Entre sorcellerie et galanterie
Ça fait bien longtemps
que je dis, pour rire, mais aussi parce que cela comporte un fond de
vérité, que j'ai un taux de popularité incroyable auprès des
garçonnets de 2 à 5 ans mettons. Mon visage rond, mes yeux rieurs,
ont un je-ne-sais-quoi d'éblouissant, pour eux. Encore aujourd'hui,
il n'est pas rare que ces petits garçons me fassent gaiement la
conversation lorsque je suis à la caisse, me montrant fièrement
l'achat du jour, Le grand voyage de monsieur caca
étant une des trouvailles qu'on me présente le plus régulièrement.
En
2002, j'habitais encore à Sherbrooke et je fréquentais très
régulièrement le cinéma. J'habitais presque immédiatement
au-dessus, les prix étudiants étaient de bons incitatifs, j'y
allais même assez régulièrement en pyjama, l'hiver, avec un grand
manteau, c'était assez discret, quoique..
Bref,
un jour, je suis allée voir la première représentation de Harry
Potter et la chambre des secrets.
À cette époque, la fièvre entourant le jeune sorcier battait son
plein, les livres n'étaient pas tous sortis, les films ajoutaient au
délire, bref tout le monde connaissait Harry Potter. C'est ainsi que
je me suis retrouvée assise dans une salle plus que bondée et que,
forcément, j'avais des voisins de tout bord tout côté. À ma
gauche, il y avait cette jeune femme et son fils. Il me semblait bien
jeune pour un film comme Harry Potter. Sa mère m'avait expliquer que
c'était son idole, qu'il ne parlait que de Harry tout le temps et
qu'ils lisaient les livres, le soir avant le dodo. Je lui avait
demandé son âge et il m'avait répondu très fièrement qu'il était
un grand de quatre ans. Devant son air sérieux, j'avais avancé un :
« Et tu n'auras pas peur? Moi j'ai peur des fois en écoutant
des films » et j'avais eu droit à un : « Ben si tu
as peur madame, je vais te protéger » J'avais souri dans le
noir, touchée par ces paroles chevaleresques.
Je
connaissais l'histoire, j'avais lu, plusieurs fois, le livre. Il n'y
avait donc rien-là pour me faire peur réellement. Mais je suis ce
que je suis et malgré le fait que je savait d'avance qu'il y avait
un énorme serpent qui jaillirait un moment donné, prise dans
l'histoire j'ai fait un espèce de méga saut en ne retenant pas un
cri de surprise. Mon jeune voisin semblait croire que c'était un cri
d'effroi parce qu'il s'était penché sur moi, me tapotant gentiment
le bras en me disant (pas vraiment à voix basse) : « t'inquiète
pas, madame, je suis-là ». J'avais gravement ravalé le fou
rire que je sentais monter en moi et je lui avait soufflé un
« merci », bien senti.
À
la fin de la représentation, j'avais renouvelé mes remerciements et
je lui avait dit que s'il était un sorcier, il serait certainement
un Gryffondor. Il avait levé vers moi un visage radieux et nos
chemins s'étaient séparés, pour toujours.
Depuis
que je suis revenue de voyage, j'ai entrepris de relire la série, en
anglais. Et cette histoire me trotte dans la tête depuis que j'ai
débuté le second volume.
C'était
il y a treize ans. Mon petit voisin doit être presqu'un homme
aujourd'hui. Je me demande s'il est devenu l'adulte qu'il promettait
d'être...
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