jeudi, février 02, 2006

Les enfants d'école

Je déambulais lentement dans la lumière tamisée, occupée que j’étais à contempler les dessins de l’exposition. Dans mon dos, on a dit : « bonsoir. » Comme un note qui monte tranquillement. Les oreilles aux aguets et le frisson d’anticipation qui sillonnait tranquillement mes vertèbres, je n’avais pas besoin de me retourner pour savoir exactement qui s’adressait à moi. Il y a de ces hommes que l’on ne connaît pas vraiment, mais qu’on a cristallisés quelque part dans notre inconscient parce qu’on les trouve beaux ou charmants. Celui-là je l’observais de loin depuis très longtemps. Je voyais tous les sourires à d’autres adressés, j’entendais son humour, ses coups de gueule et ses doléances assise dans l’ombre du demi étage qui séparait sa table de la mienne. Je savais bien qu’entre le mec que je côtoyais et celui que je transposais dans mon imagination, il y avait un monde. Mais je me plaisais à croire que j’étais un peu amoureuse de lui.

Je me rappelais ce party dans lequel on s’était retrouvés tous les deux, trop proches pour qu’il puisse m’ignorer. Timide je gardais les yeux baissés sur mon verre, comme si le contenu en était totalement captivant pendant que je me demandais si quelqu’un de ma connaissance était pour venir me sauver la mise. Je savais que mon attitude n’avait rien pour l’impressionner et que je partais d’un mauvais pied si je voulais qu’il me remarque. Je n’ai pas su. Simplement un moment donné je l’ai regardé directement, avec des yeux de biche affolée et je crois qu’il a compris. Rougissante je me suis levée et j’ai quitté la pièce. J’ai passé le reste de la soirée à l’éviter. Quelques années plus tard, je l’ai revu dans un autre party. Il m’a décroché ce sourire en coin qui me faisait tellement craquer adolescente. Il savait. J’en étais convaincue. Alors je me suis dit que je n’avais rien à perdre et je lui ai répondu. Nous nous sommes engagé dans une discussion à laquelle se sont joint beaucoup de participants. C’est devenu une joute entre moi et un autre mec pendant que l’Homme-au-sourire-charmeur comptait les points. Ce soir-là, j’ai gagné. La joute et son respect.

Quand j’ai entendu sa voix derrière moi, je n’avais pas besoin de me retourner pour savoir de qui il s’agissait. J’avais passé tant d’heures à écouter les modulations de sa voix qu’il me semblait la connaître par cœur. J’ai tout de même pivoté vers lui en disant : « Eh! Salut, qu’est-ce que tu fais ici? » « Pas grand-chose, en réalité. Je passais voir si tu serais-là. » Je suis restée coite quelques instants. Les yeux écarquillés, la tête vide. Un sourire s’est lentement étiré sur son visage tandis que je me sentais rougir. On s’est assis dans un coin et on a discutés à bâtons rompus comme si nous étions de vieux amis. La gêne restait palpable, de moi vers lui. Cependant, petit à petit, la décontraction prenait son espace et gagnait du terrain. Quand il s’est levé pour partir, son sac s’est éventré sur le plancher laissant voir de la littérature érotique et autres babioles du même acabit. Pendant qu’il refourguait tout, il marmonnait de manière désarticulée des histoires de Saint-Valentin qui approche. Je n’ai rien dit.

J’ai toujours trouvé les hommes particulièrement amusants dans ce genre de circonstances : rougissants comme des enfants d’école sous le regard d’une femme.

6 Commentaires:

Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Pour paraphraser un vieux groupe dance des années 90, "You're unbelievable !". À chaque fois tu réussis à me surprendre. Puis il y a cette ambiguité de ne pas connaître la frontière entre le réel et la fiction, pour moi, c'est encore plus troublant.

2:22 p.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

ma chère Mathilde, je trouve tous tes écrits incroyables!! tu sais toujours trouver des images qui nous font embarquer dans ton histoire... depuis que je te lis, je ne me lasse pas... tes écrits vont droit au coeur... Continue à écrire... Un jour, ce sera peut-être le coffret de tes romans que j'achèterais durant ma pose... n'arrête jamais, des fois ce que tu écris remonte le moral des personnes qui le lisent...

8:49 p.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Lp : *rire* Incroyable moi? Mais non! Je dirais que je suis une observatrice et que ça fait de moi une bonne conteuse. Quand à la frontière dont tu parles; c'est un tel plaisir de marcher dessus que je ne m'en prive pas.

Stéphanie : D'abord, bienvenue dans les commentaires. Je suis flattée et rougissante des commentaires que tu as laissés pleuvoir sur moi. Mais je trouve un peu énorme de me faire comparer à Anna Gavalda (parce que c'est le coffret que tu avais dans les mains cet après-midi, je me rappelle)

9:18 a.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

énorme... je ne crois pas... avec un peu de temps, tu vas voir que j'avais raison... Mais si tu le dits, je te laisse croire ce que tu veux... pour ma part je suis autant rendu accro à ses livres qu'à ton blog..

9:23 a.m.  
Blogger La Dame du Lac s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Hehehe! elle a raison, tu sais, Mathilde ^_-

10:31 p.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

*Mathilde est rougissante sous l'effet de vos compliments*

9:57 a.m.  

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