Toucher juste
- Les équipes sont
mal fichues cette années, je trouve.
- Ouain, t'as raison,
c'est full pas égal.
- Il aurait fallut
qu'il soit dans l'autre équipe pour que ça aille de l'allure.
- Ben là, c'est d'la
faute à Pierre Lapointe, il avait juste à se retourner sur le bon
gars.
Je ne voulais pas
vraiment écouter, en fait pas du tout. Mais j'étais fascinée par
l'application des jeunes filles à détruire le banc de neige avec
leurs petites espadrilles légères dans la froidure de cette soirée
encre bien hivernale. Forcément, mes grandes oreilles traînaient
dans leur sillage. Évidemment, je ne comprenais pas grand chose à
leur sujet de discussion étant donné que je n'écoute pas La
voix, mais j'en sais au moins
assez au sujet de cette émission pour avoir compris qu'il
s'agissait-là du sujet de préoccupation principal.
Mais
une discussion d'ados n'est pas une discussion d'ado si elle ne passe
pas du coq à l'âne sans rime ni raison.
- Normal, tu ne chantes pas.
- T'es nouille, c'est pas ce que je veux dire.
- (sourire pas contrit pour deux sous)
- En tout cas, j'ai été surprise d'apprendre que Koriass était ami avec Isabelle Boulay.
De
mon poste auditif, je me demandais bien le lien qu'il pouvait y avoir
entre ces éléments. Mais bon, j'avais présumé que l'un ou l'autre
avait pu faire une apparition dans l'émission qui venait sans doute
de se terminer.
- Ben, il l'a pas dit juste tout à l'heure ?
- Pas Isabelle Boulay, les Sœurs Boulay, ce n'est pas la même chose pantoute franchement !
- Ah, je me mélange tout le temps... Faut dire que je n'écoute ni les unes ni l'autre.
- Les Sœurs Boulay c'est bon tu sauras, Isabelle Boulay c'est juste les vieilles madames qui écoutent ça.
La
dernière assertion étant faite en me pointant du menton, j'ai
doucement ri dans ma barbe imaginaire. Plus tôt dans la soirée,
j'avais eu cette discussion sur les tounes qui font brailler
permettent de faire sortir le méchant quand on est en peine d'amour
et Isabelle Boulay faisait partie des incontournables. Mais surtout,
j'avais admis que ma chevelure se teintait désormais assez de blanc
pour que ce soit visible à l’œil nu. La jeune fille avait, comme
qui dirait, touché juste.
C'était
la première fois de ma vie que je me faisais traiter de vieille.
Je
ne suis pas certaine d'avoir tant prisé cette nouvelle expérience.
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