Le problème avec ma mémoire
Le problème quand on a
une mémoire comme la mienne, c'est qu'on se rappelle de tout. Même
des choses qu'on aimerait ignorer. En fait surtout des choses qu'on
aurait aimer oublier, du moins, lorsque c'est clairement à notre
désavantage.
J'ai une collection de
souvenirs cuisants en mémoire. Le genre de chose dont je me serais
bien passée. Le genre de truc que l'on ne raconte pas, parce que la
vedette c'est soi et que ça ne nous met pas vraiment en valeur. Nous
avons tous, je crois, ce genre de souvenirs, mais je ne sais pas
jusqu'à quel point la mémoire d'autrui se rend.
Cette souvenance de tout,
des détails de d'événements largement ancrés dans le passé, j'ai
longtemps cru que tout le monde l'avait. Et pendant très longtemps,
je fuyais toute personne ayant, un jour, appartenu à mon passé
parce que j'étais convaincue que les seules images qu'ils pouvaient
garder de moi était ces moments embarrassants pour moi. Même si je
ne me portais qu'une attention distraite aux maladresses des autres.
Comme si, je donnais le droit à tout de monde, sauf à moi de faire
des erreurs, ou d'être juste un peu plate.
Il y a un moment, même,
ou j'ai prétendu ne pas être moi, Ça c'est passé il y a
longtemps, j'étais encore à l'école primaire et la scène se
déroulait dans une bibliothèque municipale. J'ai refusé de
reconnaître qui j'étais devant un garçon avec lequel j'avais fait
ma maternelle et ma première année, je crois. Aujourd'hui, je ne
sais plus trop exactement je ne voulais pas lui parler, sinon que je
me souviens de m’être méchamment moquée d’une chemise qu'il
affectionnait particulièrement. Je m'étais en quelque sorte
convaincue que s'il voulait me parler, c'était pour me faire le
reproche de ma méchanceté antérieure. Il m'apparaissait impensable
que qui que ce soit puisse garder de bons souvenirs de moi.
Quand
j'ai débuté ce blogue, je ne savais pas que je plongerais
régulièrement dans mon passé, je ne savais pas non plus que ça
m'amènerait à revoir ou à reparler à diverses personnes avec
lesquelles je n'ai pas eu de contact pendant plusieurs années. Il y
a bien fallut que je me rende à l'évidence que de un ; je n'a pas
laissé que de mauvais souvenirs dans mon sillage et de deux; peu de
gens sont capables de creuser leur historique personnel aussi
facilement que je puis le faire.
Mais
voilà que parce que j'ai une faiblesse certaine pour la nostalgie,
je me suis mise à braser mes souvenirs. Ajoutons à cela que depuis
que je travaille près du secteur où j'ai grandi, le passé me
rattrape, c'est souvent le cas de le dire. Surtout que je n'ai
absolument pas changé de face depuis ma toute petite enfance, alors
il m'arrive régulièrement de me faire demander par des gens, qui ne
me disent absolument rien sur le coup, : «Est-ce que tu
t'appelles Mathilde? » Et ce sont eux qui mettent les pièces
du casse-tête en place, à savoir si je les ai croisé au primaire,
au secondaire ou au collégial
Alors,
aujourd'hui je me dis que s'il m'est parfois difficile de me dire, de
me décrire et de me surpasser sur ces pages, j'aurai au moins appris
que l'humanité a davantage de bons que de mauvais penchants et que
peu importe à quel point on peut être désagréable quelquefois
dans l'existence, il est bien rare que ce soient les seules mémoires
de soi qui traverseront le temps.
Comme
quoi, nous sommes collectivement beaucoup plus indulgents envers
autrui qu'envers sois.
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