mercredi, mars 04, 2015

Princesse de paille

C'était une princesse de paille qui étalait la richesse de son père, bardé de brevets, comme d'autres portent leurs étendards. Elle n'avait rien de plus où de moins que la majorité du groupe, cependant, son nom de famille, à lui seul, lui assurait une certaine notoriété. Elle était toujours invitée partout, dans tous les partys dignes de ce nom.

Elle avait un an d'école, donc deux ans de vie, de moins que moi. Cela ne l'empêchait nullement de me traiter de haut parce que je n'avais pas l'heur d'être une personne populaire. Honnêtement, je ne crois pas que je m'en fichais, mais je me frayais un chemin qui m'appartenait. Et si la gang ne s'intéressait à moi que pour me dénigrer, j'en prenait mon parti parce que je savais pertinemment que certaines de ses parties, m'aimaient bien, pour ce que j'étais.

Je crois que j'ai toujours été une fille allumée, capable de répartie, apte à expliquer clairement, sinon cordialement, son point de vue sur des sujets allant dans toutes les directions. Sauf que je n'ai jamais été de celles qui pouvait monnayer les amitiés. Aujourd'hui, j'en suis fort aise. Adolescente, je trouvais cette situation passablement injuste.

Je ne me rappelle absolument plus comment il se fait qu'une fin de semaine, je me sois retrouvée dans une énorme fête d'école secondaire, chez-elle. Elle ne m'y avait probablement pas invitée. Mais on sait ce que c'est, une fête, relativement intime d'amis, quand les parents sont partis, lorsqu'on est encore à l'école secondaire, se transforme rapidement en quelque chose d'incontrôlable.

Ce dont je me souviens par contre, c'est que c'est moi qui suis allée à la pêche aux corps amortis dans la piscine intérieure du domicile. Personne, sauf moi et un gars dont je ne garde aucune autre mémoire que cette pêche miraculeuse, ne semblait s'apercevoir du danger qu'il y avait à laisser couler des adolescents trop embrumés par l'alcool ou les drogues dans cette étendue d'eau, dans laquelle on n'avait pas toujours pieds.

C'est moi qui ai fini par appeler la police. Je n'avais pas assez de bras, et encore moins d'arguments de fille plate, pour maîtriser la situation. Dire que ma réputation, en a pris pour son rhume, déjà qu'elle n'était pas particulièrement reluisante, n'a aucune commune mesure avec la réalité. Mais je persiste à croire que j'ai bien fait.

La semaine dernière, je l'ai recroisée, elle, sur la rue Ontario. Petite princesse de paille sur des talons beaucoup trop hauts pour le monde ordinaire. Elle qui avait été notre princesse à tous, me donnait l'impression de paraître trois fois mon âge.

Je me suis alors dit c'est un tribut que je suis heureuse de ne pas avoir à payer.

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2 Commentaires:

Blogger Unknown s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Heureusement qu'une mère ne sait pas tout ce qui se passe dans la vie decses enfants.

4:36 p.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Sans doute oui, mais n'oublie pas que le libellé est "sur la frontière du réel". Donc, ce n'est pas tout à fait vrai, cette histoire. Mais je ne te dirai pas ce qui ne l'est pas, c'est beaucoup plus amusant ainsi ;)

9:52 p.m.  

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