dimanche, février 26, 2017

Le prix d'un plaisir

Depuis mon transfert, les emprunts n'étaient plus permis, du moins, dans notre succursale. Parce que que seuls les employés ayant terminés leur probation peuvent emprunter et que dans la situation qui nous occupe, il était beaucoup plus simple de suspendre ce droit jusqu'à la fin des probations de tout un chacun. Et puis, la gestion des emprunts n'est pas si simple que ce que l'on pourrait croire.

D'abord, bon nombre d'entre eux, reviennent dans un état qui nous obligent à demander l'achat de l'objet. Ce qui provoque des situations malaisantes parce que cette dépense n’apparaît pas spontanément dans le budget d'un employé. Ça m'est d'ailleurs arrivé plus souvent qu'à mon tour, à l'époque où je sortais à peine du pays des zombie, que j'avais un poste de 15 heures semaine et que je n'avais aucunement les moyens de me payer un livre à 40$ même avec un rabais. Il va sans dire que j'avais perdu l'habitude d'emprunter des livres. Cependant, depuis quelques mois, plusieurs livres me faisaient de l’œil et que malgré le fait que mon salaire ne soit plus le même qu'à mes débuts, un moment donné on ne peut pas tout acheter.

J'ai donc rempli le formulaire d'emprunt pour deux volumes, avant de quitter le travail hier. Évidemment, quand j'ai mis le nez dehors avec mon précieux butin, il pleuvait. Non, il délugeait. J'avais pris la peine de mettre lesdits livres dans des sacs de plastiques, deux pour être précise, histoire de me donner une chance. Mais quand même. Je m'étais donc pressée pour atteindre le métro j'avais attendu l'autobus à Papineau, ce que je ne fais jamais, afin d'assurer l'arrivée à bon port à ces objets qui n'aiment pas la pluie.

Mon attente avait été vaine : l'autobus n'est pas passé. Loi de Murphy ? Peut-être toujours est-il qu'après 10 minutes d'attente suivant l'heure de passage prévue dudit bus, je m'.tais mise en marche. Heureusement, je change très peu souvent de sac de transport et celui-ci dissimulait un parapluie, oublié là depuis la dernière ondée de novembre. Ça faisait longtemps que je savais qu'il fallait que je le change car son imperméabilité laissait décidément à désirer, mais ça et rien du tout, j'avais choisi le parapluie.

Je ne sais pas trop comment j'ai fait pour parcourir l'itinéraire du métro à chez moi, entre les voitures qui m'éclaboussaient, les rafales qui retournaient sporadiquement mon infidèle parapluie et les trombes d'eau qui me coulaient sans arrêts sur le dos. Toujours est-il que j'ai fini par arriver, saine et sauve à domicile. La première chose que j'ai faite après avoir enlever mes vêtements mouillés, et d'enfiler un pyjama sec, a été de vérifier l'état des livres. Je me donnais l'impression d'être une archiviste devant une œuvre particulièrement précieuse et défraîchie par le temps, j'avais posé des serviettes sur la table avant d'éventé doucement et méticuleusement les sacs de plastique.

J'ai été aussi soulagée que ravie de constater qu'ils n'avaient pas pris une goutte. Je pouvais donc me préparer une boisson chaude avant de m'enfoncer dans le divan armée d'une douillette et pouvoir enfin les lire.

Il y a des combats comme ceux-ci qu'on ne s'imaginait pas avoir à mener, mais ils donnent une saveur particulière au plaisir.

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