jeudi, juillet 06, 2017

Papa est là

Des fois, moi, je voudrais être presque grand. Il me semble qu'il y a tellement de choses à voir, à vivre, à découvrir dans la vie, j'ai l'impression de ne pas avoir assez de minutes de disponibles pour tout apprendre ce que je voudrais apprendre, vite, vite, vite. Il m'arrive donc de refuser obstinément de faire ma sieste. Sauf que je ne suis pas encore tout à fait grand alors si je ne fais pas ma sieste, après je suis pas mal moins de bonne humeur que d'ordinaire. Tout me dérange et je pleure beaucoup. Pas longtemps, ça ne prend jamais grand chose pour me changer les idées, sauf que je suis davantage un rieur dans la vie qu'un grand pleureur.

L'autre après-midi donc, je n'ai pas fait ma sieste. Alors quand on est allés rejoindre Grand-mamie et Tatie au Club, j'étais un peu grognon. Pas assez pour ne pas leur faire des saluts de duchesse de carnaval en les apercevant de loin. Je suis toujours content de voir Grand-mamie, et pas mal toujours content de voir Tatie, je ne suis presque plus gêné dans les premières minutes avec elle. Et puis, elle est tellement contente quand je lui dit : « Tatie », je peux bien faire l'effort de ne pas être trop gêné.

Je pense que j'étais supposé faire des choses avec Grand-mamie et Tatie, mais quand je suis fatigué et un peu grognon, c'est Papa que je veux. Je veux faire tout ce qu'il fait, quand il le fait. Il est si habile. Avec un grand bâton il sort des poissons de l'eau comme par magie. Mais je n'ai pas le droit de toucher aux poissons. C'est juste lui qui peut le faire et même si je lui dit : « Nanan, Nanan! » Il ne me laisse pas même pas essayer. Alors je pleure, pleure, pleure, pendant une grosse minute en disant « Papa est là, Papa est-là ». Grand-mamie dit que je verse des larmes de crocodiles et elle m'amène faire d'autres choses super intéressantes comme arroser des fleurs. Je suis super bon, même si j'ai besoin d'aide pour transporter les arrosoirs quand ils sont pleins. Mais quand je m'érafle le pouce, il y a juste Maman pour soigner ma douleur, je coure vers elle en disant : « Bobo maman, bobo ». Alors elle me fait des bisous doux qui effacent tout.

C'est bizarre, parce qu'il n'y a pas beaucoup de gens au Club. Je pense que c'est parce que le grand bain il est brisé. L'eau est toute noire et il est INTERDIT d'aller le regarder de près. Dès que mes petits pas s'en rapprochent, j'entends des « Zazou, ne vas pas près de la piscine! » alors je change ma trajectoire, toujours un peu déçu.

On est tous allés manger à la maison. Un peu tard pour mon petit estomac. Je chignais encore davantage. J'étais bien content quand j'ai enfin mangé mes patates et mon poulet. Mais les patates étaient un peu salissantes, oranges et mauves, il fallait que Maman et Papa me nettoient régulièrement les mains, je n'aime toujours pas qu'elles soient sales. Mais quand je suis fatigué, j'ai moins d'appétit, et plus envie de faire des folleries. Alors, je me gargarise avec mon eau, tout en gardant une bouchée cachée et Maman me dit avec sa plus grosse voix que je dois tout croquer sinon, elle ira chercher la bouchée avec ses doigts et m'ôtera même mon eau. La vie est terriblement injuste quand on pas encore vingt mois.

Après mon bain, Grand-mamie et Tatie ont dit qu'elles devaient s'en aller pour aller faire dodo. Je ne l'aurais jamais avoué, mais j'étais presque soulagé qu'elles partent si tôt parce que je ne sais vraiment pas comment j'aurais pu rester réveillé, même cinq minutes de plus.

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