Opérer un changement
Dans quelques heures, je
vais fermer mon ordinateur sur neuf ans de ma vie. À mon réveil,
demain, il n'y aura plus d'internet dans le secteur, plus de télé,
bref, absence de plein de petites choses qui débutaient mon
quotidien.
Neuf ans. C'est l'endroit
où j'ai vécu le plus longtemps si l'on oblitère la période lors
de laquelle j'ai résidé sous le toit familial. Je n'aurais pas cru,
quand j'ai aménagé ici que j'y resterais si longtemps. Après tout,
c'était un peu une erreur de circonstances : je voulais quitter
une relation de colocation qui devenait désagréable avant de perdre
une amie (pari réussi) et la personne chez qui j’emménageais
désirait buter de chez lui un colocataire importun. Et comme, à
l'époque, je n'avais pas de crédit, une dette d'études dont il me
semblait impossible de voir la fin, c'était pour moi une situation
parfaite.
Aie-je été heureuse
ici? Je ne saurais répondre. Je n'ai pas été malheureuse en tout
cas. Mais je n'étais pas non plus chez-moi. J'étais un autre qui
avait fermement implanté ses racines avant mon arrivée. Ceci n'est
pas une critique, simplement un état de faits. Si l'envie lui
prenait de faire une nouvelle décoration dans un corridor ou dans
une pièce, il ne lui passait pas par l'esprit de me demander mon
avis sur la chose. Par ailleurs, il ne me venait pas d'avantage à
l'idée de lui dire que je n'aimais pas toujours ses choix : je
me sentais pas tout à fait concernée. Où plutôt, je reconnaissais
sa préséance sur l'appartement.
Ceci étant dit, je ne
suis pas une martyre des dernières années de ma vie. J'avais besoin
pour pouvoir étendre mes ailes. Ici, j'ai pu avoir un passeport
parce que j'avais les moyens de me le payer. Ici, j'ai voyagé. Dans
des tous inclus, c'est possiblement réducteur, j'en suis consciente,
mais j'aime le côté « prise en charge » de ce genre de
formule. J'aime la plage et surtout j'adore l'eau depuis aussi
longtemps que je me souvienne. Jouer dans l'eau c'est la chose qui
m'est le plus agréable. Alors mettez moi une plage, de l'eau chaude,
un bon livre et beaucoup de temps, forcément, je m'épanouis.
Et surtout, à mon
arrivée ici, je n'avais pas de crédit, j'avais besoin d'espace
financier pour me refaire un peu. J'y suis arrivée, sans trop m'en
apercevoir, donc sans heurts et c'est, à mon avis, ce qu'il a de
plus important.
À l'aube, demain matin,
j'aurais terminé ma résidence ici. Mon déménagement personnel
attendra quelques jours de plus. Je quitterai l'appartement avec ma
grosse valise pour aller camper sur le divan maternel parce que j'ai
la chance d'avoir une maman généreuse qui m'accueillera dans son
quotidien avant que je finisse par déplacer mes pénates.
J'opère un tournant
majeur dans mon existence, que je le veuille, ou non.
Et je crois, qu'au bout
du compte, j'en ai envie.
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