mardi, juin 06, 2006

Les lumières dans la plaine

Voici ma contribution pour le Coïtus impromptus de la semaine. La grande nouveauté c'est que j'en suis une des nouvelles administratrices. Mais bon, ça ne changera pas grand chose hein? Je vais simplement continuer à écrire des textes pour le plaisir de les écrire. Mais je saurais un peu à l'avance quels seront les thèmes.
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Je n’ai jamais vu les lumières sur la plaine. Je viens d’une vallée sinueuse qui s’étend tranquillement le long d’un fleuve portant des allures d’océan à bien des endroits. Dans mon environnement tout personnel, la géographie se conjugue en vallons et en accidents de terrain. Les Européens, me disent que mes montagnes n’en sont pas, qu’elles sont trop petites pour mériter un tel nom. Ceci étant dit, je suis fière de ma montagne, comme la plupart de mes concitoyens. En réalité, nous y tenons tellement que les édifices qui décorent l’île sur laquelle est juchée la ville ne doivent pas dépasser en hauteur, le sommet du Mont-Royal. Je connais l’horizon qui borde l’eau, le connais celui qui découpe le ciel de ses dents montagneuses, mais la plaine ne fait pas partie des attributs dont se pare volontiers cet espace territorial.

Dans cet immense pays par contre, il existe des plaines qui s’étendent à perte de vue sur trois provinces. On les appelle les Grandes Prairies. Je n’y ai jamais mis les pieds et pourtant j’ai une vague idée de leur visage puisque j’ai l’imagination aussi fertile que leurs terres. J’ai passé des heures dans les mots de Gabrielle Roy à voir s’étaler sous mes pieds les terres du Manitoba. J’ai vagabondé à l’ouest de mes possibles durant toutes les heures que j’ai mis à parcourir les aventures de Laura Ingall’s et de sa famille. J’ai suivi la route des lettres que des amis me faisaient parvenir lorsqu’ils décidaient de poucer jusqu’à l’autre bout du continent en quête de sensations fortes, ou peut-être, plus simplement, d’eux-mêmes.

Je n’ai jamais vu les lumières sur la plaine. J’en ai souvent rêvé. J’ai imaginé des centaines d’histoires dans des pays qui n’existent pas, portant des plaines immenses des champs de bataille héroïques de mes fadaises intérieures. J’ai vu des couchers de soleil irradier des lignes de fuite que mes yeux ne caresseront jamais. J’ai senti les brises des vents qui ont le temps de prendre leur allant avant de se jeter sur la peau des jeunes femmes qui attendent patiemment le retour de leurs hommes. J’ai fabriqué des calembredaines pleines de fées et de farfadets qui nourriraient la flore de leurs chants et de leurs charmes. Je me suis laissée emportée dans les légendes amérindiennes qui expliquent la nature et ses secrets aux enfants attentifs.

Je n’ai jamais vu les lumières dans la plaine, cependant, lorsque je ferme les yeux à l’heure ou le sommeil se lève, je la sens tout près de moi, vibrante et souriante.

6 Commentaires:

Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Très très joli texte Mathilde.

3:10 p.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Ce texte c'est du voyage pour moi, c'est penser comme les lointains cousins, c'est respirer le même air, regarder la Mer Méditerranée comme si elle n'était qu'une immense langue fluviale.

4:54 p.m.  
Blogger Arto Joe s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Ce thème imposé vous inspiré un très beau texte, de très belles images... du rêve pour vos lecteurs.
Bravo !

8:32 p.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

C'est dit, un jour je débarque sur les bords du Saint Laurent et je t'emmène avec moi découvrir ces lumières dans la plaine. Tiens toi prête. ;-))

1:48 a.m.  
Blogger La Souris (Marie-Ève Landry) s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Personne ne réussira à me convaincre que cette montagne est ordinaire, puisque c'est mon paradis.

Donnez-moi un million et ce n'est pas la république dominicaine que je visite, mais le Québec en entier.

6:55 a.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Andy : Merci beaucoup.

Obni : Je ressents souvent quelque chose de semblable en lisant tes textes sur tes bouts d'univers, que je n'ai jamais vus.

Arto Joe : Je ne me coletine pas aux thèmes qui ne m'inspirent pas. Mais merci quand même.

Dda : :)

Souris : Donc, nous sommes d'accord.

1:11 p.m.  

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