jeudi, avril 14, 2016

Des déchirures

Qu'est-ce qu'on peu dire à une jeune femme, de tout juste vingt ans, qui vit une immense peine d'amour? Une vraie de vraie, de celle qui laisse écroulé dans l'édredon sous lequel plus rien ne dépasse sinon peut-être le gros orteil que l'on s'empressera de cacher parce qu'il nous apparaît soudainement trop gigantesque pour nous appartenir.

Cette peine d'amour que peu de gens reconnaissent à cause de l'âge et du fait qu'il s'agit en réalité d'une histoire d'amitié. Et que ceci est censément moins important que cela, moins poignant, en tout cas.

Je n'en crois rien.

Quand on a passé le plus clair de son enfance ou de son adolescence à faire des messes basses de confidences sur tout, mais particulièrement sur rien d'important avec la même personne; quand on a bravé la grande porte de l'école secondaire avec cette fille-là en se sentant déjà un peu acceptée parce que l'autre était là, quand on s'est échangé des notes de manière tout à fait illégale pour se soutenir l'une l'autre dans l'ascension des années scolaires. Quand on s'est boudé, hurlé, chahuté et particulièrement pardonné tous les sujets, malgré le fait que certains d'entre eux aient eu la fâcheuse tendance à revenir poindre leur nez à chaque nouvel écueil, il en reste des traces pérennes, qu'on le veuille, ou non.

Et quand la vingtaine se pointe, que tout ce que l'on connaît porte de des effluves de cette amitié fleuve et que celle-ci s'étiole pour un paquet de raisons que l'on sait, sans pourtant les comprendre nécessairement, il n'y a devant nous que le vide.

Que reste-il alors de nos certitudes et de nos convictions? Qu'est-ce que nous avons dans notre bagage personnel pour se rassurer et de se convaincre que tout ira pour le mieux? Comment faire confiance aux personnes que l'on côtoie à cette heure charnière, en espérant que quelques unes d'entre elles pourront un jour porter le qualitatif d'ami malgré cette trop grande déchirure qui nous traverse le corps?

Ce n'est pas si simple.

Comment ne pas laisser la colère, le désabusement et une certaine forme de désespoir nous envahir? Qu'est-ce que nous avons comme assises à ces âges vulnérables pour continuer à foncer tête première pour se tailler une place dans l'existence sans l'ancrage très précis de cette première amitié qui nous était tout?

J'ai eu mon lot de peine d'amour, d'amitié ou de couple, j'en porte aujourd'hui les cicatrices qui me définissent et m'ont modelée au même titre que mes bons coups.

Mais je garde une affection toute particulière pour la Mathilde de vingt ans, qui se heurtait contre la vie et qui a un jour décidé de s'y lover plutôt que de continuer à la prendre à rebrousse poil, juste pour avoir l'impression de ressentir quelque chose.

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