses, après une rupture qui l'avait laissé en porte-à-faux à l'orée de sa propre existence. Et je l'ai vu être totalement identique à lui-même avec ses filles qu'il couve d'un regard amène et sans jugement pour ce qu'elles sont, ou deviendront. Si vous lui confiez vos inquiétudes, il ne vous rassurera pas, que vous soyez son amoureuse, sa fille ou l'amie sortie de nulle part. Ce n'est pas son style. Mais il vous regardera de travers l'air de dire : « j'ai compris ». C'est suffisant pour beaucoup d'entre-nous, je crois.

Le chien de berger, m'a reconnue à la seconde où ses yeux se sont posés sur moi. Pas tant parce que nous avions un jour partagé quoi que ce soit, en réalité. Non je crois qu'il m'a reconnue parce que j'étais la fille à qui ce garçon-là parlait autrefois. Sans plus ni moins. Et aussi parce qu'il est, peut-être, le deuxième plus grand fan de Pierre Richard à ma connaissance, particulièrement en ce qui concerne le film « La chèvre ». Je les ai tellement vu rire ce film, lui et ce garçon-là, en se le racontant tant et tant. Je crois que c'était nettement plus drôle de les écouter en parler que de voir le film en tant que tel.

Le coyote, ben c'est un coyote. Il est sans doute le plus intelligent d'entre-nous, mais le plus rétif aussi. C'est dans sa nature, je crois. Il est sans conteste un peu plus sauvage que les autres. Mais, selon ce que j'ai pu en voir, il est au moins aussi fidèle que toutes les parties de cette meute. Sans quoi, il n'aurait pas été présent. Je me rappelle de jugements sans concession, de talents allant dans toutes les directions et de beaucoup d'autodérision.

L'ours, c'est celui que je connais le moins. Mais il a vite compris, hier, qui je suis. C'est celui qui m'a dit : « Tu écris, je crois », deux fois plutôt qu'une. Sentant, sans doute, que ça m'est important. C'est lui qui m'a ramenée dans les ornières qui me permettraient de retrouver mon chez-moi. Je suis une petite bête qui ne possède pas de permis de conduire, alors la voiture, c'est hors de question. J'ai donc besoin de la meute pour retrouver les wagons des métros qui me permettent d'arriver à bon port.

C'est une belle meute, avec laquelle j'ai eu la chance de partager le jour le plus court, ou presque, de l'année. Et je me compte chanceuse de ne pas m'être fait mordre parce que je serai toujours un félin qui taquine les canidés, ou les ursidés, à mes risques et périls.

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mercredi, décembre 17, 2014

Des nuits en dents de scie

Décembre est pour moi, et pour toutes les personnes qui travaillent dans le commerce de détail, la haute saison. Les journées sont longues et folles, les gens de plus en plus agressifs et impatients. Je reviens chez-moi vannée, le stress me tient éveillée pendant beaucoup trop longtemps, alors que tout ce dont j'ai réellement de besoin, c'est d'une bonne nuit de sommeil.

Depuis quelques jours, j'ai une raison de plus de mal dormir.

Le problème, quand tes nouveaux voisins du dessus sont de jeunes gens qui en sont à leur premier appartement, c'est qu'ils ne réalisent pas que le son voyage entre les murs et les étages des vieux logements montréalais. C'est un apprentissage que nous faisons tous, un jour. Dans la situation qui nous occupe, ils sont les seuls à en être à cette étape. Tous les autres locataires y sont depuis plusieurs années et connaissent la proximité impudique que notre bâtiment présuppose.

Il y a des gens qui disent que la fin de l'année est un tournant que plusieurs personnes ne prendront pas, comme si elles décidaient de s'éteindre à ce moment précis pour ne pas voir une nouvelle année se lever devant elles. Je crois aussi que certains couples se heurtent à cette charnière.

Actuellement, j'ai l'impression de vivre la fin d'une histoire d'amour en trois dimensions. Je préférerais en ignorer tout, particulièrement les détails. Ce n'est pas le cas.

