jeudi, juillet 26, 2018

Changer de faune

Ça fait maintenant deux semaines que j'ai recommencé à travailler depuis mon déménagement. Et j'ai pu constater une nette différence dans la faune qui s'avance vers les stations de métro sous ses nouvelles latitudes. D'abord, nous sommes nombreux au même arrêt d'autobus, tous vêtus pour le travail. Il m'apparaît évident que tout un chacun est levé depuis un moment déjà. Et on dirait que tout ce beau monde essaie le plus possible de faire attention à son voisin et ne parle pas trop fort comme pour ne pas brusquer l'éveil des concitoyens pris pour se lever à l'aurore un samedi matin.

Dans mon ancienne vie, je croisais, à ces heures et ce jour précis de la semaine, beaucoup, beaucoup de jeunes ou autres fêtards qui ne s'étaient pas encore couchés. Ils étaient bruyants et parfois un peu épeurants. Je ne me sentais pas toujours tout à fait en sécurité, surtout les matins d'hiver quand le soleil est loin d'être levé. Ça me donnait l'impression d'être un peu martienne de m'en aller travailler en empruntant les mêmes axes que ceux qui avaient attendu l'ouverture des stations afin de pouvoir retrouver leur lit sans avoir à débourser pour un taxi.

Maintenant, j'ai l'impression de vivre dans le sens du monde. Même si je trouve encore que 6 heures du matin, pour prendre l'autobus, c'est beaucoup trop tôt. Au moins dans un foule de quidam qui s'en vont aussi travailler, je me sens un petit peu moins marginalisée. Et surtout beaucoup plus en sécurité. Ceci ne veut pas dire que je ne croise pas de personnages.

Tenez, le vieil italien, il est déjà dans l'autobus quand j'y grimpe, en belle chemise colorée et en pantalon à plis. Sous sa crinière blanche ébouriffée, ses yeux noirs sont allumés. Il ne dit rien, mais observe au moins autant que moi. Il doit être le seul passager à ne pas avoir un téléphone intelligent. Il a plutôt son journal sous le bras, et il est évident qu'il attend d'être arrivé à destination avant de le déplier pour le compulser à son gré. Une fois dans l'autobus nous faisons à peu près le même trajet. Il va un peu plus loin que moi sur Jean-Talon pourtant, je suppose qu'il est hebdomadairement le premier client d'un café italien et que cette routine lui est importante.

Ou cette Congolaise, je le sais parce que je l'ai entendue dire qu'elle venait de Kinshasa, qui passe tout le trajet au téléphone à rassurer un quelconque membre de sa famille avant de débuter sa journée de travail. Elle est habillée pour travailler dans le système de santé. Je ne sais pas si elle est infirmière ou préposée, mais le résultat est le même, elle est maternelle et réconfortante et je me dis à tous les coups que je me sentirais entre bonnes mains si c'était elle qui me soignait.

En somme, je sais depuis le jour où j'ai décidé de déménager que de revenir vivre près de mes racines me serait profitable.

Je n'avais peut-être pas anticipé à quel point.

Libellés :