dimanche, février 11, 2007

Je connaissais bien le patron

Voici ma contribution de la semaine au Coitus, la contrainte était que le texte devait se terminer par je connaissais bien le partron

*****************************

Elle arborait une robe bleue, à la fois cintrée et vaporeuse. Ses cheveux voguaient sur ses épaules en boucles désordonnées. Il y avait dans sa posture, la grâce des débutantes tandis qu'elle tentait d'adopter l'attitude des femmes qui ont l'expérience de ces soirées. Je voyais bien qu'elle était hésitante dans ses talons aiguilles qui mettaient en valeur ses petits orteils peinturlurés. Depuis une quinzaine de minutes que je l'observais passer d'un groupe à l'autre, écoutant les conversations sans trop s'y mêler. Les convives notaient sa présence pour l'oublier dans les instants suivant par manque d'intérêt pour cette jeune beauté dont ils ne connaissaient pas encore la raison de la présence. Les mondanités mettent souvent en valeur les visages déjà connus et très peu ceux qui sont à découvrir. Quoique très belle, elle passait presque inaperçue.

Il y avait, un brin de désespoir dans ces minutes qui ne finissaient de remplir le vide autour d'elle. Je sentais bien qu'elle se voyait étrangère dans ce monde trop fardé et programmé pour sa verve et sa jeunesse. Son verre de vin tanguait dangereusement dans ses menottes distraites. Il était évident qu'elle attendait quelqu'un, ou un groupe de personnes, avec qui socialiser. Mais ses sauveurs ne viendraient pas. Ce qu'elle semblait comprendre au fur et à mesure que le temps égrenait l'horloge. À l'autre bout de la salle, un brouhaha annonça la venue d'un personnage attendu. Je n'avais pas besoin de lever la tête pour savoir que mon fils venait de faire son entrée. Je savais que je n'avais pas besoin de me déplacer, qu'il viendrait vers moi pour me saluer comme à son habitude, c'est ce que tour le monde attendait de lui.

Bien installée dans mon poste d'observation, je continuais à jeter un oeil sur la demoiselle éperdue que j'avais préalablement remarquée. Dès qu'elle eut reconnu Samuel, je la vis blêmir. Je pouvais sentir son pouls s'accélérer malgré la distance à la vue de cet homme. Mon homme. Je percevais toute la tension qui émanait d'elle. Un coup solidement asséné et elle volerait en éclats sur les lattes du parquet. Je la voyais s'arquer tandis qu'il avançait de son pas royal vers moi, lui donnant l'impression qu'il avançait vers elle, puisque je m'étais stratégiquement glissée à quelques mètre de son dos. Ses yeux agrandis d'appréhension, papillonnaient tandis qu'elle cherchait désespérément un visage connu. Un visage autre que celui de Samuel, évidemment.

Lorsqu'il est passé à côté d'elle, il s'est à peine arrêté, signifiant qu'il l'avait remarquée. Donnant à la poulette une petite importance. Il me fit un baise-main révérencieux avant de retourner vers elle. Je pouvais voir une goutte de sueur trembler sur sa tempe, l'odeur pénétrante de sa peur valsait jusqu'à moi tandis que je voyais luire dans le fond de l'oeil de Samuel, ce regard de conquérant qui lui seyait si bien. Il marchait vers elle pendant qu'elle cherchait désespérément une issue, mais elle était prise comme une oiselle dans un filet. Et lui jubilait, sous son sourire de convenance. Sachant très bien qu'elle ne pourrait rien dire ou faire pour s'échapper. La bonne société pourvoirait à tisser les dernières mailles des chaînes que j'avais patiemment disposées autour d'elle.

J'étais très satisfaite de nous ; décidément, je connaissais bien le patron.

Libellés :

2 Commentaires:

Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Super texte, intrigue, trame, conclusion,tout y est bien à point bravo

9:01 a.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Bonjour,

Très bon texte.

J'ai découvert ton blogue récemment, très divertissant.

Je reviendrai, tu peux venir me visiter:

Rosie-toutsimplement.blogspot.com

avec en avant: http://

@ plus

8:54 p.m.  

Publier un commentaire

<< Retour sur le sentier