jeudi, janvier 18, 2018

Sursauts dans le temps

Il me semble parfois que le temps file à une vitesse folle ou encore qu'il est parsemé de trous béants. À d'autres moments, cependant, je croirais presque à une certaine synchronicité. Ces derniers temps, j'ai reçu quelques invitations d'amitiés sur les réseaux sociaux qui sortaient tout droit de mon enfance; de l'école primaire, je veux dire. Ça fait un peu étrange de voir apparaître coup sur coup les noms de personnes qu'on a pas vu depuis quelque chose comme trente ans et à qui on n'avait pas vraiment consacré beaucoup de pensées dans l'intervalle.

J'ai croisé l'une de ces personnes aujourd'hui. En discutant avec elle, j'ai compris qu'elle croyait que nous avions été à l'école secondaire ensemble, pas au primaire. Après avoir bien démêlé tous les fils de cet embrouillamini, nous sommes tombées d'accord sur le temps d'école que nous avions passées ensemble, à une classe d'intervalle. Et c'est là qu'elle m'a dit, tout sourire : « Ah, mais c'étaient tellement des belles années, il n'y avait que du beau dans ce temps-là pour moi, autant au primaire qu'au secondaire, c'est sans doute pour ça que j'ai tout mélangé ». Je me suis contenté de sourire et j'ai repris ma route en réfléchissant à tous les degrés de perceptions qui peuvent différencier deux personnes.

À l'école où nous allions, j'étais la tête de turc de ma classe. Je vivais de l'intimidation, même si je n'aurais jamais utiliser ce terme pour décrire ce que je vivais. J'aurais plutôt dit que j'étais rejet parmis mes pairs. C'était un état de faits et j'avais trouvé un paquet de solutions pour contourner le problème et avoir une vie scolaire somme toute heureuse, à commencer par fréquenter des gens qui étaient plus jeunes que moi de deux ou trois ans ce qui me permettait d'avoir un cercle d'amis stimulants malgré tout. Je vivais avec le reste sans trop de difficulté, je crois. Et puis, comme l'école était loin de la maison et que les ordinateurs et l'internet étaient plutôt loin du quotidien, je réussissais à mettre des frontières entre les difficultés vécues à l'école et le reste de mon existence. Néanmoins, je ne pourrais pas dire que dans cette période de ma vie, il n'y ait eu que du beau.

Peut-être à cause de ce que je vivais, j'ai longtemps cru que les gens ne pouvaient pas garder un bon souvenir de moi. Tout ce dont moi je me rappelais en voyant surgir quelqu'un provenant d'un certain passé, c'était la fois ou j'avais eu l'air ridicule et je croyais que forcément, c'était le souvenir unique que quiconque pouvait avoir de moi. Ça m'a pris bien du temps, peut-être même un passage dans le pays des zombies pour venir à bout de cette croyance.

Bref, quand j'ai vu cette autre personne revenir dans ma vie qui me disait à quel point c'était fantastique de pouvoir se reparler après bien des années, j'avais, encore une fois, une perception mi-figue mi-raisin. Parce que je me souviens très bien avoir choisi de couper les ponts avec cette personne parce qu'en grandissant, nos valeurs et nos intérêts n'avaient plus vraiment de rapport entre eux. Et comme cette personne est partie s'installer à l'étranger quelques années après cette rupture pas tout à fait claire, la distance a fait le gros du boulot. Sincèrement, je n'aurais jamais chercher à retrouver cette fille-là, même si j'ai beaucoup plus de bons que de mauvais souvenirs de sa compagnie.

Sauf que les ponts sont retissés, elle est censée me donner des nouvelles à sa prochaine visite dans le secteur. Et malgré tout, je suis assez curieuse d'apprendre ce que l'étranger aura fait d'elle dans les trente dernières années.

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