dimanche, décembre 16, 2018

Ligne dilettante

Jeudi soir à la fin de l'heure de pointe, j'attendais l'autobus sous une pluie constante et glaciale depuis une vingtaine de minutes, peut-être davantage. J'avais bien vu des véhicules sur un trajet alternatif passer plusieurs fois, mais je ne me sentais pas l'optimisme de descendre les quatre coins de rue sur la chaussée devenue presque impraticable à cause du verglas. Une fois encore, je me maudissais de n'avoir pas choisi des bottes à crampons lorsqu'était venu le temps de remplacer mes bottes d'hiver.

Je savais, avant de décider quel trajet emprunter que celui pour lequel j'optais était hasardeux. Je blaguais beaucoup avant de revenir vivre dans Ahuntsic au sujet de cet autobus qui ne m'avait pas manqué parce qu'il est plutôt dilettante dès que le mauvais temps se met de la partie. Cependant, sur à peu près le même parcours, il y a aujourd'hui une seconde ligne qui peut, parfois s'avérer fort utile.

Il était frustrant de voir des bus décharger leur passager un coin de rue plus haut avant d'afficher un « en transit » qui les renverrait certainement à leur garage. La grogne commençait à se faire entendre de plus en plus fort autour de moi parce que visiblement, il y avait un souci avec la ligne 140 puisque, selon ce que j'ai compris, 3 autobus avaient omis de se présenter. Et bien entendu, ce genre de chose arrive quand la température est dégueulasse. Et franchement, ce soir-là c'était épouvantable.

Comme beaucoup d'entre-nous, lorsque l'autobus de la ligne alternative s'est présenté, j'ai décidé de me diriger vers le second arrêt afin de finir par arriver à bon port. C'est à ce moment qu'une dame immense s'est jetée devant l'autobus pour l'empêcher d'aller rejoindre son point de départ. Il n'y a pas eu de heurt, la conductrice de l'autobus ayant pu s'arrêter avant de frapper la dame. Celle-ci criait à la conductrice de prendre le trajet du 140 parce qu'elle était tannée d'attendre, frigorifiée. Elle était visiblement en furie. Un homme l'a tirée vers le trottoir pendant, qu'avec un peu de honte, je continuais à me diriger vers l'arrêt où je pourrais monter dans ledit bus.

Je ne sais pas trop comment elle s'y est prise, mais elle a atteint la porte du 41 deux personnes avant moi. Pourtant, j'étais certaine de l'avoir laissée en arrière quand l'homme l'avait sortie de la rue. Une fois à l'intérieur, elle s'est remise à enguirlander la pauvre chauffeuse. Avec des mots que je préfère ne pas répéter. C'était violent. Pendant ce temps, une bonne partie des gens qui avaient attendu le 140 s'agglutinaient derrière-moi, forts mécontents de ne pas pouvoir se mettre au sec. La dame hurlait qu'elle empêcherait tout le monde de monter et l'autobus de partir tant que celui-ci ne se transformerait pas en 140.

J'ai fini par lui toucher le bras en en lui disant : « Madame, je comprends que vous soyez furieuse, mais la chauffeuse n'y est pour rien et tout ce que vous réussissez à l'heure actuelle c'est de braquer une vingtaine de personne contre-vous. Potez plainte à la STM, vous aurez raison, mais la conductrice elle, elle ne peut pas régler votre problème » Elle s'est retournée vers moi encore plus furieuse et j'ai eu peur qu'elle ne me frappe, ce qui semblait être son prochain mouvement. Mais le même homme qui l'avait sortie de la rue a tiré sur son bras pour l'écarter de la porte tout en me poussant à l'intérieur.

J'ai eu le temps de voir des agents de la STM arriver pour apostropher la cliente mécontente avant que le bus soit tellement plein pour qu'il soit possible de voir ce qui se passait à l'extérieur.

J'espère sincèrement qu'ils n'étaient là que pour la calmer, parce que je suppose depuis deux jours, qu'une affaire plate de plus n'aurait absolument rien amélioré à une journée déjà gâchée.

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