vendredi, août 11, 2006

De matin en descente

C'était un matin de novembre. Un petit matin gris de ces aubes froides qui vous chavirent le coeur. Sur la table basse, gisaient les bouteilles de vin rappelant la soirée précédente. Et les cendrier trop pleins laissaient filtrer un parfum rassit et acre. Blottie sur le divan, j'avais la bouche pâteuse et les sens encore un peu engourdis. Je me rappelle encore de ta main sur mon front qui chassait les boucles rebelles et tes yeux de jais qui me tardaient de leur tendresse infinie. J'avais le coeur de travers, la gorge serrée cependant que mes yeux étaient secs.


Je me rappelle de la peur qui grandissait dans mes tripes. Je crois que je n'avais jamais laisser quiconque m'approcher d'aussi près. Jamais avant ce soir-là. Et je n'avais rien vu venir. Pourtant, la soirée avait commencée comme toutes les autres, parsemée de rires et de bonne entente. Pourtant, je croyais que j'étais en contrôle. Mais tu as posé tes doigts sur mon visage, dans un geste retenu et hésitant, comme si la chaleur de ma chair était un cristal fragile. Alors j'ai perdu pied. Il y avait dans le geste, quelque chose de tellement généreux que j'en perdais tous mes repères. Il y avait une promesse d'attente.

J'avais envie de hurler que tu me trahissais. J'avais envie de fuir jusqu'au bout de mes silences, sentant très bien tous les tiens m'y rejoindraient, quels que soient les recoins de moi-même où je tenterais de me terrer. Tu me disais que tu voudrais que je me trouve belle autant que je l'étais et je te traitais de menteur, en esprit. Ma mine renfrognée devait te dire tout ce que je taisais. Je sentais confusément que tu me comprenais et que mes réticences ne t'arrêteraient pas. J'avais sous les yeux une offrande généreuse et gratuite, que je ne savais que refuser.

Au creux de la nuit, quand je me suis effondrée de sommeil, tu caressais ma chevelure pour me protéger de mes démons intérieurs. Je te sentais là, je te savais là, et je me débattais contre l'engourdissement pour chasser cette main aimante que je ne savais accepter. J'étais en danger parce que tu me prenais telle que j'étais. Avec mes peurs et mes angoisses, avec toutes ces larmes qui ne coulaient plus. Avec ces blessures à peine voilées qui t'étaient transparentes.

C'était un matin de novembre, une de ces aubes mornes qui vous gèlent la moelle. Tu étais couché dans ce lit qui bouffait la plus grande partie de la pièce tandis que m'enfuyais loin de toi et de ta générosité. Je ne t'ai laissé ni adresse ni numéro de téléphone. On ne s'est plus jamais revu. Mais parfois, au moment où mes nuits tanguent, je me demande ce que je serais devenue, si j'avais eu le courage de t'aimer.

7 Commentaires:

Blogger Juli s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Paf...

2:00 p.m.  
Blogger La Souris (Marie-Ève Landry) s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Un autre qui torche!

8:55 p.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Belle écriture, j'aime bien!
Bize

10:33 p.m.  
Blogger Joss s'est arrêté(e) pour réfléchir...

On se le demande souvent "ce quis erait arrivé si..." On n'avait pas été si joliement jeune, si parfaitement immature, si stupidement idéaliste, si adorablement peureux...
J'en tremble encore...

9:08 a.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

très joli texte! merci!

9:29 a.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Juli : T'as besoin de glace?

La Souris : Merci bien!

Daniel : Bienvenue ici et merci.

Joss : On pourrait aller bien loin avec des si, mais le conditionnel n'a jamais mener à rien... Sauf, peut-être à nourrir mon imagination.

Denis L : :)

10:55 a.m.  
Blogger Pitounsky s'est arrêté(e) pour réfléchir...

J'étais en danger parce que tu me prenais telle que j'étais. Avec mes peurs et mes angoisses, avec toutes ces larmes qui ne coulaient plus. Avec ces blessures à peine voilées qui t'étaient transparentes.

3 des plus belles phrases que je n'ai jamais lues!

Magnifique, Mathilde.

10:03 p.m.  

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