Naître du deuil
Un des plus grands deuils
que j'ai eu à faire dans ma vie a été celui de la maternité. J'ai
toujours aimé les enfants, toujours aimé catiner, longtemps pensé
que je serais mère. Ce qui ne s'est pas avéré. Dans la vingtaine,
j'ai eu des amoureux stables, mais pas assez pour qu'on pense à
fonder une famille et depuis... Bien depuis, je suis célibataire. Et
ça fait longtemps que j'ai décidé que d'élever des enfants toute
seule n'était pas un défi que j'avais envie de relever.
Je ne juge pas celles qui
le font. Bien au contraire, je les admire profondément. Je n'ose
imaginer la quantité de patience, de calme et de renoncement
qu'elles possèdent pour y arriver. Ce ne sont pas là mes premières
qualité. La patience en particulier. Il m'a toujours semblé que si
je m'étais aventurée dans pareil projet toute seule, j'aurais passé
mon temps épuisée et colérique à faire passer mes humeurs sur le
dos de cette fictive progéniture.
D'ailleurs,
la plupart des mères célibataires que je connais ne l'étaient pas
quand elles ont eu leurs enfants. Pour la majorité d'entre-elles, il
y avait un projet de couple au départ qui s'est cependant étiolé
au cours du temps. Ce que je constate, par ailleurs c'est que mes
appréhensions à une maternité à temps complet en solitaire recèle
exactement les écueils qui m'y ont fait renoncer.
Tous
les jours, j'entends les mêmes de femmes exaspérées qui ne
paraissent pas être en mesure de s'adresser à leurs enfants qu'en
leur criant après. Je n'entends pas les textes, les murs ne sont pas
à ce point perméables, mais j'entends les intonations. Et quand on
les entends à chaque jour, on comprends que même les femmes les
plus patientes finissent pas s'épuiser à essayer de remplir toute
seules tous les rôles de la famille. C'est beaucoup trop pour une
seule personne, visiblement.
Je ne
pense sérieusement pas que j'y serais arrivée et je crois surtout
que si je l'avais fait ce n'aurait pas été pour les bonnes raisons.
Parce qu'au moment où je sentais que je devais me presser si je
voulais créer une famille, j'aurais voulu rencontre quelqu'un qui me
sauverait de mes dettes et qui prendrait soin de moi à ma place, par
conséquence, je n'étais absolument pas outillée pour prendre soin
de quelqu'un d'autre pour toute sa vie.
Je
crois que j'avais aussi assez peur du rejet pour ne pas avoir envie
d'essayer de rencontre quelqu'un. À la place, je me suis
reconstruite tranquillement. J'ai payé mes dettes, une à une avec
une patience que je ne me connaissais pas. Je suis devenue une
leader, je me suis reconnectée avec moi-même, j'ai recommencé à
écrire, à faire des casse-têtes et même, un peu, à colorier. Et
je suis devenue, enfin, l'adulte que j'ai toujours su que je pourrais
être, même si pendant longtemps, je crois, j'avais cesser d'y
croire.
Ce
qui me fait croire que de grands deuils peuvent créer de belles
naissances.
Libellés : Digressions
C’est tellement, tellement beau et fort et sage comme texte
Merci beaucoup, je suis contente que tu aimes :)