jeudi, juin 29, 2017

Champ gauche

Ceux qui me connaissent savent à quel point j'aime la littérature jeunesse. Particulièrement, les personnes avec lesquelles je travaille. Je dirais qu'elles se trouvent souvent chanceuses de m'avoir dans les alentours lorsque vient le temps de suggérer des livres pour les tous petits. Soyons honnêtes, la plupart des jeunes adultes, donc du personnel changeant du commerce de détail, ne s'intéresse que peu à ce genre d'ouvrage. Sauf que moi, je les aime d'amour.

Je lis à peu près toutes les nouveautés qui sortent en ce domaine, et j'en achète une foule pour Zazou qui voit croître sa bibliothèque presque à toutes les fois que je le vois. Il ne le sait pas encore, mais il possède des albums qui sont beaucoup trop élaborés pour son âge. Mais comme il aime les images, peu importe qu'il s'intéresse plus ou moins à l'histoire, dans un avenir pas si lointain il aura de bonnes histoires à se mettre sous la dent, des histoires dont il connaît déjà les images et qu'il commente à sa manière depuis qu'on les lui a mises entre les mains.

Comme j'ai une certaine facilité à organiser ma mémoire de façon à ce que les informations utiles reviennent à l'avant plan lorsque j'en ai besoin, il m'arrive assez régulièrement d'avoir une idée un peu saugrenue, un peu champ gauche qui pourrait convenir à la maman ou au papa qui est devant moi et qui cherche désespérément une manière d'aborder un problème récurrent avec l'enfant qui traverse telle ou telle période.

Récemment, une dame est entrée dans la succursale un peu hagarde, presque convaincue d'avance que cette visite dans une librairie ne lui apporterait rien de bon. Son plus jeune fils semblait ne plus avoir aucune envie de se diriger vers la propreté malgré toutes les stratégies qu'elle et le papa avaient mises en place pour y arriver. Ce que je comprenais de l'histoire, c'était que le cheminement c'était fait de manière normale pendant un moment mais que depuis quelque chose comme trois mois, non seulement, il n'y avait plus de progression, mais qu'en fait le petit était de moins en moins enclin à demander le pot, surtout pour les cacas.

Je n'ai pas d'enfants, mais j'avais entendu dire que pour certains bambin, il y avait comme une épreuve de séparation d'avec le contenu de la couche, comme si c'était une extension de lui-même. Alors plutôt que de lui présenter un des sempiternel ouvrage sur les enfants qui commencent à utiliser le pot, je lui avait suggéré un album sur le contenu des couches. Plein de sortes de cacas caché dans des couches de différents bébés animaux et que le personnage principal, trouve, évidemment, supers intéressants. La maman, n'avait absolument pas l'air convaincue par ma suggestion, mais l'avait achetée, juste pour mettre toutes les chances de son côté.

Trois semaines plus tard, elle est revenue dans le magasin, je l'ai accueille à son entrée, comme j'accueille tous les clients en me disant que son visage me disait vaguement quelque chose. C'est elle qui m'a remis en mémoire cet achat récent en me disant tout de go : « Votre livre, madame, a fait des miracles; mon fils est presque propre en seulement trois semaines! Est-ce que je peux vous faire la bise? »

J'ai, bien entendu, accepté, c'était si gentiment demandé. Et puis ce n'est pas tous les jours qu'on a le droit à une reconnaissance aussi directe du travail que l'on accompli.

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