Il y a des nuits, durant lesquelles, pour la faire chier, je crois, il sort sa basse à des heures indues et joue l'intro de smell like a teen spirit pendant ce qui me semble être des heures. Tandis que je l'entends, elle, crier par dessus la musique, des mots dont je ne saisis pas le sens, étouffés qu'ils sont par les lattes du parquet qui nous séparent. Je l'entends aussi marcher du talon et claquer toutes les portes de leur chez-soi. Ces nuits-là se terminent généralement du balcon à la rue. Elle pleure des larmes amères de son balcon et lui part pour une destination qui m'est, heureusement, inconnue. Je reconnais dans leurs voix les trop plein d'alcool, les drames sans fin que cela implique, aussi.

Ce n'est pas toujours le cas, cependant. Il y a les nuits de l'ultime pardon. Celui qui fait tanguer le lit, au dessus de ma tête, lui faisant rencontrer, avec violence, les murs de la bâtisse. Les cris sont alors différents, mais non moins présents. Toute seule dans le noir, je suis impuissante à retrouver mes songes. J'attends que ça passe.

Ça fait longtemps que je sais que les nuits de Ville-Marie ne sont pas de tout repos. Les nuits d'été et celles des changements de mois, le sont rarement. Mais-là, dans le cœur d'un mois de décembre enneigé, j'avais espéré, vainement semblerait-il, que je pourrais avoir une certaine paix. Pour mon sommeil, du moins.

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lundi, décembre 15, 2014

Prendre parti

Quand j'avais posé ma main sur la tienne, dans un geste aussi spontané qu'inusité, ça avait fait boum. Moi, la rétive, celle qui ne touche pas ou peu ses interlocuteurs, j'avais posé ma main sur la tienne parce que ta tristesse m'avait touchée. Et le malaise s'était glissé entre-nous, chargé d'un courant que je n'avais jamais su exister. Je ne t'avais jamais vu autrement que comme une vieille connaissance pour laquelle j'avais une sincère affection et je crois que c'était la même chose pour toi. Je n'étais pas disponible, tu l'étais encore moins. Je n'avais pas fini mon verre, j'étais partie sans te faire la bise, parce qu'elle aurait été une pente trop glissante, nous le savions tous les deux. Tu étais retourné à tes femmes, l'Officielle et toutes les autres qui jalonnaient le parcours de tes amours complexes.

J'étais rentrée chez-moi bouleversée. Pour y retrouver une relation qui s'étiolait depuis trop longtemps. Une relation que je n'avais pas eu la force de rompre plus tôt, parce que je ne suis pas si courageuse, au fond. Mais le geste banal que j'avais posé sur ta main, me criait à toute force que si je désirais être encore un peu intègre, je devais agir. Je l'avais fait. Pour moi. Pour pouvoir me regarder en face dans le miroir. J'avais déchiré le cœur de cet homme que j'avais un jour aimé et qui m'aimait encore. Il n'avait jamais compris pourquoi je l'avais quitté. Ses questions à ce sujet étaient lancinantes, même bien après qu'il eut rencontré une autre femme avec laquelle il avait eu des enfants.

J'avais passé les années suivantes à aimer à tors et de travers. Jamais les bons hommes. Jamais ceux avec lesquels j'aurais pu construire quelque chose. Des êtres aussi malmenés que je pouvais l'être. Le déséquilibre était total. J'avais écrit des tonnes de lettres longues et complexes à ces hommes qui n'y saisissaient, souvent, pas grand chose. Et je revenais à toi. Toujours. Dans ces épîtres sans fin que je te composais, pour essayer de comprendre le moment fugace de ces aveux muets qui avaient changé toute ma trajectoire. Des missives que je ne t'avais jamais fait parvenir. J'avais peur. Peur du rejet, de ton rejet. Même si je savais très bien que je n'avais absolument rien inventé de cet instant fragile. Je savais aussi que tu serais toujours un éternel infidèle. Être l'amie d'un tel homme, je le pouvais, mais être amoureuse de lui, ça aurait été trop me demander.

