Un dimance à l'opéra
Pendant deux ou trois
ans, on s'était vues tous les jeudis de paie, ou presque. Petits
rendez-vous informels qui nous réunissaient dans les mêmes
endroits, histoire de nous changer les idées et de pelleter des
nuages, au passage. Quatre d'entre nous ayant partagé le même
appartement, un an. Nous sommes donc un groupe de six, aux liens
serrés, mais dont les mailles se sont plus ou moins relâchées,
durant les sept dernières années. Se voir, même en duo, tient des
douze travaux (d'Hercule, ou d'Astérix, selon vos préférences).
La semaine dernière, on
a réussi le tour de force de trouver un moment où nous étions
disponibles toutes les six. M'enfin cinq parmi les six pour aller
voir la dernière qui s'est lancée dans le vide pour revenir à ses
anciennes amours musicales.
Revenons en arrière;
j'ai fait la connaissance de toutes ces gens lorsque j'ai commencé à
travailler à la librairie. Aucunes d'entre elles dans les tous
premiers mois, mais elles en sont devenues les ancrages permanents.
Celles avec lesquelles le contact peut encore exister, même si j'ai
traversé du côté patronal, même si toutes les autres ont quitté
le milieu, depuis quelques temps déjà.
L'une d'entre-nous est
retourné aux études pour devenir thanatologue. Grande entreprise.
Elle qui avait entamé son collégial en chant classique, c'était
tout un changement sémantique de son orientation de vie, à quelques
années d’intervalle. Mais une fois installée dans sa nouvelle
profession, les étranges détours du destin l'ont remise sur le
chemin du chant classique, comme passe-temps, cette fois-ci.
Elle a déménagé dans
l'ouest de l'île, parce que pour son travail, c'était plus simple.
Posant ainsi ses assises dans un milieu qui est à des kilomètres
culturels et linguistiques de celui duquel elle provient. Elle se
cherchait des amis et s'est dans ses premières passions qu'elle les
y a trouvés. D'où le dimanche à l'opéra.
C'est ce qui a amené
les cinq autres à Pointe-Claire par un joli dimanche après-midi,
presque printanier. Nous avions toutes revêtues de beaux atours,
pour l'occasion. Et nous étions fort excitées dans la salle avant
le début du spectacle. On parcourait le programme dans tous les
sens, ravies de voir que notre amie y apparaissait, nommément, deux
fois.
Lorsque les lumières se
sont tamisées, le public, presque uniquement anglophone, s'est levé
d'un seul bloc, la main sur le cœur et a entamé le « Oh
Canada ». Nous, on est restées un peu saisies, puis on s'est
levées, en réalisant qu'on ne connaissait que la version « hockey »
de l'hymne national. Nous n'avons même pas vraiment essayé de le
chanter, trop prises que nous étions par le fou-rire...
Comme quoi il n'est pas
nécessaire d'aller bien loin de chez-soi pour vivre un vrai beau
choc culturel.
Libellés : Vie en communauté
Ah, ah! Imagine travailler à Pointe Claire!
Ben Kin! J'ai beaucoup penser à toi, ce dimanche-là, pour ces raisons-là, justement!