vendredi, mars 31, 2006

En écriture

J’ai toujours écrit. C’est, à ce jour, ma plus grande drogue. Je ne sais pas comment on vit sans écriture. Peu importait au fond que j’écrive bien ou pas. Il me fallait écrire. Je suis revenue vers le papier souvent, me pencher sur la feuille, me recroqueviller sur les mots. J’ai toujours pensé que je m’exprimais mieux par écrit que de toute autre façon. Je me blindais derrière cette certitude. Elle avait l’avantage de me permettre de fuir, sans trop en avoir l’air. Je suis couillonne. Si j’écris à quelqu’un ce que je ressens de négatif, cette personne ne peut pas me faire des gros yeux ou me parler fort. Je me donne donc l’illusion d’avoir un certain contrôle. Au fond de moi, je sais que je fuis. J’ai toujours tout affronté par écrit, pour me donner une distance. Pour me donner le sentiment d’être protégée. En me disant que je suis plus claire, plus calme, plus détachée de cette manière.

Écrire pour me raconter la vie de la manière dont j’aimerais qu’elle soit. Écrire pour sortir les maux qui me hantent et me narguent. Écrire. Au présent, au passé, au futur, à tous les temps mêlés, comme aujourd’hui. Parce que je ne peux pas me raconter seulement au passé. J’ai toujours écrit. Je me suis créé des personnages sans trop m’en apercevoir parce que je correspondais avec certaines personnes et que je lisais dans leurs mots ce que je voulais bien voir plutôt que ce que ces personnes étaient en réalité. Je me confortais dans mes fadaises en interprétant ce que je voulais bien y voir. Parce que je n’avais pas le langage de la gestuelle pour me ramener à l’ordre. Pas envie de voir. Pas envie de savoir. Je me suis meublé des châteaux dans les nuages et me suis retrouvée, plus souvent qu’à mon tour, seule dans les vents qui déchiraient mes images. Et je me mettais en colère. Sans me rendre à l’évidence que c’était de ma faute.

Écrire pour perdre du temps, écrire pour passer le temps. Écrire pour avoir l’air de faire quelque chose, pour me donner un style. Écrire parce qu’il le faut. Fondamentalement. J’ai tissé des mensonges pour vos yeux. Des petites histoires que ne sont pas les miennes. J’ai créé une Mathilde qui n’est pas tout à fait moi, plus grande que ce que la personne qui trace les lignes sur cette page ne l’est en réalité. J’ai donné l’impression d’être forte, drôle, sensible. J’ai dansé sur la ligne chevauchant la réalité et la fiction tant de fois que j’en arrive à ne plus trop savoir qui je suis. Je suis peut-être cette personne-là. J’en doute parfois.

Écrire à m’en fendre l’âme, à me déverser les veines. Écrire pour mieux taire mes silences. Ceux que je ne partage pas. Écrire pour monter un écran entre la femme qui a peur et le monde qui l’entoure. Écrire pour donner en pâture aux vautours des aventures croquantes qui ne me blesseront pas tant que cela. Écrire pour avoir le dernier mot. Pour que les hommes qui m’ont rejetée sachent que je suis une femme comme il s’en fait peu. Pour qu’ils mesurent la perte. Écrire pour admettre mes propres pertes, trop tard certes, mais admises au bout du compte. Écrire jusqu’au fond des mots.

Aujourd’hui, j’aurais eu envie de dire. De déjeuner tranquillement et de me raconter de vive voix. Alors, je suis venue ici, et j’ai écrit.

7 Commentaires:

Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Bon, je reviens te dire.... demain. Parce que là, c'est pas possible. Pas de mots ou trop bêtes.

3:14 p.m.  
Blogger Coyote inquiet s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blogue.

7:16 p.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

C,est un beau texte...

Coyoto inquieto

7:17 p.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

J'aime beaucoup : "Ecrire pour sortir les maux qui me hantent et me narguent" et encore "Écrire à m’en fendre l’âme, à me déverser les veines. Écrire pour mieux taire mes silences".

Tu dis que par tes écrits tu as créé une Mathilde qui ne correspond pas à la vraie, ni à celle que tu aimerais être. Mais, c'est pas grave. Elles sont toutes bien, ces Mathilde là. Que crains-tu ? de te perdre totalement ? Penses que tu es un diamant aux multiples facettes toutes plus lumineuses les unes que les autres.

Franchement, très très beau texte. Il n'est que l'illustration d'une belle personnalité.
Quand à dire ce que tu écris, ceci est une autre étape. Le moment n'est peut être pas encore venu. Patience, c'est pour bientôt.

4:59 a.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

C'est très beau ! Je crois qu'on écrit tous un peu ce qu'on est, ce qu'on voudrait être, ce qu'on aurait pu être, ça ne fait que traduire une personnalité. Et j'aime beaucoup les possibilités que l'écriture permet, comme le souligne bien dda.

8:08 a.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Dda : T'es pas obligée de tout commenter tu sais... Quoique j'aime beaucoup tes commentaires.

Coyote : Merci... Mais pourquoi t'as changé d'identité en cours de route.

Dda : Je dirais que c'est simplement ma relation à l'écriture et que la femme que je suis n'est pas qu'une femme de lettres.

Tubuaï : Voilà!

10:19 a.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Mais de rien ma Grande, le plaisir est pour moi ;-)

2:42 p.m.  

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