Puis tu avais posé un commentaire sur un de mes textes. Du genre caustique. Un commentaire qui était tout toi. J'avais esquissé un sourire un peu amer, mais je t'avais relancé. On s'était revus. Plusieurs fois. Tu n'avais pas d'Officielle, mais les officieuses étaient nombreuses. J'en étais désormais. Et je me surprenais, presque quotidiennement, à te dire ma fragilité. À être totalement honnête avec toi, même, non surtout, en te disant ce qui te concernait. Étrangement, mes aveux étaient sans larmes, sans besoin d'absolu.

Ça avait dû te plaire, puisque tu avais fini par jeter tes amarres dans mon univers. Laissant les autres femmes, quelque part, loin dans ton sillage. Tu draguais toujours autant, c'était ta nature, je crois. J'avais pris le parti de me dire que ce n'était pas des trahisons. J'avais pris le parti de me dire que la maison de tes bras, quand tu posais ton menton sur le dessus de ma tête en riant doucement, était le seul endroit où je pouvais être en sécurité.

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jeudi, décembre 11, 2014

La stratégie des surnoms

Je suis une femme un peu sèche dans les entournures. Je n'ai que peu, sinon pas du tout, de patience, avec les gens que je jugent sots. Et je suis plutôt transparente dans mes irritations. Quand on occupe un poste de gestion de personnel, ce genre de travers est une épine dans le pied. Le sachant, j'essaie, aussi bien que faire se peut, de me trouver des stratégies pour compenser mes défauts.

C'est ainsi que j'ai commencé par distribuer des morceaux de robots aux employés qui faisaient un bon coup. Comme la plupart des employés que j'encadre sont beaucoup plus jeunes que moi, j'ai dû expliquer la référence, trouver de vieilles images du Capitaine Cosmos, de Vermicelle et des robots, Math et Matique. Depuis le temps que je distribue les morceaux de robot, les employés se sont mis à les espérer. Souvent, ils me demandent, lorsque je les complimente : « C'est combien de morceaux de robot pour ça? »

Par ailleurs, j'ai une tendance toute naturelle à tenter de raccourcir les noms de tout un chacun. Des fois, je vais plus loin et je débaptise, purement et simplement les gens. Ainsi, j'ai travaillé avec un Simon que j'appelais Simon Templar (là encore, j'ai eu à expliquer le référent). La seule Haïtienne de mon équipe, a, à elle seule, un florilège de surnoms. Elle est parfois, ma bronzée, Beyoncé ou encore mon Petit-oiseau-des-mers-du-Sud. Tout dépend de mon humeur, ou de sa coiffure.

J'ai eu un Calinours, un Flash, un petit pigeonneau et une polkadot-girl. J'ai des JOJO, des Éli, des Steph, des Suzie, des Anna, des Belle, des Véro, des Ge, des Jen, des Gen, des Annouchka, des Alexandra-panawan (oui, je rallonge parfois), des Clo, des Marie (à la pelletée) des Jean (tout aussi à la pelleté). Et une Batman. J'ai beaucoup de chouettes aussi.

Et comme je débaptise tout le monde, le monde me débaptise aussi, allègrement. Ainsi je suis Alfred, Mathildette, Wikimathie, Mathie, Maître Jedi (ça, c'est quand je suis la formatrice), une biche, une Mathilde-contre-le-clan-des-Otori, Mathilde-Sunshine, c'est selon la personne qui s'adresse à moi.

Mais avec les garçons, j'ai un souci. Du moment ou ceux-ci se mettent à s'inquiéter pour pas grand chose, je les transforme en « p'tits loups ». Idem s'ils m'écrivent, ou me disent quelque chose qui me touche. Rien à faire, ils finissent tous par y passer. La plupart du temps, ils ne le savent pas; je garde ce petit nom pour moi toute seule. Mais quelquefois, ça m'échappe et je le dit, tout haut, dans leur face. Je ne sais pas pourquoi je fais cela. Surtout qu'il sont, généralement, beaucoup plus grands que moi.

Alors, je me dis que je devrais me garder une petite gêne avec cette expression. Parce que si je continue à semer les p'tits loups partout, c'est clair que je vais finir par me faire mordre.

