Conjuguer mes identités
« Es-tu prête à apprendre à te faire consoler?
Parce qu’il y a plein de monde autour de toi qui serait prêt à te le montrer, Mathilde. »
Il y a deux Mathilde en moi. L’une d’elle est fonceuse et très sûre d’elle-même. Elle est une Dame Secrète. Elle décide, se présente, va vers les hommes qui lui plaisent, annonce ses couleurs, demande sans détour des bras pour une nuit, et autre chose aussi. Elle part au matin, tête haute sans avoir laissé de morceau d’elle-même au passage. Un peu froide, un peu calculatrice, un peu aigrie par l’éphémère des relations sans réelle importance qui ont jalonné ses nuits.
L’autre Mathilde, a posé autour de son corps une série de barrières quasi infranchissables. Cette Mathilde-là on ne peut pas la toucher physiquement. On peut l’émouvoir, la charmer, la faire rire. Elle a une capacité d’écoute très grande, peut vous dire : « je t’aime » et trouver les mots justes pour calmer la peine. Jamais elle ne vous prendra spontanément dans ses bras ni ne se laissera prendre. Elle se braquera. Elle fait de gros efforts cependant. Si on lui demande, si on lui dit que c’est nécessaire elle pourra vous prodiguer un câlin maladroit, pas trop long. Mais il faut lui demander. Sinon, elle ne sait vraiment pas poser les gestes par elle-même.
J’aimerais bien arriver à conjuguer ces deux Mathilde à la même personne.
Et s’il n’y avait rien pour amortir ma chute?
Être assez forte pour savoir te montrer faible. Laisser les autres tendre les bras pour amortir ta chute. Faudra...
Tiens, la Mathilde que je "connais" n'est ni tout à fait l'une, ni tout à fait l'autre. Ah.
Autrement, "plein de monde" qui sait consoler, permettez-moi d'en douter. Les intentions et les actions, ça fait deux.
Et puis je ne crois pas qu'on apprenne à quelqu'un à se faire consoler. On le console, ou pas. Le chemin de la consolation ne se croise pas par magie, sauf exceptionnellement. Qui l'a emprunté et marché à fond se révèle un carrefour indéfectible de consolation. On ne parle pas là d'un simple frottage de bedaine. Enfin, tout ça ne se force pas...
Il faut accepter de souffrir et de tomber pour mieux pouvoir se reconstruire.
À trop vouloir se protéger, se refouler, on peut finir par imploser... et ça, ça fait beaucoup plus de dégâts qu'une larme de temps à autres.
La Souris
Jay : t'as bien raison. J'essaie d'apprendre. C'est difficile.
Maridan' : Sauterelle a dit qu'il y a plein de monde qui serait intéressé à me montrer à me laisser consoler, ce qui est différent.
Je repousse les gestes qui se veulent rassurants, je crie après ceux qui essaient de me prendre dans leurs bras. Je crois qu'il me reste suffisamment de candeur pour apprendre à me faire consoler. Apprendre à ployer le cou pour qu'une main puisse s'y poser. Dans mon cas, il y a quelque chose de très gestuel. En fait un manque de gestuel. Dans la théorie et dans les mots, tout va bien. C'est quand les gestes se joignent aux mots que ça ne fonctionne plus.
Et tu vois, je me sens très, seule, sur mon île. Je crois que je suis un peu tannée de cette solitude.
Souris : Tu nos commentaires se sont croisés dans la blogosphère. Tu as touché en plein la cible. C'est exactement cela. Apprendre à laisser parler la douleur pour chasser la douleur.
Mots pleins de sagesse que ceux de Jay et de La Souris.
Apprendre à recevoir... je crois que le véritable enjeu se situe plus à ce niveau...
Et comme je te le disais, ces patterns ont aussi une valeur de survie. Ils ont été mis en place, souvent inconsciemment, précisément pour cela. Et de ce fait même, ne peuvent pas être brusqués et balayées d'un coup sec.
Je dirais peut-être que la seule indication qu'il est temps de s'en débarrasser, de changer de mode, est ton envie profonde de le faire. Et tu y arriveras :-)
Pitounsky : C'est un apprentissage ardu. En fait, dans les gestes la question que je me pose c'est toujours jusqu'ou s'arrête ma bulle et où commence celle de l'autre? Je pense que je vis tous ces rapports avec la peur ma bulle soit écrasée.
Lumières : Oh merci d'y croire!
Brailler comme un veau, ça libère tant de larmes que le niveau de l'eau monte et on est obligé de quitté son île d'isolement.