jeudi, février 16, 2006

Vingt ans plus tard

Te souviens-tu ce qu’on se racontait pour essayer de comprendre les réactions sans bon sens qu’on provoquait au plus fort de l’adolescence? Te rappelle-tu de ces nuits blanches à parler de poules, de jambes et d’innocence, dans ces discussions sans queue ni tête que personne n’aurait pu comprendre? Conserve-tu la mémoire des larmes amères que nous avons versées sur la méchanceté dont nous nous sentions victimes? Te souviens-tu que j’apprenais tranquillement à courber l’échine sous tes câlins au lieu de rester droite comme la justice. Droite, rigide et froide?

Vingt ans plus tard, j’ai l’impression que rien n’a changé. Je suis toujours de celles qu’on juge sans les connaître. Je suis toujours de celles que l’on déteste, tout simplement. Je choque, je dérange et je suis de trop. Je me donne parfois l’impression d’être une hyperbole ambulante tellement je suis un zeste de trop pour tout et hautement improbable en réalité. On s’est demandé des milliers de fois ce qu’on pouvaient bien faire aux hommes pour qu’ils passent leur temps à nous fuir ou, au contraire, à nous coller aux basques en espérant que nous serions un jour quelqu’un que nous ne sauront jamais être. Des hommes qui se créent des espoirs sur la base d’un sourire, d’un mot, d’un rire ou d’un hochement de tête. Et tous les autres qui nous ont jetées sans même nous regarder parce que nous n’étions pas dans la bonne gang. Nous regardant de haut, nous traitant avec mesquinerie additionnée de mépris.

Je suis devenue le genre de femme à qui un inconnu vient annoncer que j’ai l’air grosse dans ma tenue vestimentaire. Comme ça, sans autre raison que de vouloir me permettre de m’améliorer. Et moi je croule à chaque fois sous l’insulte parce que j’en vis toute l’ignominie. J’ai toujours une langue acérée, t’inquiète, mais tu n’es plus là pour jouer aux insultes avec moi afin que je me défoule. J’ai beau essayer, je me laisse atteindre. Et je fuis les relations viables parce que je n’y crois pas. Si un homme me disait qu’il me trouvait jolie, sans doute que je lui éclaterais de rire au visage tellement je n’arriverais pas imaginer qu’il puisse être sincère. Si une femme me dit qu’elle me trouve jolie, je pense toujours qu’elle me prend en pitié.

Forcément, quand on me dit qu’on m’aime, j’ai l’impression que des mains serrent mon cou. J’ai cette sensation qu’on cherche à m’emprisonner et à couper mes ailes. J’ai l’impression que d’accepter un présent comme celui-là c’est ouvrir une boîte de Pandore. Alors je baisse les yeux et me tasse sur moi-même. Je me fais le plus minuscule possible pour qu’on m’oublie. Mais je fini toujours par m’insurger d’un commentaire, d’une réaction, d’un moment de vie à croiser mes oreilles. Et puis je me sens irrémédiablement seule.

La nuit, quand les matines devraient sonner, je me retrouve perdue dans un lit trop grand pour moi et tous les mots d’amour qui me dégoulinent des lèvres, comme des gouttes de sang que je ne peux crier.

9 Commentaires:

Blogger La Souris (Marie-Ève Landry) s'est arrêté(e) pour réfléchir...

...(lorsqu'on te dit qu'on t'aime) les mains serrant ton cou sont peut-être les tiennes.

4:39 p.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Y a quelque chose de triste dans cet écrit, de triste et de résigné. Dis, pourquoi ne pas y croire ? Pourquoi ?

5:13 p.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

La beauté d’une femme réside d’abord et avant tout dans ses rondeurs. Bien sûr, certaines plus que d’autres. Mais de belles pommettes soyeuses ou de magnifiques hanches qui laissent voir toute la capacité d’une maternité valent tout autant qu’un galbe saillant. Les hommes qui ne le voient pas ainsi n’en valent tout simplement pas la peine. Et en plus d’être d’une sensualité et d’une grande beauté, ton sourire et la prunelle de tes yeux font le reste de ton charme qui fait craquer tout un chacun.

Même si mon regard n’est qu’esthétique, j’ai toujours eu du flair pour le beau. Et puis, le charme, c’est une combinaison de l’enveloppe et de son contenu. Dois-je en ajouter…

9:40 a.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Souris : Non, je n'ai pas peur de mes propres mains. J'ai peur des amours étouffantes de ceux qui disent "je t'aime" pour s'attacher les êtres.

Lp : Tu me lis bien. Parce que je n'y arrive plus. C'est tout.

Alex : Oh! Wow! Je te le dit moi qu'un ami gay est essentiel à la vie d'une fille! En tout cas, toi tu m'es essentiel.

10:46 a.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Miche : Tu crois? Bien sûr que ça joue voyons!

10:47 a.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Décidément, on a VRAIMENT besoin de se jaser autour d'un café.

12:54 p.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Benoît : Hep! Faut que tu me crois quand j'affirme pareilles choses!

8:55 a.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Comme je déteste ces gens qui viennent vous asséner des horreurs "Juste pour ton bien"....
pour mieux nous emprisonner dans le rôle de leur jouet.
Quels dégâts ils peuvent faire !

12:11 p.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Mamathilde, Matiti, la beauté peut s'enfuir devant un compliment. Déjà on rougit, c'est joli mais on peut aussi devenir mûr comme une tomate trop mûre, on peut se mettre à begayer, on peut trembler de tout son corps face à un je t'aime. Mais oui tout celà s'est lié à la famille, au vécu, à l'affect, rien n'empêche de changer. Je suis ma propre prison, à moi de me délivrer de moi!
Halou ça veut dire patate en népalais

11:07 a.m.  

Publier un commentaire

<< Retour sur le sentier