jeudi, avril 19, 2007

Facteurs nocturnes

Quand les ombres de la nuit meuvent doucement leurs ailes pour s'étendre sur la parcelle de monde que j'habite, quand les réverbères allument leurs feux pour diriger les silhouettes des passants, quand sonne l'heure où la fatigue m'emporte, je vois trop d'images déferler sous mes paupières clauses pour sombrer immédiatement dans le sommeil. Des images des rêves éveillés que je caresse durant la journée additionnées à celles que mon inconscient travaille et m'impose, dans cet état de transe qui précède le sommeil en soi. Alors je me retrouve, dépouillée, vulnérable, mise à nu devant l'étendue de mes émotions et de mes sentiments. Je ne peux plus contourner le réel. Plus faire semblant que rien n'est important. Plus me cacher les aspérités de mes vérités intérieures.

À coup de romans palpitants, j'essaie de chasser les visions illusoires que j'entretiens depuis trop longtemps. Arrêter la course des idées folles qui me font vibrer jusqu'au fond de l'âme. Mais dès que je glisse dans les bras de Morphée, ce passé récent me rattrape à toute vitesse. Des lors il m'est impossible de tenir à distance mes aspirations, mes craintes et mes espoirs. Ils m'envahissent jusqu'au bout des ongles. Me laissant hagarde, le matin venu. Dépouillée des murailles invisibles que je dresse autour de moi dans ma vie journalière, je me sais atteinte complètement. Je voudrais tellement pouvoir contrôler cet aspect de mon quotidien, mais je sais que rien n'est moins possible. Laisser aller est une action que j'ai beaucoup de peine à poser.

J'ai découvert récemment que je rêvais. Comme tout le monde, sans doute. Cependant je ne me rappelle de mes rêves que depuis peu. En fait je viens de recommencer à m'en souvenir. Plus de chute dans les abysses trop profondes que j'ai fréquentées durant toutes les années qui m'ont menées à la dépression. Une brèche ouverte entre mon conscient et mon inconscient, comme pour me rappeler que tout cela est, en fait, une entité. Assembler les parts de moi que j'avais laisser choir sur les sentiers de mes heures. Décloisonner mes blessures, les laisser respirer pour qu'elles finissent par cicatriser. Laisser couler la sève de mes espérances troublées. Admettre que mon coeur bat. Qu'il se heurte parfois à plus fort que lui. Admettre ma faillibilité. Admettre, surtout, l'éventail des possibles.

Rêver aux murmures des mots restés dans le silence des attentes. Sourire en dormant. M'éveiller au coeur de la nuit, le sang rougissant mes joues. Sentir sur les courbes de mon ventre les caresses des gestes qui ne sont pas encore posés. Me laisser retomber, alanguie dans les draps douillets de ces facteurs nocturnes qui me recollent à moi-même, malgré toute la froide logique que je tente désespérément de m'imposer. Malgré tous les dénis que je m'assène pour garder un cap que j'ai trop longtemps suivi.

Rire en silence. Heureuse d'être en vie. Heureuse d'avoir toujours su jouer avec l'imagination salvatrice. Et savoir que ce bonheur d'être qui me parcoure les veines m'appartient en propre comme au figuré. Savoir, sans l'ombre d'un doute, que j'ai envie de mordre jusqu'au sang dans cet avenir qui me tend les bras et que ce sera aussi beau que toi.

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1 Commentaires:

Anonymous Anonyme s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Mazette ! Cela va tomber comme des feuilles à l'automne, les lecteurs ;-) ;-)
Continue, Mamathilde. C'est du bon, du beau tout çà.

3:16 p.m.  

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