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mardi, décembre 09, 2014

Soir de zinc

Il s'était assis au bar, comme il l'avait fait mille fois auparavant. Il s'était assis au bar après sept années d'absence. Comme si c'était la veille. Il n'était pas là pour elle, il l'était rarement de toute manière. Il était avec un ami, à se raconter une histoire d'amour qui ne se terminait pas si bien, comme c'était souvent le cas lorsque deux gars s'accoudaient à son zinc.

C'était un mec entêté, avec une intelligence vive et une rapidité dans la répartie qui la laissait souvent sur son quand-à-soi. Un peu chose d'avoir été vertement rabrouée ou relancée dans ses retranchements, faute d'arguments. Entre deux visites, elle se faisait un plaisir de fourbir ses armes. Allant lire sur des sujets qui, autrement, ne l'aurait pas du tout intéressée, simplement pour le plaisir de se prouver à elle-même qu'elle pouvait avoir le haut du pavé dans une discussion. Ce qui lui arrivait de plus en plus souvent, à la fin.

Puis il avait complètement cessé de fréquenter son zinc, sans qu'elle sache pourquoi. Elle supposait qu'il avait rencontré une femme ou qu'il avait déménagé. Elle ne savait pas et n'avait pas cherché à savoir non plus. Elle avait poursuivit son petit bonheur de chemin, rencontré des mecs intéressants, eu des amants. Elle avait aimé et avait été aimée en retour. La vie quoi.

Entre deux clients, Manu regardait Maxime et se demandait pourquoi, ce soir-là elle trouvait donc que son sourire en fossettes était charmant. Il s'agitait dans sa discussion de gars, riant trop fort, parfois. Haussant le ton pour prouver son point. Tant de choses qu'elle l'avait vu faire autrefois et qui l'irritaient profondément dans ce passé-là. Pour une raison obscure, ça ne l'irritait plus du tout.

L'ami avait quitté juste un peu avant que Manu ne termine son quart. Maxime était resté. Alors elle était allée le rejoindre de son côté du bar. Ils ne s'étaient pas dit grand chose, se contentant de s'observer sous un angle neuf, tous les deux. Elle avait fini par poser sa petite menotte sur la joue de Max, suivant la fossette de son pouce. Doucement. Il avait croqué dans sa main. Elle avait ri et l'avait embrassé.

Ils étaient partis ensemble, à la fermeture du bar. Croyant fermement que ce serait une soirée sans lendemain. Mais ils se trompaient. Parce qu'un enfant plus tard, ils se regardent toujours avec cette tendresse qu'on ne peu pas feindre, celle de deux personnes qui ont pris le temps d'avoir le temps de se recontrer.


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samedi, décembre 06, 2014

Des filles comme ça

Il y a des filles, qui n'ont rien demandé à personne, mais à qui des inconnus se donnent le droit de crier, gratuitement, qu'elles sont trop grosses ou trop maigres.

Il y a des filles qui se font dire qu'elles veulent du sexe parce qu'elles s'habillent de manière sexy ou suggestive. Des filles auxquelles on affirme que leur tenue est une obligation d'aller plus loin.

Il y a des filles qui se réveillent dans leur lit, où elles s'étaient sagement couchées toutes emmitouflées dans des pyjamas douillets, soudainement dénudées par un intrus qu'elles savaient présent, quelque part endormi dans un tas de manteaux qui traînaient sur le plancher et qu'elles avaient omis de mettre à la porte, par politesse. Des filles qui se sentiront souillées jusqu'à l'usure d'une telle expérience, mais qui n'auront jamais dénoncé parce que leur corps aura répondu aux caresses auxquelles elles n'avaient jamais sciemment acquiescé.

Il y a des filles qui se font amadouer par une personnalité publique, ou pas, et qui se retrouvent à donner beaucoup plus que ce qu'elles avaient prévu au départ. Des filles qui tentent de dire non et à qui le couperet du « Si tu m'as accompagné, c'est parce que tu veux ce que je veux » aura coupé les ailes.

Il y a des filles qui se terrent sous une apparence gonflée ou rectiligne pour ne plus avoir à dealer avec la séduction, mais qui ne l'admettront jamais, surtout pas à elles-mêmes.

