dimanche, octobre 30, 2016

Entrées par effraction

Je me rappelle un retour de séjour dans les Laurentides, je devais avoir dix ou onze ans, parce que je dormais déjà dans la grande chambre du rez-de-chaussée, lors duquel on s'était aperçus que nous avions été dévalisés. Ce n'était pas la première fois qu'un tel événement se passait sur la rue, je savais que c'était arrivé un 24 décembre, quelques années plus tôt à l'autre bout de notre tronçon. Si je connaissais les victimes, rien de ce que me amies qui l'avaient vécu avaient pu me raconter ne m'avaient rendu la situation tangible.

Mais ce soir-là, dans la bise hivernale, je ressentais jusque dans mes os, un froid que n'avais jamais perçu jusqu'alors. À cette époque de ma vie, ma maison était le lieu par excellence de ma sécurité. Sauf que la porte du séjour était désormais branlante et il manquait des appareils électroniques ainsi que mon sac de couchage. Je n'avais alors pas compris pourquoi le sac de couchage avait disparu, dans ma très grande innocence. Mes bijoux de pacotilles eux, étaient restés bien à leur place, peut-être en fut-il autrement des bijoux de ma mère, je ne m'en rappelle plus.

Après les événements, il m'avait fallut plusieurs jours pour me remettre à dormir paisiblement. Beaucoup de bruits, parfaitement normaux, me faisaient sursauter une fois que le soir était tombé et on s'entend que la nuit gagne son pari sur le jour très longtemps dans les hivers québécois. Ça ne s'est cependant pas reproduit, pour nous à cette adresse-là. Alors, l'impression d'insécurité s'était graduellement amenuisée jusqu'à devenir le souvenir confus que je narre aujourd'hui.

Je vis dans un quartier haut en couleurs depuis plus de sept ans. Je sais qu'il est arrivé à plusieurs demeures du voisinage d'avoir des visites de dévaliseurs. Juste à la porte d'à côté d'ailleurs, c'est arrivé au moins deux fois en quelque chose comme cinq ans. Ces voisins ont fini par se faire installer un système d'alarme et mon colocataire et moi-même nous sommes toujours félicité d'en avoir un bien actif et largement identifié dans nos fenêtres, ça nous donnait l'impression que nous ne vivrions jamais rien du genre. Et payer un système d'alarme quand on habite au rez-de-chaussée d'un telle quartier, nous apparaissait une sage idée.

Grand bien nous fit de ne jamais avoir eu l'idée saugrenue de le faire désactiver. Cet après-midi quelqu'un a tenté de forcer l'entrée de l'appartement. Mais il s'est fait casser les oreilles par le bruit tonitruant du système. Je ne sais pas combien de temps ça sonne avant de s'arrêter de soi-même, mais ça n'a pas dû être très agréable pour les personnes qui étaient à domicile pendant qu'il se faisait aller les aigus.

Mis à part un penne endommagé, nous nous en tirons avec rien pantoute. Le système a rempli son office de faire déguerpir les intrus avant qu'ils ne puissent mettre un pied dans l'appartement. Ceci dit, je me sens exactement comme dans mon enfance quand j'étais fébrile à l'idée d'aller me coucher. Je sais que je vais avoir toutes les misères du monde à trouver le sommeil quand viendra l'heure de poser ma tête sur l'oreiller.

Je sais que je vais avoir l'envie très forte d'armer le système avant d'aller me coucher, juste pour me rassurer.

J'espère cependant que je ne laisserai pas ce genre de peur prendre le pas sur ma vie.

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