L'heure du conte
Quand j'étais petite,
nous avions un tourne-disque Fisher Price dans la salle de
jeux, au sous-sol. Celui-ci était accompagné d'une jolie collection
de disques qui nous appartenait, à nous, les enfants. Quelques uns,
étaient des disques de musique, mais ce n'était pas ce qui nous
fascinait le plus, collectivement. Nous étions davantage des
amateurs d'histoires.
J'aimais beaucoup ces
livres-disques des histoires de Disney qui nous indiquaient quand
tourner la page au son de la fée Clochette. Cependant, je me suis
tannée du rituel, de toute manière, je connaissais les images et je
préférais faire des casses-tête en écoutant l'histoire. C'était
mon bruit de fond.
Je crois pouvoir
affirmer, que mes frères appréciaient ce bruitage également. L'un
en faisant des légos, l'autre en écoutant toutes oreilles dehors,
ou encore en dessinant. On connaissait des grands pans de ces disques
par cœur. Francis, en particulier. Je ne serais pas du tout surprise
qu'il soit encore capable de nous en citer des extraits sans faute.
Il avait un penchant certain pour un disque de Fanfreluche et un de
Nic et Pic. Comme il les a écouté! Repoussant l'aiguille des
dizaines de fois pour réentendre certains passages qu'il trouvait
plus drôles que les autres.
Et un jour, nous avons eu
les disques Les quatre saisons de Piquot
et Des nouvelles D'Éva.
Révélation. Trois enfants d'âges tout à fait divers, également
fascinés par les contes et surtout le conteur. Il y avait quelque
chose dans la manière don Gilles Vigneault posait sa voix et les
exclamations qui était tellement justes que nous de pouvions faire
autrement que de croire à l'histoire. Et malgré le fait que les
aventures se déroulaient ailleurs que dans notre rue, nous nous
sentions près des héros. Ce n'étaient pas des personnages
fantastiques, toutes leurs aventures se pouvaient et s'il y avait
toujours une fin heureuse, les mésaventures elles ressemblaient
beaucoup à ce que nous connaissions de la vie.
Je crois que j'ai
commencé ma carrière d'auteur en écoutant ces disques-là. Pas
tant que j'écrivais déjà à l'époque, à six ans, j'étais sans
doute un peu jeune pour me lancer dans l'écriture. Mais il est clair
que l'envie de raconter des histoire est née de là. Parce qu'il
s'agissait de petites histoires forts simples écrites et racontées
à hauteur d'enfant sans pour autant les prendre pour des idiots. Et
je savais bien que moi aussi je pouvais me raconter s'il y avait
quelqu'un pour m'écouter. Mes poupées en ont fait les frais, ma
sœur aussi, pauvre enfant!
J'ai découvert, beaucoup
plus tard, que monsieur Vigneault n'était pas qu'un conteur et qu'il
avait toute une œuvre musicale en plus. Adolescente, je me suis fait
un point d'honneur d'écouter, au moins une fois,
toutes les chansons qu'il avait fait. Et je me suis rendue à
l'évidence qu'en conte ou en chanson, il racontait toujours des
histoires. Et que c'est ce que j'aimais par dessus tout.
Encore aujourd'hui, je
m'aperçois que mes coups de cœur musicaux sont avant tout liées
aux textes que les musiques portent. Comme si les mots étaient pour
moi une musique plus forte que la mélodie.
Alors je vais continuer à
courir après la mienne, la phrase ou l'histoire parfaite qu'un jour,
peut-être, j'écrirai, celle qui me fera penser, que je suis
peut-être un peu musicienne, malgré tout.
Libellés : Digressions