jeudi, décembre 11, 2014

La stratégie des surnoms

Je suis une femme un peu sèche dans les entournures. Je n'ai que peu, sinon pas du tout, de patience, avec les gens que je jugent sots. Et je suis plutôt transparente dans mes irritations. Quand on occupe un poste de gestion de personnel, ce genre de travers est une épine dans le pied. Le sachant, j'essaie, aussi bien que faire se peut, de me trouver des stratégies pour compenser mes défauts.

C'est ainsi que j'ai commencé par distribuer des morceaux de robots aux employés qui faisaient un bon coup. Comme la plupart des employés que j'encadre sont beaucoup plus jeunes que moi, j'ai dû expliquer la référence, trouver de vieilles images du Capitaine Cosmos, de Vermicelle et des robots, Math et Matique. Depuis le temps que je distribue les morceaux de robot, les employés se sont mis à les espérer. Souvent, ils me demandent, lorsque je les complimente : « C'est combien de morceaux de robot pour ça? »

Par ailleurs, j'ai une tendance toute naturelle à tenter de raccourcir les noms de tout un chacun. Des fois, je vais plus loin et je débaptise, purement et simplement les gens. Ainsi, j'ai travaillé avec un Simon que j'appelais Simon Templar (là encore, j'ai eu à expliquer le référent). La seule Haïtienne de mon équipe, a, à elle seule, un florilège de surnoms. Elle est parfois, ma bronzée, Beyoncé ou encore mon Petit-oiseau-des-mers-du-Sud. Tout dépend de mon humeur, ou de sa coiffure.

J'ai eu un Calinours, un Flash, un petit pigeonneau et une polkadot-girl. J'ai des JOJO, des Éli, des Steph, des Suzie, des Anna, des Belle, des Véro, des Ge, des Jen, des Gen, des Annouchka, des Alexandra-panawan (oui, je rallonge parfois), des Clo, des Marie (à la pelletée) des Jean (tout aussi à la pelleté). Et une Batman. J'ai beaucoup de chouettes aussi.

Et comme je débaptise tout le monde, le monde me débaptise aussi, allègrement. Ainsi je suis Alfred, Mathildette, Wikimathie, Mathie, Maître Jedi (ça, c'est quand je suis la formatrice), une biche, une Mathilde-contre-le-clan-des-Otori, Mathilde-Sunshine, c'est selon la personne qui s'adresse à moi.

Mais avec les garçons, j'ai un souci. Du moment ou ceux-ci se mettent à s'inquiéter pour pas grand chose, je les transforme en « p'tits loups ». Idem s'ils m'écrivent, ou me disent quelque chose qui me touche. Rien à faire, ils finissent tous par y passer. La plupart du temps, ils ne le savent pas; je garde ce petit nom pour moi toute seule. Mais quelquefois, ça m'échappe et je le dit, tout haut, dans leur face. Je ne sais pas pourquoi je fais cela. Surtout qu'il sont, généralement, beaucoup plus grands que moi.

Alors, je me dis que je devrais me garder une petite gêne avec cette expression. Parce que si je continue à semer les p'tits loups partout, c'est clair que je vais finir par me faire mordre.

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