mercredi, février 14, 2007

Les pavés de Bruxelles

Voici ma contribution de la semaine pour le Coitus. Je vous livre une petite semaine de ma vie qui s'est déroulée il y a presque vingt ans aujourd'hui.


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Je venais de passer la plus étrange semaine de ma vie. En ce qui a trait aux émotions du moins. J'étais ambivalente sur ce que je ressentais, déchirée entre l'ennui et l'exaltation. Ennui parce que les voyages d'affaires quand on a tout juste quatorze ans c'est plutôt plate. Dans les hôtels il n'y avait que des femmes et des hommes en complet devisant dans des langues qui m'étaient étrangères. À l'horizon, personne de mon âge ou de ma génération. Et même si j'avais croisé de tels personnages je n'ai jamais été douée pour les langues et le néerlandais m'apparaissait comme une montagne infranchissable. L'exaltation parce que j'étais loin de chez moi, dans un premier voyage d'adulte, toute seule avec mon père. Et puis, j'ai toujours su m'émerveiller alors les vieilles bâtisses chargées d'histoire, les musées que je visitais pendant que mon compagnon de voyage additionnait les réunions importantes et cette ville-dortoir poussée quelque part entre la Seconde Guerre et mon voyage, qui n'était égayée que par des graffiti mordants dont je ne comprenais la signification que par la violence des couleurs, me parlaient de la vie et du temps écoulé.

Mais au bout de presque une semaine de ce régime, je commençais à avoir cure des trop longs repas durant lesquels toutes les discussions se déroulaient en anglais(que je ne comprenais pas). Je commençais donc à m'ennuyer fermement. La maison autant que mes amis me semblaient encore plus loin qu'au début du périple.

La fin de semaine s'annonçait belle et nous nous dirigions vers Bruxelles. Depuis le début du voyage mon père me disait que ce serait différent là-bas puisque les gens y parleraient français. J'avais moult fois tué le temps en rêvant de parcelles d'aventure durant lesquelles je pourrais me débrouiller toute seule. Et puis c'est arrivé. Nous étions là, dans cette ville francophone aux pavés battus par le temps, dont la géographie m'étonnait puisque certaine parties de la vieille ville étaient fermées à la circulation automobile. Quelque part sur une grande place, j'ai pris mon premier thé glacé sur une terrasse.

Je ne sais plus si mon père était là ou dans une quelconque réunion, je n'ai aucun souvenir de lui durant cet après-midi cependant, je me rappelle avoir changé de boui-boui souvent pour les étrenner. À la fin de cette journée, nous nous sommes rendus chez une amie de mon père qui avait deux fils dont un de mon âge, Olivier qu'il s'appelait. Je dirais que nous nous sommes immédiatement reconnus. Ssans nous comprendre, au début. Nos patois adolescents additionnés à nos accents respectifs créaient des zones d'incompréhension totale. Mais on a fini par trouver le moyen de contourner ces difficultés et j'ai réussi à lui faire dire hockey comme du monde.

Une soirée à rire, à se découvrir. Soirée à partager des passion sans chercher à se dissimuler ; nous savions tous les deux que le temps nous était compté. Une soirée à avoir, pour la première fois de ma vie, l'impression que je mettais les deux pieds quelque part à l'extérieur de l'enfance. Une soirée qui s'est terminée sous le veto de mon père qui a refusé qu'Olivier et moi partagions la même chambre ; il s'imaginait sans doute que nous en profiterions pour faire des cochonneries. En fait il a salit mon rêve de ses idées salaces, ma bouche était encore vierge des assauts masculins. Mon corps, pour sa part, était encore dans une tour d'ivoire.

Mon père et moi sommes retournés à Amsterdam le lendemain, pour prendre l'avion qui nous ramènerait à Montréal. J'ai laissé dans les rues de Bruxelles, les seules traces déjà visible de l'éclosion de mon adolescence.

Des années plus tard, Olivier est venu à Montréal et à tenté de me contacter. Mais mon frère ne m'a jamais fait le message à temps. Pour cette raison et beaucoup d'autres, Olivier sera toujours pour moi un garçon aux yeux tachetés de vert qui savait rire et s'amuser. Mais j'ai longtemps rêvé qu'il m'avait trouvée jolie, ne serait-ce qu'un tout petit peu.

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4 Commentaires:

Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Je suis certain qu'il t'a trouvé plus que jolie... charmante Mathilde. Bonne St-Valentin à ma grande et meveilleuse amie.

4:44 p.m.  
Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Très bon texte.

Bonne continuation, j'ai hâte de lire la suite.

J'ai sorti un nouveau post sur l'indifférence de la blogosphère, si cela t'intéresse.

Bonne journée.

12:38 p.m.  
Blogger La Souris (Marie-Ève Landry) s'est arrêté(e) pour réfléchir...

That french sentence is really weird (seems to be coming from a bad translation itself) but it sounds like: «This is a great view, only we never know if we made it prettier or if it's pretty so -- or it is "because"? --we look at it that way.»

Where does that come from? I think I heard something like this before but I can't remember where. Maybe in a movie?

5:04 p.m.  
Blogger Mamathilde s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Alex : Ça me prenait bien toi pour avoir une carte de st-valentin cette année. Merci encore. C'est plus que ce que tu ne pouvais imaginer.

Rosie : Merci, j'irai jeter un oeil.

La Souris : Moi je pense spam nouveau genre. Alors j'ai effacé le commentaire.

9:25 a.m.  

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