jeudi, janvier 12, 2006

Un vaisseau de tendresse

Tu passais près de moi tandis que je sentais les fourmillements des non-dits diffuser leurs effets. Tu laissais ta main glisser vers ma croupe, je me sentais faiblir tout en conservant un regard serein pour sourire à ton innocence feinte. Tu me ne me disais rien dans le flot de mots qui jaillissait de ta bouche, mais j’entendais bien que tu ne me plaisais pas à sens unique. Tu m’as raconté ta santé, tes amours à distance, tes animaux de compagnie, tes préoccupations. Je t’ai laissé entendre quelques choses de moi. Dont tu ne te rappelais jamais, d’une fois à l’autre, alors les questions se répétaient sans cesse. Je souriais dans ma barbe imaginaire en te répondant. Le seul élément que je n’ai pas eu à répéter très souvent concernait l’étendue de mon célibat.

Quand tu m’as invitée, je savais où ça irait. Il y avait quelque chose de très clair dans le ton. Je savais qu’en acceptant, je te donnais mon corps en reddition avant même que tu ne l’aies effleuré. Je savais aussi qu’entre toi et moi ce serait cet instant-là et pas un autre. En entrant chez toi, j’ai eu l’impression d’entrer dans un film américain. Tu avais prévu des activités pour la soirée. Ce que je n’ai pas pu m’empêcher de trouver mignon. Et tu parlais. Jusqu’à faire déborder mes conduits auditifs. Tu me racontais tout en vrac. Surtout ce que je ne voulais pas savoir. Sur le rapport que tu entretenais avec les autres et le rapport que ces mêmes autres entretenaient avec moi. Dès que j’essayais de placer un mot, tu justifiais tout. Alors je me taisais.

Tu as fini par te coller contre ma chaleur, frigorifié que tu étais. Avec des gestes tendres tu as entouré mes membres de tes bras. Il y avait quelque chose de pudique dans la retenue. Nous savions pourtant que nous allions nous avancer dans l’impudeur. J’ai savouré le moment. Tu as posé tes lèvres sur la rondeur de mon ventre, et pour une fois, je ne me suis pas sentie grosse. Simplement femme. Tes doigts tremblaient et j’entendais ton cœur cogner sur les frêles parois de ton corps. Tu m’as embrassé avec urgence. Une urgence câline comme si tu me criais « aime-moi! » de tout ton être. Je n’ai rien dit. Seulement offert ce qui était-là. Je ne saurai jamais si je t’aurai présenté cette affection que tu cherchais si fort. Je n’aurai pu te donner que ce calme zen qui te mettait tout à l’envers.

J’ai ramassé mes trucs pendant que les heures du jour commençaient à se lever sur le cadran. La nuit était jeune, je savais que tu n’étais pas de ceux qui gardaient les femmes dans ton lit. Je t’ai regardé danser devant mes yeux, sans trop savoir quoi me dire, toi qui avais l’habitude de promettre un prochain rendez-vous aux femmes que tu voyais. Tu sentais que je n’attendais pas cette promesse.

Nous savions tous les deux que j’étais venue chercher un vaisseau de tendresse. Et que c’est exactement ce que j’avais trouvé.

5 Commentaires:

Blogger Cédric s'est arrêté(e) pour réfléchir...

bien venu bien dit bien fait ça fait du bien...un bien bel élan vers de jolies étincelles...

1:44 p.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Tes histoires sont vraiment parfaites pour un blog, pas trop longues pis elles font tjrs vivre de quoi de trippant!

6:26 p.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Caustique : Exactement. Mais c'était la tendresse que je voulais rendre.

Tchendoh : *sourire* C'est pas mal le but. Je suis allée à la grande école de Dan Rondeau qui m'a instruite sur les formats blogues. Et le sens du punch... Ça fait depuis que je sais écrire que j'essaie de le travailler.

10:05 a.m.  
Blogger Cédric s'est arrêté(e) pour réfléchir...

la tendresse, bien sûr, bien sûr...
c'est pour ça qu'on en redemande...
"tendresse: remplit les puits sans fond" (pseudo-flaubert)

11:10 a.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Merci bien d'en redemander. Étrangement, quand j'ai commencé à bloguer, je ne touchais pas beaucoup les hommes. Au contraire, ils me disaient que je faisais trop dans le journal, la description de ce moi trop collé à ma réalité et maintenant, j'ai un petit public de fidèles masculins. Merci de me lire, d'être là et de me laisser croire que je ne fais pas dans la littérature féminine.

1:27 p.m.  

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