Il y a des filles qui se taisent pour préserver l'amour, ou ce qu'elles croient être l'amour, même lorsque les coups de poings et les coups de gueule leur pleuvent dessus.

Encore pire, il y a des filles qui croient que si elles n'acceptent pas, on ne les aimera pas.

Il y a des filles qui disparaissent sur les autoroutes de ce pays et dont on ne parle pas, ou peu, parce qu'elles sont autochtones.

Il y a des filles, trop jeunes, qui se donnent à des quidams au nom de l'amour d'un autre. ̶ On est toujours trop jeune pour ça.

Il y a des filles dont le corps sert de terreau de colonisation dans tous les pays agités par les guerres qu'elles soient civiles ou territoriales. Ce n'est ni une nouveauté ni sur le point de s'arrêter.

Il y a des filles à qui l'on fait comprendre que si elles étaient un peu plus dans les canons de beauté, elles pourraient obtenir les promotions auxquelles elles aspirent.

Il y a des filles sur lesquelles on veut tirer parce qu'elles sont premières à atteindre le rang de première ministre.

Il y a des filles qui ont fini leur trajectoire de vie, il y a vingt-cinq ans, sous les balles d'un homme, simplement parce qu'elles étaient femmes et en voie de devenir ingénieures.

Ce jour-là, je m'en souviens, c'était la toute première fois où j'ai eu froid à l'âme.

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lundi, décembre 01, 2014

Juste un peu d'autodérision

Le problème en recommençant à écrire, c'est que ma tête devient beaucoup trop encombrée. Alors, forcément, j'oublie toutes sortes de choses. Quelle que soit l'importance desdites choses.

Je me fais penser à l'adolescente que j'ai été qui rêvassait durant ses cours et se demandait, furieuse, pourquoi elle devait étudier elle lorsque d'autres s'en passaient très bien. Il ne m'a jamais traversé l'esprit que si j'avais écouté durant mes cours, j'aurais peut-être pu sauver beaucoup de temps dans mes études. Ce bout-là, je l'ai assimilé à l'université.

Que je sois un peu tête de linotte et éparpillée n'est pas une nouveauté, ni le simple dommage collatéral de mon retour à l'écriture. Je peux dire, cependant que le fait que je passe le plus clair de mon temps à écrire dans ma tête en faisant autre chose, ne m'aide pas beaucoup à garder le focus dans ma vie au quotidien.

Au travail, il est de notoriété publique que je vais systématiquement embarrer mes clés dans le bureau duquel je sors. Une fois sur deux j'oublie mon téléphone ou mon lecteur de musique quand je quitte et je dois donc rebrousser chemin plusieurs fois par semaine. Mes clés y passent aussi, évidemment. Alors j'ai maintenant une liste à cocher, tous les jours pour être certaine que je pars avec tout ce dont j'ai besoin.

Depuis quelque jours, en plus, j'ai le rhume. Ajoutons le nez congestionné et la toux intempestive à l'étourderie naturelle, et ça donne quelque chose de plutôt catastrophique. Bien entendu, lorsque je suis allée à la pharmacie m'acheter du décongestionnant, j'ai acheté plein de trucs sauf le décongestionnant en question. Et si je me suis rendue à l'épicerie chercher du lait pour mon café matinal, c'est la seule chose que je n'ai pas pensé à mettre dans mon panier. Bon le lait et moi, c'est une histoire compliquée. Il est toujours beaucoup trop bien caché dans les épiceries et dépanneurs, alors à chaque fois que j'en ai besoin, j'oublie systématiquement d'en acheter lors de mon premier passage en ces lieux.

Mais samedi soir, je me suis un peu dépassée. Parce que j'ai bien regardé ma liste en partant et tout était parfaitement à sa place pour mon retour à la maison. C'est en sortant du métro, dans la gadoue de la rue Sainte-Catherine que j'ai réalisé que ce que j'avais oublié, cette fois-ci, c'était de mettre mes bottes.

Demain, on annonce un maximum de -10 oC.

J'espère que j'aurai ma leçon pour l'hiver.

J'en doute un peu...

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