Papillonner
Une main se pose sur ma taille.
Papillon de nuit léger. Tout en douceur et en respect. Un navire de tendresse qui s’échoue sur mes courbes. Et les bruits du bar autour qui s’étouffent.
Une main se pose sur ma taille, moi qui ai arrêté de courir. Parce que j’ai enfin compris après quoi je m’épuisais. Je sais que je ne trouverai pas cela dans un bar. Ni dans les nuits trop courtes qui s’additionnent et se mêlent à des souvenirs de ces autres périodes de courses folles.
J’ai plus envie de courir après le regard qui me dira que je suis jolie malgré les rondeurs. J’ai plus envie de m’épuiser à chercher un nord que je ne rencontre jamais. Je n’ai plus envie de ces épistolaires relations qui m’accrochent le cœur et laissent mon corps errer dans les nuits de Montréal.
J’ai mal aux promesses non tenues qu’on m’a fait. J’ai mal à toutes mes amours écrapouties sur les murs du temps. J’ai mal à ma non confiance personnelle et professionnelle. J’ai mal à ma façon de faire le «i» lorsque quelqu’un tente de me serrer dans ses bras et que mes larmes se font tempêtes. J’ai mal à toute l’immensité de ma solitude. J’ai mal de ne plus savoir dire. J’ai mal de peur. Peur du mal. Peur du rejet. Peur d’être abandonnée. Peur de ne pas être à la hauteur. Peur de retourner au pays des zombies. Peur de ne plus jamais pouvoir écrire.
Je ne suis pas heureuse, coincée dans ma trop grande pauvreté. Mais incapable de faire les pas qu’il faudrait pour arriver ailleurs et me sortir du salaire minimum. Peur de déranger. Peur de ne pas être à ma place. Je me nivelle donc vers le bas. Je ne suis pas heureuse dans ma vie de femme qui n’est pas mère. J’ai toujours cru que j’aurais des enfants tôt et je suis toujours convaincue que je ne me serai pas pleinement réalisée tant que je ne serai pas maman. Cependant, je ne fais rien pour rencontrer un futur papa.
J’ai accroché mon cœur aux mots venus d’ailleurs et je laisse mon corps écumer Montréal. Je ne sais plus comment rallier les deux.
Une main se pose sur ma taille; toutes ces images se bousculent dans ma tête.
Je relève le sourire.
Ce soir, je rentre avec mon corps.
Ce texte est vraiment très beau Mathilde. Il me touche maintenant plus que jamais... Merci.
Très beau texte, en effet. Un de tes plus beaux.
Cou donc les filles, vous pétez la coche aujourd'hui!
Je ne veux pas m'approprier rien de ton texte. C'est rien, c'est... mais tu mets des mots sur... ÇA.
Touchant... tout simplement.
Ah, c'est très beau Mathilde!
"Ce soir, je rentre avec mon corps." Celle-là, c'est la plus belle et la plus touchante de toutes pour moi...Merci
Il reste peu à dire après tous les autres. Simplement ajouter que j'ai lu, et relu plusieurs fois.
Touchant...
Diffère drôlement de "Question de luxure"...!!
Très bon texte.
Tous ces commentaires pour moi?
Cath : comme tu connais tous les tenants et aboutissants de mes propos, c'est tout un compliment que tu me fait.
Robin : J'étais certaine que tu allais aimer celui-ci.
JP : il y a des papillons qui portent des chemises rouges
Pitounsky : merci, tout un compliment venant de la part de quelqu'un qui sait quel angle d'attaque prendre.
Lumières : très heureuse de te voir ici.
Daniel : me faire dire qu'un de mes textes mérites plusieurs lectures me fait drôlement chaud au coeur.
Souris : En effet, parce que je ne ressents plus aussi fort la question de luxure, justement.
Charles : tes silences sont plus silencieux que les miens.
Bravo Mathilde,
Moi, j'ai a réconcilier ma tête, mon cœur et mon corps, je suis encore à des lunes, bravo encore...
Le sourire que tu as relevé, comme une paire d'ailes qui se redéploient et te permettent de te délester de tes peurs et d'aller montrer tes belles couleurs là où on saura les apprécier.
Pis, les papillons dans le ventre, peut-être que ça finira par faire des bébés papillons ?
un bouquet de bravos pour ce texte
Homme du Néant : Je ne suis pas certaine de tout avoir réconcilé, mais j'essaie.
Maridan' : Je dois être un papillon. J'aime bien butiner et me prélasser sur l'odeur des fleurs.
JF : trop d'éloges, vraiment.