dimanche, avril 30, 2017

Pierre angulaire

En suivant le fil de mon texte de dimanche dernier, je relis Lucy-Maud et je retrouve une part de la jeune fille que j'ai été, celle qui s'animait si fort au contact du mot juste. Comme ses personnages me parlaient, particulièrement celui d'Émilie, parce qu'elle écrivait et se laissait guider par son inspiration, mais cette femme n'a pas été mon premier coup de foudre avec la beauté des images que les mots pouvaient produire.

En fait, mon tout premier coup de foudre littéraire, je le dois à Gilles Vigneault. Je ne suis plus certaine, dans quel ordre, mais ça été tour à tour une chanson bien précise et ses contes pour enfants. La chanson c'était J'ai pour toi un lac et les premiers contes étaient, évidemment, Les quatre saisons de Piquot, puisque c'est le premier à avoir paru. Nous l'avons tellement écouté à la maison et dans l'automobile, nous connaissions tous les histoires par cœur. Francis avait un faible pour le second opus, Des nouvelles d'Eva, il adorait l'histoire de Quasiment. Il doit encore être capable d'en citer de longs extraits avec exactement les même intonations que monsieur Vigneault.

Ce qui personnellement me fascinait, ce n'était pas tant la trame narrative que la manière dont chaque mot était posé. Il y avait de la magie dans cette maîtrise du verbe et de la verve. Toujours est-il que j'ai, par la suite, sur une très longue période de temps, entrepris d'écouter toutes les chansons du grand Gilles. En commençant par les deux ou trois que nous avions à la maison, sur un desquels se trouvait la chanson mentionné plus haut. Si au début, l'interprétation me causait quelques soucis, j'ai eu tôt fait de ne plus m'en soucier pour me concentrer sur la beauté des textes.

Sérieusement, je ne suis pas tout à fait certaine encore d'avoir entendu toutes ses chansons, je sais que je j'ai lu les contes et les poésies qui ont été publiés et qu'à tous les coups je pleure quelque part. Pas toujours sur la même image. Ça n'a pas vraiment d'importance de toute manière. L'important c'est qu'en poésie ou en prose, Gilles Vigneault m'a mise sur ma propre voie.

Le jour de Noël 2016, je suis allée voir Le goût d'un pays avec ma mère et deux de ses frères. J'aime Fred Pellerin, mais j'ai un vraiment gros faible pour Gilles Vigneault. Et à chacune de ses prises de parole, je me sentais vibrer aussi fort que l'adolescente que j'ai été vibrait en écoutant ses mots.

Et puis, tout de suite après avoir terminé mon texte, dimanche soir dernier, je l'ai vu à Tout le monde en parle. Je me suis encore une fois laissée happer par le personnage fantastique qu'il est. Et je me suis prise à penser qu'on a tendance à attendre la mort d'un homme pour le célébrer. J'ai eu envie de rompre cette tradition et de signifier à quel point sa présence dans l'univers artistique et social de notre coin du monde, a été une pierre angulaire dans le développement de la femme que je suis devenue.

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