dimanche, mai 24, 2015

Mon histoire de chiens

Le premier ami que j'ai eu dans ma vie a été un gros labrador noir, nommé Caïd. Du moins, c'est ce que ma mère me dit, moi, je n'en ai aucun souvenir. Nous l'avons mis en adoption à la campagne parce qu'un gros chien comme lui, dans un petit appartement montréalais qui galopais après une minuscule fillette dans sa marchette, ça faisait un peu trop de bruit aux oreilles des propriétaires. Il semblerait que je n'avais pas du tout peur du chien, que c'est moi qui le réveillais à coup de pieds pour qu'il me courre après et que ces aventures éperdues se terminaient inévitablement en éclats de rire sans fin. Ça me ressemble assez, de rire sans arrêt, je veux dire.

On peut donc affirmer que j'ai débuté ma vie en très bonne relation avec les chiens. Ça a cessé brutalement, lorsqu'un ado de ma rue qui possédait un gros berger allemand a mis son chien à courir après moi, pour rire je crois, et que j'ai eu la peur de ma vie (je devais avoir cinq ou six ans à l'époque). Avec le recul je crois que le chien ne m'aurait pas fait de mal, que son maître et lui ne voyaient qu'un jeu à cette anecdote. Pas moi. Je me souviens avoir couru aussi vite que mes jambes pouvaient me porter, devançant le chien de peine et de misère (il devait me laisser une chance parce que c'est clair qu'il devait être beaucoup plus rapide que moi) et fermant la porte juste avant qu'il ne se jette dessus.

En tout cas, ça a été suffisant pour me faire haïr les gros chiens après cela et en développer une phobie. Comme n'importe quelle phobie, le fait que j'évite de croiser ces bêtes qui me faisaient peur, n'a fait qu'empirer les choses. Et ça a duré longtemps. Nous avons eu un chien à la maison après, un petit chien jappeur et fugueur, pas très gentil, que je n'aimais pas particulièrement. J'en suis venue à la conclusion que je n'aimais pas beaucoup les chiens. Point.

Quand j'ai pris sur moi de reconquérir l'espace de liberté que m'avait grugé la dépression, j'ai aussi décidé d'essayer de me rabibocher avec les gros chiens. Je me disais que si tant de gens les aiment, il n'y avait pas de raison pour que je m retrouve tétanisée sur un coin de rue parce que j'en croise un, un peu jeune et enjoué. La première chose que j'ai dû apprendre a été de ne pas me figer complètement dans leur environnement. Dur, dur. Ce genre de réflexe acquis, et cultivé, pendant des années ne cesse pas juste parce qu'on en a décidé ainsi. J'ai eu la chance de partager une cours avec des gens qui avaient un gros rottweiler paresseux, beaucoup plus gourmand que violent. Ça calme l'angoisse de la grosse bête. Depuis, je ne fuis plus les gros chiens, mais je ne les cherche pas non plus.

Et puis, ma sœur a adopté un chien. Un gros chien beige, tout mêlé dans son ascendance. Un gros chien jaune qui se prend pour un chien de poche et qui la suit pas-à-pas où qu'elle aille. De ce fait, il s'invite aux réceptions et autres fêtes, au grand plaisir de toute la famille, sauf de moi.

Lui c'est un charmeur qui le temps de me séduire, évitant de me lécher le visage et même de m'approcher. La dernière fois que je l'ai vu, je me suis surprise à le flatter, grande première depuis l'histoire de la frousse.

C'est donc, peut-être, ce que je me suis offert pour mon anniversaire, un autre jalon pour chasser de ma vie ces peurs qui immobilisent.

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