mercredi, juin 15, 2005

Mercredi midi

Le thème de la semaine, pour le Coïtus impromptus, c'était Un mercredi midi à la taverne du coin. J'ai jamais beaucoup fréquenté les tavernes. Mais je me suis souvenue de la Taverne Michel, avec son Bienvenue au dames qui donne l'air d'être le nom de la place. Je me suis rappelé des midis ou l'on allait, clandestinement, y faire notre tour. L'histoire qui suit est à cheval entre la fiction et la réalité. Et, entre vous et moi, je ne sais pas moi-même où est la frontière.

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Elles sont cinq. Cinq à s’engouffrer dans la taverne en catimini. C’est assez drôle de les voir rentrer. Vérifier que personne ne les a vues pénétrer dans cette pièce trop enfumée. Joe et moi, on sait très bien qu’elles ne sont pas légales. Qu’elles n’ont pas l’âge pour fréquenter une taverne. Mais le mercredi midi, de toute manière y’a personne. Personne d’autre que Mousse qui a déjà la tristesse dans sa bière, Jack l’Irlandais qui n’a jamais parlé un traître mot de français, même s’il le comprend très bien, et Monsieur Bégin qui nous raconte ses vieilles histoires en dilapidant son chèque de pension de l’armée dans les machines de Loto, en espérant que personne ne s’en soit encore rendu compte.

J’attends toujours qu’elles soient passées avant de quitter ma fenêtre pour aller les rejoindre. En silence, dans mon coin. Il y a la grande brune au visage si parfait que c’en est presque difficile à croire. Il y a la petite blonde qui saute partout et qui rigole. La grande timide qui s’inquiète toujours de se faire prendre ou d’arriver en retard au prochain cours, il y a la fille à lunettes qui désamorce et fait rire. Et il y a la joueuse; celle que les autres suivent ici, celle qui passe l’heure à taper les balles sur la table de billard, inlassablement.

Elles sont quatre à venir regarder la joueuse taper ses balles depuis septembre. Tous les mercredis midis. Le mois de juin est avancé; Joe pis moi on sait qu’elles ne seront plus là très longtemps, la fin des classes sonnera la glas de leur chaleur dans notre antre. Plus de rires convulsifs en pointant du doigt la bancale pancarte Bienvenue aux dames qui n’a jamais été ôtée du fronton. Plus de secrets narrés tellement fort que tous les gars de la place les connaissent. Plus de soleil au milieu de la semaine.

Elles sont cinq. Elles vont nous manquer.

1 Commentaires:

Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Je sais pas pourquoi, j'imagine la taverne Mont-Royal, où j'avais terminé cette soirée, après le show de Porcupine Tree.

Ca m'écoeure les tavernes.

J'ai même été barman dans un taverne, pendant un temps. J'en ai entendu des histoires d'ex, des histoires de vols, d'accidents à l'usine, de fils perdus, de filles ingrates, de faillites, des fraudes, des souvenirs de jeunesses. J'en ai entendu!

4:10 p.m.  

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