Enfermement involontaire
On a le wifi en saut de
puces à la maison depuis quelques temps. D'ordinaire, ces
manifestations se produisent lors des heures de pointe et ne durent
que quelques secondes, allant parfois jusqu'à la quinzaine de
minutes, rien de bien grave somme toute.
Sauf qu'hier, mon
ordinateur ne voulait rien savoir de se brancher sur le réseau.
Pendant plusieurs heures. Je me sentais complètement emprisonnée à
l'intérieur de moi. Parce qu'on était mercredi et que je devais, au
moins commencer, à réfléchir à un texte à présenter. Mais
comment on fait pour présenter un texte, une réflexion sur un
quelconque sujet si on a pas accès à notre principal outil de
diffusion? Sérieusement, j'étais incapable d'écrire, malgré la
page ouverte sur le traitement de texte. Comme si en n'ayant pas de
point de chute qui rencontrerait éventuellement un certain lectorat,
ma plume, mes idées, n'avaient plus de raison d'être.
Ce n'est certes pas
l'exacte vérité, mais cet événement a fait en sorte de me
permettre de vérifier pleinement à quel point mon lectorat
m'importe. Pas que je passe des heures à regarder les statistiques
de lecture de mes texte, en fait, je ne les regarde que vaguement,
mais je vous sais quelque part à l'autre bout de mes mots et de mes
maux. Je sais que lorsque je m'exprime quelqu'un quelque part entend
ce que je dis. Et ça fait toute la différence du monde. Surtout
lorsque je vis des choses qui me sont ardues. Pas nécessairement des
choses sur lesquelles j'écris, du reste. Il arrive souvent que les
sujets les plus tendus, je les passe sous silence. Par souci d'équité
envers une personne qui pourrait m'irriter, par exemple, parce que si
je me suis créé une tribune d'expression, il n'est absolument pas
garanti que cet autre individu pourrait se défendre si j'exprimais
en ces pages des frustrations trop précises. Et le plus souvent
parce que je n'ai pas envie semer l'intimité d'autrui sur une
plate-forme qui ne lui appartient pas.
Néanmoins, mes exercices
littéraires sont essentiels pour ma santé mentale. Je le sais
depuis fort longtemps et je le mesure actuellement. Depuis le début
de l'année, j'ai vécu assez de situations stressantes pour ébranler
la plupart des gens, et moi au premier chef. Sauf que je ne me suis
pas choquée une seule fois. J'ai versé des larmes de rage comme de
dépit, j'ai fait des discours enflammés qui sont tombés dans des
oreilles amicales et surtout, j'ai canalisé ici mes peurs et mes
angoisses en les mutant en autre chose.
Cependant, il est clair
que sans ces yeux qui se posent sur mes écrits, l'exercice
d'évacuation n'aurait pas du tout la même portée. Parce que je ne
pourrais être certaine que quelqu'un m'ait entendue.
Et je crois que,
fondamentalement, j'ai besoin de l'être.
Libellés : Digressions