Les petits retours du destin
J'ai récemment entendu
l'histoire, tout à fait banale, d'un homme qui, comme moi, avait été
malmené par ses pairs durant son enfance. Ou plutôt par un
personnage en particulier. Il m'a raconté cela en toute simplicité.
Nous nous sommes aperçus, en cours de discussion, que nous
connaissions plusieurs personnes en commun. Pas au même degré. Mes
amis étaient ses connaissances et inversement. Le monde est petit,
et avoir partagé une enfance aux deux extrémités d'Ahuntsic
semble l'avoir encore davantage rétréci.
Toujours est-il que je
connaissait le nom de la personne qui lui avait rendu l'enfance
difficile. Et je me demandais bien pourquoi est-ce que ce nom
résonnait pour moi. J'avais vaguement une image de ce personnage
dans ma tête, des images un peu floues avec un petit quelque chose
qui me tarabustait le fond de la cervelle. J'ai donc entrepris
d'ouvrir mes boîtes à souvenirs pour aller à la pige aux
informations qui m'échappaient. Tout le monde se demande toujours
pourquoi je persiste à déménager, fois après fois, ces boîtes de
paperasses emmêlées que je ne zieute pas très souvent. Je crois
que c'est tout bonnement parce que ma mémoire est faillible. Alors
je me repose sur les notes que j'ai jeté dans de vieux agendas
scolaires ou journaux (pas tout à fait intimes).
C'est finalement dans mon
album de finissants de secondaire cinq que j'ai trouvé ma réponse.
En lisant le message qui était attaché au nom de cette personne.
C'est moi qui l'ai écrit. Pas parce que le garçon en question était
mon ami. Non, c'était plutôt parce que personne ne s'était porté
volontaire pour écrire un descriptif pour lui. Il n'était pas le
seul dans cette situation, j'ai dû écrire une dizaine de messages
pour des gens que je ne connaissais pas, ou peu, en tant que membre
du comité de l'album de finissants. Ce que j'ai écrit pour ce
gars-là, n'était pas très gentil. Ni méchant. Mais il a fallut
que la professeur responsable de cette activité parascolaire
adoucisse mes angles, je m'en souviens très bien désormais.
J'ai trouvé ce hasard
amusant. Et je me suis mise à penser que nous ne sommes pas les deux
seules personnes de ma connaissance qui ont un jour été ostracisé
par quelqu'un qui était plus fort que soi. Socialement ou
physiquement. Ce que je constate, c'est que toutes les gens que je
connais ayant vécu ce type d'expérience sont des individus qui ont
mûris avec une belle sensibilité et beaucoup de compassion pour
autrui. Beaucoup d'entre-eux sont des gens qui ont une carrière qui
leur sied bien et ils sont, généralement, fort respectés par leur
entourage.
Des vilains eux, ceux qui
riaient, disaient des méchancetés et se plaisaient à piler sur les
têtes, je n'ai que peu d'échos. Quelques uns ont mal fini. La
plupart ont traversé le même genre de calvaire que ce qu'ils nous
ont fait endurer, un peu plus tard dans leur vie.
Alors je me dit qu'il n'a
certes pas été agréable de passer à travers ce genre
d'expérience, mais somme toutes, ça nous aura armé pour affronter
la vie. Et de nous permettre de savoir qu'après chaque échec, une
réussite est possible.
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