Certains matins
Il y a des matins où tu te lèves et tu te dis : « faut que j’écrive ». Alors tu t’installes devant l’ordinateur et tu te creuses le cerveau à essayer de trouver l’idée, le filon. Ce qui ferait que ça marcherait. T’as mille textes en plan un peu partout sur le bureau de l’ordinateur; des textes qui parlent de toi, de politique, des autres, mais aucun ne fait ton affaire. Il y a des matins qui te garrochent la vie en pleine face et celle-ci te semble vide. Il y a des matins qui te font suer parce que tu te sens jalouse et en manque quand tu compares ton quotidien à la vie des gens qui te sont proches. Celles-ci vivent un amour neuf, celle-là est paisiblement installée dans une relation stable tandis que d’autres se complaisent dans ces histoires pas très claires qui ont le mérite d’être tendres. Pis toi t’es toute seule, trop forte pour être à deux, ou trop faible pour laisser voir que t’en aurais besoin.
Il y a des matins où tu te lèves avec l’impression d’être un imposteur. Imposteur de la plume. Parce qu’on t’auras dit dans les derniers jours que tu écris bien. On te l’aura trop dit pour ce que tu es capable d’accueillir. Tu diras à ton ami que tu lui emprunterais bien son arrogance, histoire de croire aux compliments. Tu te sentiras imposteur parce que même avec rien à dire, pas de sujet, le vide : que toi toute nue sur la page, tu sais très bien que tu seras capable d’aller chercher des gens avec tes mots. Et tu te dis que c’est trop facile et que ça ne devrait pas être ainsi. Il y a des matins qui te font enrager par ce que tu connais maintenant tes tabous et que tu sais que t’as pas le courage d’écrire sur eux. Tu te sens veule et inutile de porter cette douleur et ces histoires sans être capable de les écrire parce que tu as une trouille monstre des conséquences. Parce que tu as une trouille monstre de ce que le monde pourrait bien en penser. Parce que t’es pas capable d’assumer ce que tu ressens au plus profond de toi.
Il y a des matins lors desquels tu trouves absurde que d’autres te voient comme une personne qui a de la classe, de la prestance et qui a l’air intelligente. Alors que tu sais très bien qu’en réalité t’es rien qu’un petit bout de femme qui a fui une bonne partie de sa vie. Toujours vers l’avant sans savoir ce que à quoi tu aspirais à vivre, au bout du compte. Sans être capable de te regarder dans le blanc des yeux et de te dire ta vérité. En jouant la fille qui est toujours de bonne humeur, parce que c’est beaucoup moins compliqué ainsi et que tu espères encore que le rire t’attirera des considérations qui autrement t’échapperaient. Être légère comme une plume aux yeux des quidams qui t’entourent et encore plus aux yeux de ceux que tu aimes pour ne pas perdre le lien. Ne pas admettre que la lourdeur te draine et continuer à faire de l’esbroufe sur des estrades improvisées.
Il y a des matins qui te font réaliser que quoique tu fasses, tu vis encore avec la peur collée au cul. La peur d’être toute seule toute ta vie. Alors tu fais semblant que t’es bien comme ça, tu te dis que personne ne pourrait être amoureux de toi et tu refuses de faire un pas vers quelqu’un qui te donne un signe parce que tu sais plus si t’aurais la force de te relever d’une blessure de plus.
Il y a de ces matins où, comme toi peut-être, j'aurai davantage le goût de cracher ma bonne humeur au visage des autres plutôt que de leur en faire profiter.
Ouf!
Y'a des matins où tu torches des culs...
Heureusement, y'a des soirées où on voit les copines... :)
Ce texte m'émeut beaucoup. Il porte en lui une force qui donne espoir.
Mamathilde, je voulais te le dire… même si je ne trouve pas vraiment de mots qui puissent venir à sa suite.
Il est temps qu'on retourne faire un tour dans le boudoir boire une bière ou deux ou trois... Sauterelle a bien raison.
Benoît : il y a des moments où j'ai le goût de pouvoir répondre aux gens que je ne vais pas bien. Mais ça passe ben mal.
Sauterelle : Yes! Merci. Mais non, pas de je. Question de regard.
Obni : Alors je porte des chose dont j'ignore la présence.
J'ai tout entendu. Merci ;-)
M : Si tu veux. Mais la Sauterelle en question a bien fait sa job d'amie.
Stephy : Je ne sais pas si j'ai tant besoin d'être réconfortée. C'est un regard que je porte sur moi. Une certaine lucidité toute neuve qui fait du bien. Tu vois.
Les larmes me piquent le coin des yeux... C'est un très beau texte qui me parle beaucoup, pour ne pas dire qu'il me frappe de plein fouet!! Et je seconde Sauterelle et M en ajoutant ceci: jeudi!
B-7... Touché! (Désolé pour l'humour de bataille naval.)
Très beau texte...
Moi : Les larmes? Ouille. Merci.
François : C'était quoi, un sous-marin ou un porte-avion?