mardi, novembre 25, 2014

Première rencontre

J'ai été une enfant qui adorait jouer à la poupée. Ma sœur, en a d'ailleurs été passablement victime. Pauvre elle, avec les presque dix ans qui nous séparent, je me suis gâtée. Elle a été ma première poupée vivante. Et elle sentait si bon le bébé.

Après la naissance de ma sœur, ma mère a entrepris de devenir sage-femme. À une époque où cette profession était en marge de la légalité. Je me rappelle de discussions acrimonieuses, avec mes collègues de classe à l'école secondaire, sur la légalisation de la profession. J'ai toujours été assez articulée dans mes opinions et je ne me laissais pas abattre par les majorités écrasantes.

Quelquefois, ma mère recevait à la maison des groupes de rencontres post-natales. Un jour qu'il y en avait une chez-nous, j'ai avisé un cousin de ma mère que je voyais rarement, mais avec lequel j'avais beaucoup de plaisir à discuter. Lui et son amoureuse avaient l'air complètement dépassés par leur vie de nouveaux parents. Parce que je suis ce que je suis et que j'adore les bébés, je me suis permise, de lui demander si je pouvais prendre sa fille. Cette toute minuscule fillette qui avait, selon mon souvenir, 5 semaines, à l'époque. La petite personne en question avait (toujours selon mon souvenir qui peut être tout à fait imprécis puisqu'il remonte à 25 ans aujourd'hui), l'air particulièrement en colère. Les parents, hagards, m'ont dit oui.

J'ai pris la petite boule chaude qui hurlait à perdre haleine, même si sa couche était propre et son petit estomac bien gavé, je l'ai posée sur mon cœur et je suis allée m'asseoir avec elle. Ça ne faisait pas deux minutes qu'on était installées qu'elle s'était endormie. Je lui ai raconté toutes sortes d'histoires pendant son sommeil. J'avais un public conquis pour mes rêves éveillés. Mon imagination débordante était donc comblée.

Je ne sais pas combien de temps la petite a dormi sur mon cœur. Quelques heures, peut-être. Toujours est-il que ce n'était pas dans ses habitudes, semblerait-il, de dormir si longtemps. Le papa dépassé, à la fin de la réunion, m'a demandé comment j'avais fait. Et du haut de ma très grande naïveté d'adolescente de seize ans, je lui ai répondu : « Ben rien, je lui ai fais confiance, c'est tout ».

En fin de semaine, j'ai pris un café avec elle et une de ses cousines immédiates. Je lui ai raconté cette histoire, qu'elle a trouvé jolie. Ce sont elles qui m'ont tendu la main à travers les années. Je ne les connais pas beaucoup, elle ne me connaissent pas davantage. Mais je crois que nous partageons, en dehors d'une parenté éloignée, un intérêt pour l'humain. Nous avons donc transformé, à trois, un jour de novembre morne et gris en quelque chose qui peut s'approcher du vivant.

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2 Commentaires:

Blogger Unknown s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Je voudrais simplement dire j'aime.

11:30 a.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Maman : Et tu sais que tout ce qu'ai raconté ici, est simplement vrai. Sans aucune espèce de forme de travestissement, dont je suis, d'ordinaire, friande. C'est peut-être pour cette raison, fort simple, que tu aimes ce texte.

Mais, merci de me le dire.

11:08 p.m.  

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