dimanche, mars 29, 2015

Bouillir

J'étais particulièrement en colère ce soir-là. En colère contre un garçon de ma connaissance qui m'avait fait savoir qu'il ne désirait plus me fréquenter, en colère contre un paquet d'autres choses aussi, qui n'allaient pas très bien dans ma vie.

Je ne saurai sans doute jamais ce que je pouvais bien dégager à ce moment précis, toujours est-il que j'ai rarement attiré autant de commentaires que ce soir-là.

C'était un soir d'impro, à l'époque où j'animais des matchs hebdomadairement. Ce qui faisait en sorte que je sois sortie de ma tanière malgré mon humeur massacrante. J'avais une entente avec un joueur : je lui trouvais trois mots par soir à glisser quelque part dans ses apparitions. Ce soir-là, j'avais sorti « ignifugé » de ma manche, par pur esprit de provocation, et parce que ma mauvaise foi légendaire, quand je suis de mauvais poil, avait évidemment pris le dessus. Le joueur en question avait, bien entendu, relevé, adéquatement, mon défi, me faisant rire et adoucissant au passage mes plumes hérissées.

Mais certains jours ne nous laissent pas de répit. Ainsi, à la fin du match, j'étais plantée près du bar pour demander je ne me rappelle plus trop quoi au barman (nous avions des consommations gratuites dans l'arrière scène), et là, un gars que je n'avais jamais vu de ma vie me dit : « Tu ne devrais pas t'habiller de même, t'as l'air grosse ». J'ai figé, et vu encore plus rouge qu'en début de soirée. Comme pour faire exprès, son commentaire est tombé dans un silence entre deux pièce musicales, enfin, c'est l'impression que j'en garde étant donné que tout le monde dans le secteur nous regardait.

J'ai serré le dents avant de me retourner et de lui demander :  « Est-ce que ça t'as fait du bien de me dire cela? » Et lui de me lancer quelque chose dans le genre qu'il me disait ça pour moi ou une autre ineptie dans le même genre. J'ai répété ma question et il s'est remis à patiner dans le même sens. J'ai fini par lui dire : « Ben, si ça ne t'as pas fait du bien de me le dire, pourquoi tu l'as fait? Moi, ça ne m'a pas fait plaisir de l'entendre et si tu me trouve laide, il y a sûrement au moins une fille ici que tu trouves de ton goût, alors au lieu de gaspiller ta salive avec moi, va donc lui dire à elle, qu'elle est jolie, si tu en as le courage ».

Je pense que c'est la seule fois de toute ma vie que j'ai dit les bonnes répliques au bon moment, au lieu de les penser deux heures plus tard quand elles n'auraient plus d'impact.

Je retournais tranquillement vers l'arrière scène, quand un gars que je ne connaissais pas davantage que le premier m'a attrapée par le bras et plaqué un baisé aussi vif que surprenant sur les lèvres. Je l'ai regardée, ébahie, il m'a sourit et est parti.

Je ne l'ai jamais revu.

Depuis ce temps là, je me dis qu'il doit y avoir quelque chose d'hormonal quand je boue, comme je bouillais ce soir-là. Sinon, comment pourrais-je m'expliquer qu'autant d'événements inattendus me soient arrivés en aussi peu de temps?

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