dimanche, août 27, 2006

La dentelle de ton regard...

Voici ma contribution pour le Coitus impromptus de la semaine. Les contraintes étaient que nous devions écrire une nouvelle dans le ton du polar et que le texte devait se terminer par la dentelle de ton regard illuminait le restaurant chinois.


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Je me tenais avec la policière derrière le miroir sans tain. L'équipe d'enquêteurs avait accepté que j'assiste à ce premier interrogatoire. C'était exceptionnel, je le savais. Mais je crois que Catherine Johnson avait compris que pour terminer ce cauchemar, je devais savoir. Plus que savoir, comprendre, ce qui s'était passé dans la tête de cet homme.

Lorsque je l'avais rencontré, quelques mois plus tôt, jamais je ne me serais doutée qu'il m'entraînerait dans une lente descente aux enfers. C'était un après-midi d'été et une amie nous avait présentés dans un restaurant où je l'avait aperçue dans la vitrine, en passant devant. Elle avait toujours eu l'habitude de fréquenter toute sorte de gens, plus étranges les uns que les autres. Celui-là me semblait plus équilibré que la moyenne, je n'ai donc pas usé de plus de prudence qu'il ne le fallait. Mon erreur, ma plus grande erreur, a été d'être gentille avec lui, comme je le suis d'ordinaire avec les gens que je rencontre. Je lui ai laissé mon numéro de téléphone, en toute bonne foi.

J'ai rapidement réalisé qu'il était un peu amoureux de moi, alors je lui ai dit que je ne l'étais pas. Avec le plus de tact possible. Je croyais sincèrement qu'il avait compris. Je ne me suis pas méfiée. C'est à ce moment qu'il s'est mis à m'envoyer des lettres bizarres. Qu'il venait déposer dans ma boîte à lettre. Des lettres manuscrites, tracées de son écriture difficile à déchiffrer. Dans lesquelles il me racontait tout ce que j'avais fait des journées espaçant nos rencontres. J'ai fait changer toutes les serrures de mon appartement et je lui ai dit que je ne voulais plus le voir. Dès lors, je me suis mise à le croiser partout. Jusque dans les spectacles que j'allais voir à l'extérieur de la ville. Et au lieu de regarder le show, ses yeux étaient continuellement fixés sur moi. Mes amies, ma famille me disaient de porter plainte. Mais j'hésitais. Je me disais que ça allait bien cesser.

Mais ça n'a été que pire. Dans les lettres que je ne voulais plus lire, il me disait qu'il me comprenait, qu'il me connaissait. J'en versais des larmes de rage. Il ne me connaissait pas. Il connaissait ce qu'il imaginait de moi. Pas la femme que j'étais. J'ai fini par demander à Simon de venir habiter avec moi. Il se payait ma gueule au départ, mais lorsqu'il a pris connaissance des lettres, de leurs détails hallucinants, il compris que c'était sérieux. Je ne sortais plus jamais sans lui. Il venait me chercher au travail tous les jours et s'il ne pouvait pas y être, c'était ma mère ou d'autres amis qui m'escortaient. Il va sans dire qu'à ce moment, j'avais porté plainte. C'est ainsi que j'ai fait la connaissance de Catherine Johson. Et de son collègue Claude Simard. Je crois, que Simard ne me prenait pas très au sérieux, au tout début. Mais quand il a été obligé de constater que quelqu'un réussissait à entrer par effraction chez moi, quelle que soit la fréquence avec laquelle je faisais changer les serrures, il a commencé à me croire. IL a eu droit à une interdiction de m'approcher à moins de 500 mètres.

Une nuit, je me suis réveillée et IL était dans ma chambre. Tranquillement assis à me raconter des histoires abracadabrantes sur la profondeur de notre amour. Simon était dans la chambre d'à côté et rien ne laissait présager qu'il s'était réveillé. J'ai fait semblant de continuer à dormir. Il est parti à l'aube. Me laissant transie de peur. J'ai réveillé Simon qui a contacté Jonhson. Les policiers sont venus avec l'équipe technique pour trouver des traces d'effraction et relever les empreintes. Ils l'ont arrêté sur les lieux de son travail, quelques heures plus tard. Et j'ai été eu droit de regarder l'interrogatoire.

Claude Simard me faisait dos et je voyait bien Sylvain. Il a commencé par les questions de routine sur ses activités de la nuit. Et Sylvain n'a pas nié. Il a simplement dit qu'il avait passé la nuit chez sa blonde. Je n'étais pas sa blonde, sauf dans son imaginaire tordu. J'ai failli tourner de l'oeil quand Simard a demandé à Sylvain pourquoi il pensait que j'étais sa conjointe. À ce moment il a fixé le miroir sans tain, comme s'il me voyait à travers et il a simplement, dit : « Parce que la dentelle de ton regard illuminait le restaurant chinois. »

6 Commentaires:

Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

(même commentaire que sur le Coïtus, j'ai des difficultés à en laisser ici ces derniers temps)

C'est ce qu'on appelle en psychiatrie un délire paranoïaque de type érotomaniaque. Très bien décrit d'ailleurs, ce pourrait être une histoire à raconter aux étudiants en médecine !

2:52 p.m.  
Blogger La Dame du Lac s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Oh!! J'adore, c'est super! ^o^

10:42 a.m.  
Blogger 3 Cornus s'est arrêté(e) pour réfléchir...

J'ai été en haleine tout le long... ouf quelle plume tu as ! :)

10:57 a.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

J'aimerais bien que tu m'expliques pourquoi il fallait que ce soit un fou qui prononce ces paroles si poétiques... cela dit, c'est excellent. Tu manies très bien ce style aussi. Quelle versatilité!

11:42 a.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

J'ai toujours autant les chocottes à lire cette histoire.

1:58 p.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Mélie, je t'ai répondu ailleurs ;)

Laurie : Merci bien.

Nadia : Bienvenue ici, et merci!

Alex : mais parce que le thème imposait un style polar!

Dda : hé hé!

10:30 a.m.  

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