jeudi, novembre 08, 2018

Transport en égoïsme

J'ai la chance d'avoir plusieurs trajets possible du travail à la maison et l'inverse. Avec le temps, j'ai appris lesquels choisir selon mes heures de déplacement. Par exemple, lorsque je travaille de jour, il est plus simple et plus rapide de me rendre à la station Fabre pour attraper le 45 vers le nord parce que cet autobus roule à une fréquence de 10 minutes, en théorie. C'est donc le trajet que j'avais choisi hier, mais j'ai été bien mal avisée de le faire.

D'abord, il ventait à écorner les bœufs tandis qu'une fine pluie s'abattait sur les quidams pris comme moi à l'arrêt. Inutile de sortir le parapluie, ceux qui s'y risquaient voyaient les leurs se retourner à tout bout de champ. La lecture n'était pas non plus recommandée, pas plus que l'utilisation du téléphone pour patienter. On ne pouvait qu'attendre. C'est bien entendu dans ce genre de circonstances que lesdits autobus se font rares. Alors, plutôt que 10 minutes, j'ai du patienter quelque chose comme 25 minutes avant de voir arriver la bête, plus que bondée.

Se faufiler à l'intérieur tenait de l'exploit. Je me suis donc retrouvée coincée près de la première porte arrière à me faire rentrer dedans à chaque arrêt quand quelqu'un essayait de sortir. Dans ce genre de situation, je fais toujours bien attention à prendre le moins de place possible, en commençant par placer mon sac à mes pieds et en évitant de sortir téléphone ou livre. Il faut savoir vivre en société.

Mais, ce n'est pas le cas de tout le monde. Je venais de me dénicher une place quand je me suis aperçue qu'à deux bancs de là, une dame tirée à quatre épingles utilisait deux espaces. Un pour elle et un pour son ses sacs (deux incluant sa sacoche). Malgré le fait que le chauffeur, hurlait à chaque arrêt de svp circuler vers l'arrière, elle ne semblait pas du tout se sentir concernée. Même que lorsqu'une dame âgée lui a demandé de libérer l'espace pour qu'elle puisse en profiter, Madame Quatre-Épingle a répondu que non, qu'elle ne voulait pas se sentir compressée par ses sacs. J'en ai conclu que la jeunesse n'avait pas l'apanage du manque de savoir vivre. J'ai voulu me lever pour céder ma précieuse place à la vieille dame qui en avait visiblement besoin, mais elle a refusé arguant que mon siège était juché un peu trop haut pour ses moyens.

Pendant ce temps, une jeune femme jouait sur son téléphone, son gros sac-à-dos bousculant tout le monde autour d'elle pendant qu'elle s’accotait sur une barre de soutient, la monopolisant à son usage exclusif pour mieux profiter de ses deux mains pour jouer à sa partie de poker en ligne. Elle avait une espèce d'attitude super nonchalante, pas du tout alerte aux signaux de ceux qui voulaient circuler autour d'elle. À un arrêt, un homme l'a enguirlandée copieusement en français puis en anglais tandis qu'elle levait sur lui des yeux perdus en lui demandant « es-tu raciste? » Ça n'avait strictement aucun rapport, même si les deux personnages n'avaient effectivement pas la même couleur de peau.

Moi, j'étais découragée devant cet étalage d'individualisme patent.

Aujourd'hui terminant à la même heure que la veille, j'ai tenu à effectuer le même trajet comme pour m'assurer de briser le mauvais sort et comme de bien entendu, je n'ai pas attendu ni non plus croisé de femme, vraiment, mais alors là, vraiment mal élevée.