Chapeau, Melon
Je dis souvent que ma
première amie a été ma cousine. Ce n'est pas tout à fait exact.
En réalité, mon premier ami était Caïd, le chien de mon père qui
vivait avec nous à ma naissance. Je n'en ai pas vraiment de
souvenirs, sinon des impressions et je sais que j'en ai parlé
longtemps après son départ pour la campagne parce qu'il ne cadrait
pas dans notre appartement au premier étage d'un duplex. Je me
souviens qu'il était mon ami et c'est le plus important.
Chez mes grand-parents
maternels, il y avait aussi un gros chien, une chienne en réalité,
qui s'appelait Cléo. Je crois qu'elle avait appartenu à un de mes
oncles, mais elle vivait toujours chez mes grand-parents quand
j'étais toute petite. Elle est morte, j'étais fort jeune, dans ma
tête, ça coïncide avec la mort de mon grand-père, d'ailleurs,
j'ai longtemps pensé que c'était son chien et qu'elle l'avait
accompagné dans une espèce de déménagement qui faisait en sorte
que je ne les reverrais plus jamais.
Dans tous les cas, je ne
me rappelle pas avoir été particulièrement triste de ces
disparitions que je ne comprenais pas vraiment. Bien heureuse
insouciance enfantine.
J'ai eu plusieurs animaux
de compagnie par la suite, souvent des animaux familiaux qui nous ont
tous quittés, un jour où l'autre. Leurs départs ne m'aura pas
touchée plus qu'il n'en faut. J'en étais venue à croire que
j'avais un certain problème d'attachement avec les bêtes. Je dois
avouer que je trouvais généralement que les gens exagéraient
largement leurs histoires de deuil d'animaux.
Jusqu'au jour où j'ai
emménagé dans l'appartement que j'habite actuellement. Il y avait
alors deux chats en résidence et l'un d'entre eux m'a adoptée.
Littéralement. Impossible de lui fermer ma porte, le jour comme la
nuit, il devenait intenable. Notre cohabitation se passait de la
façon suivante : il venait se faire flatter une minute ou deux,
ensuite il se couchait sur mon lit pendant que j'utilisais le divan,
idéalement sur mon oreiller pour y semer plein de poils longs. Il se
déplaçait vers le pied du lit quand j'allais me coucher, jusqu'à
ce que je sois endormie, alors il allait s'installer sur le divan
pour terminer sa nuit. Dès que je commençais à me réveiller, le
matin, je l'entendais sauter en bas du divan et je savais que je
n'avais pas beaucoup de temps avant d'aller le nourrir, sans quoi il
entonnait une sérénade à réveiller les morts.
J'ai pleuré ma vie quand
il a fallut l'euthanasier parce que ses reins avaient cessé de
fonctionner. Je l'ai cherché, vu, attendu, des semaines durant.
Aujourd'hui, c'est ma
sœur et son amoureux qui pleurent un animal qui les avait adopté.
Un gros chien blond, qui était, je dois le dire, un amour de chien.
Obéissant, gentil, drôle, mais un peu gourmand. Tellement drôle en
fait que j'ai écrit deux textes en me plaçant de son point de vue
parce que sa manière de nous regarder me laissait voir une telle
intelligence et un amour si inconditionnel pour ses humains que je ne
pouvais pas résister à la tentation de le décrire, de raconter cet
ami fidèle.
Ce soir, je ne peux que
dire : « chapeau, Melon, tu auras eu une belle vie de
chien, et surtout tu auras été un un super compagnon pour ceux qui
t'aimaient ».
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