lundi, novembre 27, 2006

Une petite égratignure

Il t'a accrochée par un sourire et des paroles. Comme si ses mots étaient une une clef bien précise pour atteindre tes émotions. Tu avais parfois l'impression qu'il savait avant toi, jusqu'où tu pouvais aller. Il te murmurait ton prénom comme un trésor oublié et tu te perdais dans le fil de ses pensées. Tu ne savais plus trop dans quel recoin les tiennes s'en étaient allées. Il te racontait ses rêves, tu les prenais comme tiens. Trop jeune encore pour faire la différence entre les espérances de l'Autre et celles qui t'étaient propres. Il te disait : « Mathilde. » Et tu entendais tout l'amour qu'il te portait. Il te disait : « T'es belle », et tu savais que tu étais la plus belle. Il ne voulait que toi, ne jurait que par toi. Mais t'avais pas encore fini de grandir, dans ton corps et dans ton coeur. Il fallait que tu te sauves, que tu t'armes un peu pour vivre avec autant d'amour. Autant d'amour que tu savais ne pas avoir mérité.

Tu l'as quitté en larmes, te lacérant les sentiments. Tu lui as dit que tu l'aimais trop pour vivre un couple avec lui.. Tu lui a dit que tu devais aller ailleurs, que tu avais besoin de prendre de l'expérience pour pouvoir vivre pleinement une relation aussi puissante que celle-ci. Tu lui a dit que tu l'aimais. Tu lui as demandé de sortir de ta vie. De s'en aller le plus loin possible. Tu l'as repoussé comme on repousse une menace, parce qu'au fond, c'est bien ce qu'il était. Tu t'es trouvée conne, stupide et méchante de le briser. Tu ne te comprenais même pas vraiment, alors, forcément, tu voyais bien pourquoi il ne te comprenait pas. T'as passé les mois suivants à caresser ta peine, comme une perle qui a besoin d'être polie. Tu la brandissais comme un étendard, un bouclier contre les amours à venir. Il y avait quelque part dans le monde, cet homme qui t'aimait.

C'est à ce moment que tu t'es mise à jouer les vampires. Passant d'un homme à l'autre pour en extraire la sève. Tu ne t'attachais pas. Tu ne t'attachais plus. Tu avais retenu la leçon : l'amour est une chaîne et tu avais soif de liberté. Puis t'as rencontré ce mec, pas plus sérieux que tu ne l'était. Et de folie en folie les mois se sont additionnés. Un jour vous vous êtes dit qu'à force de toujours être ensemble vous aviez fini par faire un couple. Tu ne sais même plus qui a parlé d'emménager, mais ça été fait et tu t'es retrouvée bien au chaud dans un cocon d'ouate confortable que tu ne peux pas appeler de l'amour. Parce que c'est simple et sans douleur. Parce que ce n'est pas comme cela que l'adolescente qui reste en toi percevait le sentiment amoureux. Il reste toujours ce vide de maux qui te laisse perplexe. Comme si l'amour devait absolument mener à la torture. Comme si sans la jalousie qui mine et menace, ce ne pouvait être un sentiment digne de ce nom.

Et puis un jour t'as ouvert ta boîte à lettre et il y avait un message de l'Homme qui sait te parler. De celui qui t'avais trouvée quand tu étais trop jeune pour t'engager. De celui qui te donne l'impression de te connaître par coeur, malgré les silences, malgré la distance. Une bombe sur papier qui t'a chaviré le coeur. Te remémorant les précipices des passions adolescentes. Et les lettres se sont multipliées, toujours plus intimes. Tu te sens sale parce que tu leur a répondu, tu les as encouragées. Tu as, de ce fait, trahi l'Homme qui partage ta vie. Et tu ne sais pas. Tu ne sais plus quoi faire ni comment le faire. Tu es prise entre deux hommes qui t'aiment. Entre deux hommes que tu aimes. À te demander bien inutilement lequel choisir. À te juger amèrement à l'aune de valeurs qui vont en contradiction absolue avec ce que tu vis présentement. À te taire surtout parce que tu trouves dégueulasse. Depuis tu vis avec le petit monstre de la culpabilité, bien lové sur ton coeur.

Aujourd'hui, tu te dis que c'est peut-être pas ça la vie, que c'est peut-être pas un choix entre ces hommes-là. Aujourd'hui, tu te dis que la vie, c'est peut-être te choisir toi, indépendamment de ce qu'eux disent ressentir pour toi.

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1 Commentaires:

Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Comme je te comprends... Comment s'est continué cette histoire?... Tu pourras peut-être m'éclairer sur le chemin à prendre...

d1amalia@netcourrier.com

3:05 p.m.  

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