jeudi, novembre 09, 2017

Revers de conscience

Depuis des années que tu suis l'actualité, ici comme ailleurs et récemment, tu t'es mise à t'écoeurer toi-même tellement tu es rendue insensible à certaines formes de violence. Depuis longtemps déjà, tu te heurtes aux informations vite passées sur ces massacres de masse qui se passent ailleurs, dans des lointains qui n'intéressent pas les masses d'ici alors forcément elles sont plus ou moins relayées, on pourrait même dire plus souvent pas relayées qu'autrement.

Cette indifférence généralisée te pue au nez parce que tu sais que ce qui se passe là-bas finira bien un jour par avoir des retentissements chez-toi ne serait-ce que parce que les populations visées finiront bien un jour par se mettre en mouvement pour rechercher un endroit où vivre est plus clément, ou tout simplement possible, et que ces nouveaux migrants viendront un jour ou l'autre grossir les masses déjà conséquentes des humains en transit qui s'amoncellent aux portes des pays dit soit riches, soit accueillants, soit les deux, mais qui ne le sont pas toujours autant qu'on voudrait bien le faire croire.

Sauf que ta chape d'indifférence s'est singulièrement raccourcie parce que tu t'es surprise à tasser d'un revers de conscience une énième tuerie s'étant déroulée aux États-Unis. En fait, ta première réaction a été de te demander si cet événement allait interférer dans ta soirée électorale municipale. Et là, vraiment, cette petite pensée mesquine t'a fait mal à l'âme. Bon d'accord, l'exercice de démocratie est important, mais on parle quand même ici de dizaines de morts violentes d'un seul coup, et franchement, tu n'avais cure des raisons qui pourraient d'être exposées. Parce que tu ne vois pas le jour où les principaux intéressés remettront en question pour la peine, le port des armes à feu.

Tu t'es sentie petite et égoïste de te sentir à ce point indifférente aux tenants et aux aboutissants de la chose. Surtout que ça devient de plus en plus fréquent de ta part. Las Vegas, dernièrement, tu n'y a consacré qu'une bien mince pensée, au bout du compte, quelques jours et puis on change de sujet. C'est loin, c'est ailleurs, ce n'est pas chez toi. Alors bien sur, tu t'es demandé quel genre de sociopathe tu étais devenue si ces assassinats n'avaient plus ce qu'il fallait pour te tenir éveillée la nuit.

Le pire, c'est que tu sais pertinemment que quel que soit l'intérêt que tu portes à ces événements, cela ne changera rien à leur fréquence, à leur violence, à leur irréalisme. Tu n'es pas Dieu et tu ne peux pas régler toutes les causes sociales simplement en y portant ton attention.

N'empêche que la nonchalance avec laquelle tu oublies de verser une larmes pour les victimes et leurs entourages comme si rien de tout cela ne pouvait jamais atteindre les limites de ton petit confort, n'a rien pour te rassurer sur ta capacité à réellement vivre en société.

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