jeudi, décembre 08, 2005

Apprendre à m'aimer

Ça faisait 3 jours qu’on se connaissait quand tu m’as lancé un « je t’aime » à la figure, comme une insulte que je n’attendais pas. Je t’ai rétorqué un regard courroucé et j’ai remballé mes affaires sans un mot. Tu me courrais après dans la maison, rieur, certain que c’était le trop plein d’émotion qui me donnait le goût de partir tandis que moi je n’avais que l’envie de te cracher à la figure. Muette de rage, je continuais à faire le tour du petit appartement pour être certaine de ne pas laisser derrière moi, une de ces petites traces qui fait qu’on y revient malgré soi; un acte manqué. Tu avais cessé de rire et tu me demandais de t’écouter, de te laisser me dire pourquoi tu étais désormais amoureux de moi pendant que je restais muette à tes suppliques qui te diminuaient à mes yeux. J’ai tenu mon bout et je suis partie. Loin de toi.

Quelques mois plus tard nous nous sommes croisés dans ce bar qui était ma piste de danse et ton salon de billard. J’avais pris la peine de choisir mes soirées en fonction de tes absences, je me tenais à distance. T’es venu me dire que je dansais bien, encore. Dans le bleu de tes yeux il y avait tellement d’admiration et de chaînes tout emmêlé que je n’avais que le goût de me sauver encore plus loin que les confins de mon appartement. Je reconnaissais ce signe pour l’avoir lu trop souvent dans des yeux des hommes qui m’avaient entourée. Un parfum de panique qui me ravalait les tripes. Une envie de me tordre dans mes vomissures internes. Et cette panique qui me collait au cul, sans me donner une seconde de relâche. Ta prunelle me devenait machiavélique tandis que tu me portais une attention qui se voulait tendre. Ce soir-là, je t’ai crié ma peur et mes craintes. Je t’ai dit que tu me salissais de cette accaparement constant dont je faisais l’objet dès que j’entrais dans le champ de ta vision. Je t’hurlais des horreurs sans nom puisque tu représentais à toi seul l’ensemble de mes angoisses les plus persistantes. Tu m’as laissé partir cette fois, avec de l’incompréhension peinte sur le visage.

Au bout d’un certain nombre d’années, tu t’es planté à côté de moi dans la pénombre et t’as allumé ma cigarette. T’avais changé, tu t’étais musclé et tes cheveux avaient perdu de leur blondeur. Je t’ai reconnu à la présence immense que tu dégageais ce qui pourtant différait du toi que j’avais connu. Ce ne pouvait pas être quelqu’un d’autre. Tu m’as souris et dans ce sourire-là il n’y avait pas d’entrave, pas d’envie démente de me posséder toute entière. Tu ne m’as pas posé de questions sur les hommes qui avaient traversé ma vie durant les années écoulées, ce qui m’a surprise. J’étais encore un peu sur la défensive. On s’est quitté en amis en se souhaitant un prochain hasard.

Le hasard s’est présenté ce soir. Je crois que j’ai su quand tu es rentré dans la place que nous allions repartir ensemble. Je me suis perdue quelque part entre toi et moi et je ne pouvais décemment me retrouver si je te laissais partir. Nous étions recroquevillés dans mes couvertures quand tu m’as affirmé « Sais-tu ce que j’aimerais que tu fasses pour que je puisse m’endormir? » J’ai hoché la tête négativement et tu m’as répondu : « j’ai envie que tu m’expliques la vie. »

C’est à cette minute-là que j’ai compris que malgré tout ce temps, tu avais appris à m’aimer.

5 Commentaires:

Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Je seconde.

2:26 a.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

J'en veux un come ça! ;-)

7:47 a.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Bande de groupies! :)

J'apprécie vous savez, sans doute plus que vous ne le croyez! Merci d'aimer ma plume et de me le répéter... La confiance en moi vous savez...

8:33 a.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Une des plus belle déclaration d'amour que j'ai pu lire. Merci.

10:03 a.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Cali : ce doit être parce que c'est celle que je rêve d'entendre.

10:27 a.m.  

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