dimanche, octobre 15, 2017

La douche

On fêtait ma sœur aujourd'hui et comme la plupart du temps, on s'était réunit dans la maison de ma mère pour l'occasion; il y a quelque chose qui tient de la magie dans le fait de se faire concocter un repas d'anniversaire par sa mère et de le partager avec le reste de la famille. Comme c'est souvent le cas dans ces événements familiaux, je récoltais diligemment les anecdotes et autres observations utiles à la rédaction d'un texte sur l'enfance de l'art que je comptais écrire ce soir. Mais la vie en a décidé autrement.

Après un départ retardé par un embouteillage dans le cadre de la porte et un petit garçon qui courrait partout dans un dernier regain d'énergie avant de tomber sous les assauts du sommeil, j'avais mis les pieds dans les rues d'Ahunstic un peu après 19h30 sous une pluie de grosses gouttes lourdes, chaudes et éparses.

Je n'avais pas franchi le tiers du chemin qui me mènerait au métro quand le ciel s'était crevé complètement. En deux ou trois pas, j'étais détrempée. Totalement imbibée d'eau. Je n'avais même pas pris la peine d'essayer de presser le pas, sachant d'expérience que je risquais davantage de me blesser en tombant que d'arriver à échapper à l'averse qui passait. Plus tôt dans la semaine, j'avais ôté mon parapluie de mon cabas et bien entendu, j'avais oublié de l'y remettre avant de quitter la maison. Au coin des rues Lajeunesse et Sauvé, un jeune homme noir comme la nuit avait étendu le bras pour me protéger de son parapluie. Il m'avait dit en souriant : « On dirait que tu t'es fait prendre madame. Vas-tu loin? Moi je vais jusqu'à Saint-Laurent et je peux te prêter la moité de mon parapluie ». Je lui avais souri de toutes mes dents en lui répondant que le métro était ma destination.

Je m'étais donc engouffrée dans les dédales de celui-ci détrempée, mes souliers couinant allègrement sur les dalles pendant que j'adoptais la démarche maladroite de ceux qui essaient de trouver un endroit sec dans une vêture qui n'en a point. Le train était entré en gare à mon arrivée sur le quai et j'avais monté dans un wagon sous l’œil abasourdi des autres passagers. J'avais passé le trajet debout, à essayer tant bien que mal de me faire sécher, mais en ne réussissant en fait, qu'à m'entourer d'une belle flaque qui pouvait donner l'impression que j'avais fait pipi dans mes culottes. À quelques mètres, une dame ne pouvait s'empêcher de pouffer à toutes les fois où elle me regardait. Je présume que j'avais, un peu, l'air ridicule.

Bien entendu, l'autobus qui mène près de ma maison avait décollé sous mon nez me laissant mariner dans mes souliers imbibés. Ceux-ci d'ailleurs en ont profiter pour rendre l'âme. Ça fait longtemps, genre deux ans, que je sais que je dois les changer, mais ce sont des pantoufles tellement confortables que je remets continuellement leur mise au rebut (et accessoirement l'achat de chaussures de replacement) à plus tard. Sauf que là, les semelles ont toutes les deux décoller et en plus de couiner, ces dernières parlaient sans aucune forme de discretion dans les les derniers mètres qui me menaient chez moi.

Heureusement que le ridicule ne tue pas, sans quoi je serais vraiment morte plusieurs fois, à ce jour.

Libellés :