dimanche, mai 17, 2015

Le buffet

Il y a des soirs de printemps comme ça qui se drapent de la première vraie humidité de l'année. On n'y est jamais tout à fait préparé, surtout après un hiver qui nous a pris à bras-le-corps en nous faisant presque croire qu'il s'était installé pour l'éternité. Et puis, brusquement, ça sent l'herbe tendre, la boue avec des effluves de moufettes. Sur les rues commerciales, les terrassent s'animent, la circulation piétonne devient ardue puisqu'il faut désormais louvoyer entre les groupes de passants arrêtés par une discussion animée.

C'est aussi le moment où les premier moustiques sortent de leur torpeur hivernale pour venir s'attaquer, voracement, aux pauvres humains qui ont le malheur de croiser leur route. Je ne sais pas ce que goûte mon propre sang, ce que je sais, par contre, c'est qu'il semble tout à fait prisé par les hordes de bestioles qui s'en abreuvent pour la survie de leur espèces. Aussi si loin que je me souviennent, j'ai toujours été un buffet à moustiques. Quels qu'ils soient. Enfant, lorsque je faisais des séjours en camps de vacances, je revenais à Montréal avec les oreilles en charpie et la nuque dans un état lamentable.

Dans les dernières années, je suis revenues de mes voyages dans le Sud, avec des marques rouges et peu seyantes, témoignages visibles de l'affection sincère que me portent ces petits vampires qui se nourrissent de mon sang. Pour rire, parce que franchement, il faut bien savoir rire de ces situations pas tout à fait agréable, je dis depuis des années que je suis une très efficace chasse-moustique pour les personnes qui m'accompagnent. Platement, il y a un peu de vrai dans cette boutade, parlez-en à n'importe qui ayant déjà souper dans un jardin en ma compagnie. Ces gens seront ravis d'avoir passer une belle soirée dans être incommodés par les piqûres et moi j'en ressortirai lardée de toute part. C'est immanquable. Même si je suis une grande utilisatrice des répulsifs à moustiques.

Je suis consciente depuis longtemps que j'ai un je ne sais quoi de très attrayant pour ces bêtes féroces. Sauf que je me fais quand même prendre à tous les ans. Je suis invariablement la proie naïve de ces premières soirées un peu humides que je ne vois pas arriver d'assez loin.

Il doit y avoir 12 maringouins de réveillés sur l'île de Montréal, mais bien évidemment, ils me trouvent tous du premier coup et s'abreuvent goulûment à ma source. Avec une prédilection évidente pour les endroits qui me sont les plus inaccessibles : entre mes omoplates, sous la plante des pieds ou autres locations qu'il est difficile d'atteindre en toute occasion.

Ne nous leurrons pas, j'aime le printemps, je l'adore même, c'est une saison qui me réjouit le cœur et l'esprit. Sauf que je me passerais bien volontiers des attaques intempestives des moustiques qui se régalent de ma chair. Mais je crois que c'est peine perdue. Il y a quelque chose chez-moi qui les attire irrémédiablement comme si j'étais un buffet à ciel ouvert.

Misère...

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