dimanche, juillet 09, 2017

Comme un parfum d'indépendance

Fa que c'est ça. Pour la première fois depuis belle lurette, je suis totalement indépendante. J'ai vécu tant et tant d'années engoncée dans mes dettes, des limitations liées à cet état de fait que je n'en avais presque plus conscience, sauf que je savais bien que ces limites existaient et que dans une certaine mesure, elles étaient de mon fait. Dans une certaine mesure, parce que je peux affirmer que la dépression a largement participer à creuser le tombeau de mes dettes : j'étais à cette époque totalement incapable de travailler et à fortiori de rencontrer mes obligations financières.

J'avais développé toutes sortes de manières de faire afin de contourner mes frontières, pour me donner l'impression qu'elles n'existaient pas. En fait, j'ai appris à vivre selon mes moyens, ce qui, je le suppose, est une bonne chose. Mon pêché de dépenses impulsives, le seul que je n'ai ni cherché à tenir en laisse ni réussi à diminuer, demeure la culture en générale et les livres en particulier. Je me suis permis de voir des spectacles, malgré une pauvreté certaine et n'ai jamais ajouter l'achat d'un livre à la colonne de mes dépenses, malgré le fait que ça en ait été.

Et puis, dans cette longue, très longue traversée, j'ai pu vivre, quelquefois, à l'extérieur des limites qui m'étaient imposées. Grâces à des amies qui m'ont aidée à voyager. En groupe tout d'abord, puis toute seule. Mais sans elles, même si j'avais la possibilité de me payer ces voyages, je n'aurais jamais pu partir. Parce que pour voyager, de nos jours, ça prend une carte de crédit. Ce que je n'avais plus. Oh, j'en avais bien eu, deux fois plutôt qu'une, mais j'avais cessé d'en payer le solde quand je luttais pour survivre. Pas raisonnable, pas responsable, c'est vrai. Mais bizarrement, je ne regrette toujours pas les choix que j'avais fait à l'époque, peut-être parce que j'ai du repartir au bas de ma propre échelle pour me reconstruire toute au complet.

Ce printemps, mon colocataire et moi avons, d'un commun accord, décidé que nous allions casser maison l'an prochain. Sans heurts ni disputes à l'horizon, simplement une écœurite aiguë de l'appartement des deux côtés et une envie d'aller voir ailleurs, avec d'autres gens ou seuls ce que la vie pourrait nous apporter. Par voie de conséquent, je sais très bien qu'un voyage printanier ne sera pas dans mon horizon des possibles.

J'ai donc décidé de retourner à Cuba, toute seule, je commence à en avoir l'habitude et surtout à y prendre un réel plaisir. Mais cette fois, j'ai pris ma décision toute seule, magasiner sans avoir à en parler à personne et payé, rubis sur l'ongle, cette première folle dépense depuis que j'ai enfin acquis mon indépendance. Je ne suis pas excitée, ni apeurée comme la première fois que je suis partie seule. Je n'ai même pas tant besoin de vacances. Mais je crois que j'avais besoin de le faire par moi-même, pour la première fois de ma vie. Comme si j'avais pris la décision, plus ou moins consciemment, de porter un parfum d'indépendance.

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