Je suis Charlie
Depuis quelques jours, je
réfléchis beaucoup à la religion. Tout a commencé parce que j'ai
entendu un reportage, sur une jeune femme qui est entrée en religion
il y a quelques années et qu'il s'avère que c'est quelqu'un que
j'ai croisé à quelques reprises dans ma vie. Mais surtout, c'est
une personne dont j'entendais parler, de temps à autres, puisqu'il
existait un lien d'amitié entre ses parents et les miens. Ça m'a
remuée, bien sûr, parce que la religion est la dernière réponse
que je me donnerais pour traverser mes propres extrêmes.
Sans doute parce que la
foi, en général est un sujet qui m'a toujours fascinée. L'histoire
et les religions. Les liens indissociables qu'il y a entre les deux.
J'ai étudié beaucoup de
religions dans mon cursus scolaire. Par intérêt. Parce que je
considère que d'étudier une religion, actuelle ou ancienne, éclaire
beaucoup sur les sociétés qu'on veut étudier. Les guerres
religieuses ont façonnées l'Histoire. Et la façonnent encore
aujourd'hui. Au nom de Dieu, les humains se sont lancés dans des
conquêtes, convaincus de leur bons droits parce que ce dieu, à
leurs yeux, était supérieur.
Ce qui est
particulièrement effrayant aujourd'hui, c'est qu'on a tiré à bout
portant sur la liberté de presse. On a voulu tuer la droit de dire
« je ne crois pas en ton dieu, qui est aussi celui de mes
ancêtres, et ton radicalisme ne m'arrêtera pas ». Parce qu'il
ne faut pas oublier que, juifs, chrétiens et musulmans partagent le
même dieu. En fait, seuls les prophètes diffèrent. Ça peut même
être plus subtil que l'assertion que j'ai faite plus haut, on peut
croire en ce dieu tout en refusant l’extrémisme. Tout en voulant,
à toute force, s'accorder le droit de rire, de se moquer de sa
propre foi, de celle d'autrui ou de l'absence de foi, ce qui existe
aussi.
Je crois que la
démocratie est directement visée et, par ce biais, l'éducation. Ce
qui est remis en cause, c'est la possibilité d'avoir un jugement
critique, sur quel que sujet que ce soit. Le droit de penser
différemment de son voisin. La seule solution, à mon sens, est de
respecter le point de vue de l'autre même s'il nous heurte, même si
ça sape certaines de nos valeurs. Exprimer son désaccord est une
chose, assassiner pour faire valoir son opinion en est une autre. Que
les cibles soient prédéterminées ou non, connues ou non. À mon
sens, nous vivons ici le même genre drame que celui de
Polytechnique : des gens ont été tués parce qu'ils étaient
ce qu'ils étaient, tout simplement. Et peut-être aussi parce qu'ils
avaient l’outrecuidance d'avoir des aspirations différentes de
celles de ceux qui les ont assassinés.
Ce qui m'attriste le
plus, c'est que je sais, pour l'avoir étudié, que nous occidentaux,
avons semé certaines des graines de ce qui nous arrive. Nous avons
pratiqué l'impérialisme radical, il n'y a pas si longtemps. Nous ne
sommes pas des anges, mais peu de gens le sont, de toute manière.
Nous ne sommes que des humains perclus de doutes, de peurs et de
travers plus ou moins grands. Nous cherchons tous des réponses à
notre présence consciente dans l'univers. Mais la violence, de tout
ordre, n'est jamais la bonne réponse à ces questions, je crois. Et
très honnêtement, je dirais que je verse moi-même dans ce travers
à mes heures, même si ma violence est plus verbale qu'autre chose.
N'empêche que, ce soir,
j'ai honte de toutes mes colères mal canalisées.
Alors même si je n'ai
jamais été fan de ce magazine, désormais, je suis Charlie.
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