Une bien grande personne
Elle était assise dans la cuisine. C’était après le party de Noël et nous regardions les photos en groupe. Je ne la connaissais presque pas, elle faisait partie de la gang des libraires tandis que j’étais une caissière, tout en bas. Elle s’est exclamée, en voyant une photo d’elle : « Oh! Mais j’ai l’air de Bibi là-dessus (c’était un espèce d’extra-terrestre dans une émission de notre enfance aux cheveux crépus et aux immenses yeux verts)! » Je me suis mise à rigoler en me disant que cette fille me plaisait bien : j’ai toujours eu un faible pour les gens qui savent pratiquer l’autodérision.
C’est le type de fille qui vit souvent sur une lune bien à elle. Ne vous étonnez pas si vous lui adressez la parole et qu’elle ne vous répond pas : elle n’entend pas. Il faut alors attirer son attention de manière peu subtile et elle éclatera de rire en s’excusant de son attitude. Lorsque je suis montée à l’étage pour devenir une libraire multifonctionnelle, je me sentais dans de drôles de souliers. J’avais l’impression que je détonnerais beaucoup trop dans cette équipe de gens que je croyais si sérieux. J’avais bien peur de ne jamais pouvoir me faire une place parce qu’une Mathilde qui déplace de l’air et des niaiseries ne me semblait pas du tout cadrer avec l’atmosphère, en haut. Mais tout de suite, elle m’a pris la main pour que je me sente accueillie. Du haut de ses trois pommes, elle m’a montré que là aussi on savait rire. Je pensais sincèrement que personne ne pouvait rire davantage que moi. Je me suis largement trompée : elle y arrive.
Quelquefois, je me plais à l’imiter. Lorsqu’elle se plaint de la chaleur par exemple et qu’elle s’évente avec des objets imaginaires. Alors je lui décris sa cour imaginaire et la traite de Dame du Nil. Je la vois se plier en deux et devenir si petite que le comptoir de la librairie la cache complètement. Et je continue de plus belle jusqu’à ce que je voie les larmes couler sur ses joues. Et puis j’en rajoute, je l’imagine en robe d’été, avec des souliers à talons hauts, très fins, et des lunettes fumées. Je lui parle de ses cocktails imaginaires, des piscines hollywoodiennes sur lesquelles elle pourrait régner et d’autres fantaisies du même genre. Je l’observe s’écrouler de rire et je suis contente de travailler avec elle. C’est toujours plaisant d’avoir un si bon public.
Il y a d’autres fois lors desquelles nous avons des discussions de filles. Et elle m’écoute toute entière en laissant fuser de temps en temps une minuscule information sur elle-même. Je suis certaine que je vais finir par en savoir très long, à force de parler. Lorsque je suis devenue libraire, elle ne savait pas que j’écrivais ici. Un jour je lui ai montré L'intermède du libraire et depuis, elle me lit. À chaque nouveau portrait elle m’a dit : « Oh! Nous aussi on en veut un portrait! On aimerait beaucoup cela tu sais! » J’en ai pris note en me demandant comme je pourrais bien faire le tour d’une si petite femme qui est en fait une bien grande personne. Et je me suis dit que vous raconterais qu’elle est le rire de la librairie.
Ça fait des jours que j’y pense, parce que demain, c’est son anniversaire.
Haha! Beau portrait Mamathi! ^__^
Bon anniversaire Karine!! ^__^
Alors joyeux anniversaire à la Libraire/rit.
;-)
J'ai hâte de constater de visou, même si je n'en doute pas deux secondes!!! Bonne fête ma belle Karine!
Laurie : Merci beaucoup.
Intellexuelle : Voilà, t'as tout compris.
Juli : Je sens qu'on va rire comme des folles le mercredi soir, toutes les trois.
Anecdote pour compléter la petite histoire : elle était très contente quand je lui ai offert le texte sur papier : elle a rougit violement et s'est cachée derrière le Chef. Ça vallait de l'or.
C'est exactement le genre de cadeaux, de surprises que j'aime faire aux gens que j'aime. Ta Grande Dame de la librairie ne va pas oublier de si tôt.
PS : je viens de réaliser pour ton/votre avatar, Madame. Mazette !! Quel chic !