jeudi, novembre 03, 2016

Appelez-moi Alfred

Depuis mon changement professionnel ; je me lève à l'heure des poules. Correction, je me lève bien avant l'heure des poules, en fait j'arrive au travail avant qu'elles n'aient eu l'idée saugrenue d'ouvrir l’œil. Monter un magasin, c'est une job physique et ça implique qu'il nous faut êtres présents quand les électriciens commencent, c'est-à-dire 6h30. Je suis gâtée, mon quart lui, ne débute qu'à 7 heures.

Peu à peu, je fais la connaissance avec l'équipe qui se joindra à nous. Contrairement à la réalité du Carrefour Laval, l'équipe est très mixte, à la fois dans la direction et sur le plancher. Je ne sais pas vraiment si c'est une conséquence du fait que nous soyons sur l'île de Montréal ou plutôt que nous soyons davantage orienté en musique sauf que la différence est bel et bien là, je ne peux pas le nier. Je me sens un peu comme à l'époque ou j'intégrais tranquillement une ligue d'improvisation à Sherbrooke parce que beaucoup de gars, ça veut forcément dire beaucoup de taquins et mettons que je commence à avoir un aperçu du champ lexical de leurs niaiseries.

Cependant, me voilà confronté à une situation que je n'ai jamais vécue en 43 ans d'existence, je ne suis pas la seule Mathilde de la boîte. Qui plus est, nous sommes trois. Ça me laisse perplexe. Depuis douze ans que je travail pour l'entreprise, jamais je n'ai eu à utiliser autre chose que mon prénom pour m'identifier sur les lieux de mon travail. Bien entendu, avec le temps, j'ai vu passé ce prénom dans d'autres succursales, mais nous étions assez peu nombreuses pour être uniques en un lieu.

Ma première idée a été de me résoudre à utiliser continuellement mon nom de famille. Mais bon, ça fait long de dire à tous les coups Mathilde Cazelais. Six syllabes bien découpées. Comme je suis généralement appelée un peu partout plus souvent qu'à mon tour et que généralement, il faut que je réagisse au quart de tour, j'entrevoie déjà plein de petits pépins dans le quotidien. En riant, ce matin, j''ai dit à mes collègues : « dans ce cas, appeler moi Alfred » puisque c'était déjà un surnom avec lequel je vivais au Carrefour. Mais un de mes collègues s'appelle Frédéric, alors lui se retourne à tous les « Fred » qui fusent. Ça ne m'avance pas tellement.

Bon. Je suis souvent Mathie, mais les deux autres aussi. Crotte de bique. Je suis quelquefois Wiki-Mathie, Tatie-Mathie ou Mathildette, mais je trouve que ça aurait un drôle d'effet dans l'intercom du magasin, surtout si c'est pour aller régler un cas avec un client difficile, mettons que ça pourrait avoir une incidence sur l'impression de professionnalisme que je pourrais dégager.

Bref, pour la première fois de ma vie, j'ai un problème de dénomination. On va finir par s'adapter et trouver des stratégies, c'est comme rien.

N'empêche que, ça me fait tout drôle de me retrouver dans cette situation. Comme si ça m'obligeait à me regarder sous un angle que je n'avais jusqu'alors pas imaginée.

Les apprentissages émanent parfois d'endroits où on les attend le moins.

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