vendredi, décembre 23, 2005

L'improbable caissière, seconde version

Dans la couverture du livre, on pouvait à peine déchiffrer les caractères compacts. À force de lectures et d’yeux qui s’y étaient mis, on a fini par comprendre qu’il était inscrit quelque chose du genre : pour la beauté des rencontres des derniers mois. Elle s’est tournée vers moi, abassourdie pour me dire : « Le monsieur, je ne le reconnaîtrais même pas ; ça me fait peur ». Pas peur de sa mémoire toute personnelle. Non, peur du fantasme qu’elle savait avoir fait jaillir dans cet esprit impromptu.

Il y a des filles comme cela : au premier regard, on croit qu’elles sont pour nous. Au premier sourire on se sent compris, au rire qui suit, on se sent beau. Mais ce n’est que de la foutaise puisque chacun de ces gestes ne sont posés que dans un souci tout professionnel d’effectuer ses tâches. Il y a des filles qui nous regardent par-dessus un comptoir et on a cette impression que la mer nous sépare d’elles en même temps que des ponts se tissent entre elles et nous. Quelquefois, on connaît leur prénom parce qu’il est affiché en lettres visible sur le pan d’une chemise. Mais la plupart du temps, on ne sait d’elles que leur voix et leurs yeux. Alors on s’invente des chimères.

Celle dont je parle plus haut est une de ces improbables caissières qui vous regardent dans le blanc de la rétine à toutes les fois ou vous passez la voir. Si vous habitez dans le quartier, vous la voyez quatre jours semaines. À chaque moment, elle vous fera un sourire à décrocher la Lune et vous aurez l’impression d’entrer dans son intimité, d’entrer dans ses amours. Pour cette raison, depuis quelques jours, elle se retrouve enfouie sous une masse de cadeaux tous plus imprévus les uns que les autres et me demande pourquoi les gens lui font ce coup-là.

Alors je lui réponds qu’elle est jolie, sympathique et intelligente et que ça lui procure un charme certain. Elle hausse les épaules pour me répondre que ce n’est que de la foutaise ce que j’avance, mais nous riions sous cape ensemble parce que nous savons à quel point je suis dans le vrai. Et elle me raconte pourquoi tout cela est impossible pendant que je ris dans ma barbe imaginaire. De tout manière elle n’y croit pas réellement. Elle m’a dit qu’on lui disait souvent qu’elle était belle mais que son subconscient ne le savait pas.

C’est ce jour-là que j’ai compris pourquoi elle me touchait à ce point : elle est l’âme de Roger que je ne croyais jamais rencontrer.

7 Commentaires:

Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Ouin tu me fais peur de plus en plus à chaque post.

1:55 a.m.  
Blogger La Dame du Lac s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Wow! ^_^ elle mène vraiment une vie de caissière intense ohohohoho!! Mais c'est vrai, elle a beaucoup de charme!

11:20 a.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Ouais.

Tu pourras dire que tu as donné envie à un gars de Québec de faire 3h de totomobile pour aller dans un Renaud-Bray de Montréal dans l'espoir de rencontrer une charmante caissière.

En tant que sexy-libraire, je connais l'effet que peuvent avoir un sourire charmeur et des yeux brillants sur un acheteur (dans mon cas, une acheteuse)de livre.

N'importe quoi...

7:35 p.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

C'est joli Mathilde... et tellement vrai. Elle sera honnoré c'est certain! ;)

7:36 p.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Pauvre cocotte! Mais, je comprends ces clients! Moi, je suis tombée dans le panneau la première soirée que j'ai travaillé avec elle! En passant, Mathilde, félicitations pour le poste de libraire!

11:57 a.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Oh mon Dieu!! Que répondre à ça? Je me suis dit que j'attendrais un petit peu avant de répondre, histoire de reprendre mes esprits et trouver quelque chose à dire devant tant de gentillesse, mais je n'ai toujours rien trouvé. Merci encore, ma Mathilde... et joyeux Noël à tous!!

7:59 p.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

TchendoH : Mais qu'est-ce que j'ai fait encore? J'ai pas mis de sang dans mon texte? C'est quoi qu'y est épeurant là-dedans?

Laurie : Aurais-tu préférer que je raconte une histoire avec toi? Tu pourrais être ma prochaine improbable caissière...

Jay : Voici un des meilleurs compliments que tu m'aies fait. Merci.

T'es généralement nono mais tu dis rarement vraiment n'importe quoi.

Jen : Oui elle est honorée. Merci. Pour le vrai ce n'est qu'une question d'observation. Attention, mes yeux voient tout le monde, même les libraires jeunesse.

Soleil : l'affaire c'est que les membres de la collection de clients de cette improbable caissière ont l'âge d'être son père, ou pire d'être le mien.

Petite rougeur ici pour les félicitaions... Mais j'apprécierais pouvoir l'annoncer à mes proches la prochaine fois avant que quelqu'un ne me vole mon punch sur mon blogue ok? ;-)

Moi : Souris et continues de me lire. C'est amplement suffisant.

7:58 a.m.  

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